Sélection de la Saint-Valentin

avec l’Orchestre du CNA

2024-02-14 20:00 2024-02-14 22:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : Sélection de la Saint-Valentin

https://nac-cna.ca/fr/event/33737

Événement en personne

Envie de musique qui fait vibrer les cœurs et les cordes? Pour la Saint-Valentin, nous accueillons la mezzo-soprano et Ottavienne d’origine Wallis Giunta à la Salle Southam pour une soirée romantique à souhait. La cantatrice interprète trois jolies chansons d’amour tirées de One Touch of Venus (Signé Vénus, en VF), une comédie musicale de Kurt Weill (paroles d’Ogden Nash); l’occasion de montrer la...

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Salle Southam ,1 rue Elgin,Ottawa,Canada
mer 14 février 2024
mer 14 février 2024

Dernière mise à jour: 7 février 2024

Programme

FELIX MENDELSSOHN Ouverture du Songe d’une nuit d’été, op. 21 (12 min)

GUSTAV MAHLER « Adagietto », extrait de la Symphonie nº 5 (10 min)

KURT WEILL Trois chansons d’Un caprice de Vénus (10 min)
« Foolish Heart »
« Speak Low »
« I'm a Stranger Here Myself »

Wallis Giunta, mezzo-soprano

SERGUEÏ RACHMANINOV Vocalise, op. 34, no 14 (6 min)

Rachel Mercer, violoncelle

PIOTR ILITCH TCHAÏKOVSKI Ouverture-fantaisie, Roméo et Juliette (20 min)

IL N’Y AURA PAS D’ENTRACTE.

Paroles de Ogden Nash

« Cœur follet » 

Me direz-vous comment c’est arrivé? 
Ai-je trop fait confiance à l’amour? 
Quand la magie s’est-elle éteinte? 
Aurais-je perdu la main? 
Combien le monde peut être gai!
Pourrais-je t’aimer, peut-il m’aimer? 

L’amour ne doit pas être sérieux, pas vrai? 
On se rencontre, on s’embrasse, on commence
J’imaginais tout comprendre 
J’oubliais mon cœur follet

L’amour ne peut pas être absurde, pas vrai? 
On s’embrasse, on se sourit, on se sépare
Tout se passe comme tu l’as prévu 
Si tu fais taire ton cœur follet

Pauvre cœur fou
Pleurant pour celui qui t’ignore
Pauvre cœur fou
Fuyant celui-là qui t’adore 

Ah, l’amour m’effleurait à peine
À présent mon cœur me trahit
Je voudrais danser avec un nouvel amant chaque nuit
Mais mon cœur follet s’y refuse
Ah, l’amour m’effleurait à peine
À présent mon cœur me trahit
Je voudrais danser avec un nouvel amant chaque nuit
Mais mon cœur follet me dit non

Lyrics by Ogden Nash

“Foolish Heart”

Will you tell me how these things happen?
Have I trusted in love too much?
When did the magic vanish?
Have I somehow lost my touch?
How gay the world could be
Could I love you, could he love me?

Love shouldn't be serious, should it?
You meet, you kiss, you start
I fancied that I understood it
I forgot my foolish heart

Love can't be illogical, can it?
You kiss, you smile, you part
It happens the way that you plan it
If you hush your foolish heart

Poor foolish heart
Crying for one who ignores you
Poor foolish heart
Flying from one who adores you

Ah, love used to touch me so lightly
My heart now betrays me so
I would dance with a new lover nightly
But my foolish heart says no
Ah, love used to touch me so lightly
My heart now betrays me so
I would dance with a new lover nightly
But my foolish heart says no

« Parle tout bas » 

Parle tout bas quand tu parles, amour, 
Notre jour d’été s’étiole, 
Trop vite, trop tôt. 

Parle tout bas quand tu parles, amour, 
Notre moment passe vite, comme des bateaux ivres, 
Nous sommes séparés trop tôt. 

Parle tout bas, chéri parle tout bas, 
L’amour est une étincelle perdue dans la nuit, 
Trop vite, trop tôt, 
Où que j’aille je sens 
Que demain est proche, demain arrive, 
Et toujours trop tôt. 

Le temps est si vieux et l’amour si bref, 
L’amour est d’or pur et le temps est voleur. 
Il est tard chéri, il est tard, 
Le rideau tombe, tout s’achève 
Trop vite, trop tôt, 
J’attends chéri, j’attends, 
Parle-moi tout bas, 
Parle-moi d’amour et vite. 

“Speak Low”

Speak low when you speak, love,
Our summer day withers away,
Too soon, too soon.

Speak low when you speak, love,
Our moment is swift, like ships adrift,
We’re swept apart too soon.

Speak low, darling speak low,
Love is a spark lost in the dark,
Too soon, too soon,
I feel wherever I go
That tomorrow is near, tomorrow is here,
And always too soon.

Time is so old and love so brief,
Love is pure gold and time a thief.
We’re late darling, we’re late,
The curtain descends, ev’rything ends
Too soon, too soon,
I wait darling, I wait,
Will you speak low to me,
Speak love to me and soon.

« Je suis moi-même une étrangère » 

Dites-moi si l’amour reste une proposition prisée 
Ou s’il est seulement un art dépassé? 
Pardonnez-moi si je pose une question naïve 
Je ne connais pas son cœur 
Ici je suis moi-même une étrangère.   

Pourquoi ai-je tort de murmurer que je l’adore 
Alors que c’est aussi flagrant? 
Serait-ce que l’amour l’embarrasse ou l’ennuie? 
Je n’attends qu’un signe de lui 
Car ici je suis moi-même une étrangère. 

Je rêve d’un jour, chaud et joyeux 
Avec mon visage plaqué entre ses mains 
Ai-je raté le chemin? Me serais-je égarée? 
Je demande, et personne ne comprend.   

Aime-moi ou quitte-moi, telle semble être la question 
J’ignore les tactiques à utiliser 
Mais s’il me fait lui-même une proposition 
Comment pourrais-je refuser 
Alors qu’ici je suis moi-même une étrangère?   

Dites-moi, je vous prie, dites à une étrangère 
À la curiosité dévorante 
Y a-t-il réellement quelque risque 
Que l’amour soit maintenant dépassé? 
Je voudrais surtout savoir 
Pourquoi vous le gaspillez 
Une idylle vraie est si charnelle 
Par quoi l’avez-vous remplacée? 
Quelle est votre dernière lubie? 
Le gin-rami est-il plus délicieux? 
Skier sur la neige est-il plus agréable? 
Pour l’amour du Ciel, qu’est-ce que c’est?

Je ne peux croire que l’amour a perdu son éclat 
Que la passion est vraiment du passé 
Si le genre n’est qu’un terme grammatical 
Comment ne trouverai-je jamais mon chemin 
Alors qu’ici je suis moi-même une étrangère? 

Comment peut-il ignorer que je suis disponible? 
Pourquoi ces perspectives victoriennes? 
Vous avez devant vous une femme en mission 
Je dois trouver la clé qui l’allume 
Et s’il me fait gravement une proposition 
Comment pourrais-je refuser? 
Comment pourrais-je refuser 
Alors qu’ici je suis moi-même une étrangère. 

“I’m a Stranger Here Myself”

Tell me, is love still a popular suggestion
Or merely an obsolete art?
Forgive me for asking a simple question
I'm unfamiliar with his heart
I’m a stranger here myself.

Why is it wrong to murmur I adore him
When it’s shamefully obvious I do?
Does love embarrass him or does it bore him?
I’m only waiting for my cue
’Cause I’m a stranger here myself.

I dream of a day, of a gay warm day
With my face between his hands
Have I missed the path? Have I gone astray?
I ask, and no one understands.

Love me or leave me, that seems to be the question
I don’t know the tactics to use
But if he should offer a personal suggestion
How could I possibly refuse
When I’m a stranger here myself?

Please tell me, tell a stranger
By curiosity goaded
Is there really any danger
That love is now outmoded?
I’m interested especially
In knowing why you waste it
True romance is so fleshly
With what have you replaced it?
What is your latest foible?
Is gin rummy more exquisite?
Is skiing more enjoyable?
For Heaven's sake, what is it?

I can’t believe that love has lost its glamour
That passion is really passé
If gender is just a word in grammar
How can I ever find my way
When I’m a stranger here myself?

How can he ignore my available condition?
Why these Victorian views?
You see here before you a woman with a mission
I must discover the key to his ignition
And if he should make a dramatic proposition
How could I possibly refuse?
How could I possibly refuse
When I’m a stranger here myself.

Répertoire

FELIX MENDELSSOHN

Ouverture du Songe d’une nuit d’été, op. 21

En 1825, les pièces de Shakespeare furent rééditées dans une traduction allemande de A.W. Schlegel et de Ludwig Tieck. Peu de temps après leur parution, Felix Mendelssohn (1809-1847), avec ses frères et ses sœurs, les dévorait. Il eut bientôt l’idée de composer une ouverture pour le Songe d’une nuit d’été. Il l’acheva en août 1826 et la dévoila à sa famille lors d’une représentation privée où sa sœur Fanny et lui-même étaient au piano. En février 1827, l’ouverture fut jouée en public à Stettin, sous la direction de Carl Loewe. Le jeune compositeur prodige qui venait d’avoir 18 ans et dont c’était la première œuvre orchestrale obtint un succès critique retentissant. Depuis lors, l’ouverture du Songe d’une nuit d’été est considérée comme l’un des premiers chefs-d’œuvre de Mendelssohn (avec l’Octuor composé en 1825) et demeure aujourd’hui l’une de ses œuvres les plus populaires.

Cette ouverture inaugure une tendance du XIXe siècle, celle des ouvertures de concert, lesquelles ressemblent par leur forme et leur conception à des ouvertures d’opéra, sauf qu’il s’agit de pièces à part entière. Généralement, la musique fait allusion à l’intrigue de l’œuvre dramatique d’origine – dans ce cas-ci, ce sont les histoires d’amour enchevêtrées de la pièce de Shakespeare. À la demande des éditeurs Breitkopf et Härtel, Mendelssohn a écrit la note suivante à propos des idées qui sous-tendent son ouverture :

Je pense qu’il suffira de se rappeler comment le roi et la reine des elfes, Obéron et Titania, avec tous leurs serviteurs, apparaissent ici et là, tout au long de la pièce; vient ensuite le prince Thésée d’Athènes qui va à la chasse avec sa femme, puis deux couples d’amoureux, qui se perdent et se retrouvent; enfin, une troupe de commerçants maladroits et grossiers qui se livrent à de lourds amusements et les elfes qui taquinent tout le monde – voilà sur quoi la pièce est construite. Lorsque, à la fin, tout s’est bien passé et que les personnages principaux s’en vont, bien pourvus et heureux, les elfes reviennent et bénissent la maison, puis disparaissent au lever du jour. C’est ainsi que se termine la pièce, ainsi que mon ouverture.

Ce « scénario » fantastique prend vie grâce à l’orchestration colorée de Mendelssohn et à un tissage imaginatif de motifs qui se transforment au fur et à mesure que l’ouverture progresse. L’œuvre commence et se termine par quatre accords joués par les bois et que Franz Liszt comparait à « des paupières qui s’abaissent et se soulèvent lentement ». « Entre les deux, poursuit-il, un charmant monde de rêve » se dessine, en commençant avec les violons, qui font courir les elfes ou voltiger les fées. L’orchestre émerge avec un thème joyeux et héroïque (le prince Thésée et sa fiancée Hippolyta à la chasse), suivi d’une mélodie sinueuse aux clarinettes, à laquelle répondent tendrement les violons (le chant des amoureux). Puis, au-dessus des violoncelles et des contrebasses qui trépignent (les marchands maladroits), les violons et les bois aigus jouent un air endiablé où l’on reconnaît un braiment, allusion à Nick Bottom, le tisserand à tête d’âne. Les elfes reprennent leur travail, puis s’épuisent dans une réminiscence, en mode mineur, du chant des amoureux. Avec le retour des accords, aux bois, une reprise variée des principaux motifs s’amorce : les elfes qui accourent, la mélodie des amoureux, les piétinements des marchands, les hi-han de Bottom et le thème héroïque du prince. Maintenant que tout va bien, les elfes reviennent pour donner une dernière bénédiction et, à la lueur somnolente de l’air du prince et des derniers accords, un nouveau jour se lève.

GUSTAV MAHLER

« Adagietto », extrait de la Symphonie n° 5

Sans surprise, l’intensité du sentiment amoureux a inspiré de nombreuses et remarquables compositions musicales qui ont touché bien cœurs. Le quatrième mouvement, « Adagietto », de la Cinquième symphonie de Gustav Mahler (1860-1911) est l’une d’elles. Le 7 novembre 1901, au cours d’une soirée à laquelle assistaient d’autres artistes et intellectuels viennois, Mahler rencontra Alma Schindler. Lui, 41 ans, était un ambitieux compositeur de symphonies grandioses, un chef d’orchestre réputé et directeur artistique du prestigieux Opéra impérial et royal de Vienne (Hofoper). Elle, 19 ans, était une brillante, riche et superbe jeune femme attirée par le génie artistique. Au moment de sa rencontre avec Mahler, Alma entretenait une relation avec le compositeur Alexander Zemlinsky. Mais, quelques semaines plus tard, elle et Mahler se fiancèrent dans le plus grand secret, avant de se marier en mars 1902, alors qu’Alma était enceinte de leur premier enfant.

Leur mariage fut mouvementé, mais l’« Adagietto » témoigne de la passion intense (certainement celle de Mahler pour Alma) qu’ils ont éprouvée au début de leur idylle. Mahler l’aurait composé en novembre comme une « déclaration d’amour à Alma », ainsi que l’a noté dans sa partition de la Cinquième, son ami Willem Mengelberg, chef de l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam. Mengelberg a aussi écrit : « Au lieu d’une lettre, il [Mahler] lui a envoyé ce manuscrit sans autre explication. Elle a compris et lui a répondu qu’il devait venir!!! C’est ce qu’ils m’ont raconté tous les deux! »

Le mouvement, en trois parties, est écrit pour cordes et harpe. Une mélodie mélancolique avec accompagnement de harpe enserre une section centrale plus passionnée et angoissée attribuée aux cordes. L’effet produit par les panneaux extérieurs de ce triptyque ressemble à une sérénade sans paroles. Mais d’après Mengelberg, Alma lui aurait confié que Mahler lui avait écrit un poème destiné à être chanté sur la mélodie des premiers violons :

Wie ich dich liebe,
Du meine Sonne,
ich kann mit Worten Dir’s nicht sagen
Nur meine Sehnsucht
Kann ich Dir klagen
Und meine Liebe
Meine Wonne!

      Comme je t’aime,
      Toi, mon soleil,
      Je ne peux te le dire avec des mots.
      Je peux seulement me plaindre
      Me languir de toi
      Mon amour
      Ô toi ma joie!

La section centrale comporte une descente, comme un soupir toujours plus insistant, une paraphrase du leitmotiv du « regard » dans Tristan und Isolde de Richard Wagner, lorsque les personnages tombent amoureux, se dévorant des yeux. Musicienne talentueuse et compositrice prometteuse, Alma aura certainement compris l’allusion!

KURT WEILL

Trois chansons d’Un caprice de Vénus

« Foolish Heart » 

« Speak Low » 

« I’m a Stranger Here Myself » 

Rien n’est aussi mystérieux, exaltant et déconcertant que l’amour. Il n’est donc pas étonnant que ce sujet fasse l’objet de tant de récits. La comédie musicale One Touch of Venus (Signé Vénus, en VF) de Kurt Weill (1900-1950), créée à Broadway en 1943, est une exploration touchante et teintée d’humour noir de cette singulière expérience humaine. La Vénus en question est une ancienne statue d’Anatolie, que venait d’acquérir un riche connaisseur d’art de New York, Whitelaw Savory. Un jour, le coiffeur Rodney Hatch rend visite à Savory pour lui couper les cheveux. Il aperçoit la statue et, sur un coup de tête, lui glisse au doigt la bague qu’il allait offrir à sa fiancée, Gloria. Vénus prend soudain vie et s’éprend de Rodney, qu’elle considère comme son libérateur. Rodney s’enfuit, terrorisé, mais Vénus le poursuit passionnément, semant le chaos sur son passage, se demandant si une déesse peut vivre une vie humaine. 

Pour une comédie musicale de Broadway, le scénario de S.J. Perelman dépassait à l’époque les limites de la décence. De fait, Weill souhaitait que Marlene Dietrich fasse ses débuts à Broadway dans le rôle de Vénus. Il avait même composé les chansons du personnage en pensant à elle. Dietrich refusa de faire partie de la production, la jugeant « trop sexy ». Les producteurs décidèrent finalement de confier le rôle à Mary Martin, un choix à priori atypique. Sur les paroles mordantes d’Ogden Nash, Weill créa une partition symphonique qui témoigne, comme l’a souligné le compositeur Mark N. Grant, de sa maîtrise des idiomes de la musique populaire américaine (swing, barbershop, ragtime à la Irving Berlin et blues), ainsi que de son respect pour les productions de Broadway et pour l’opérette. Weill travailla aussi en étroite collaboration avec la chorégraphe Agnes De Mille. Avec ses 567 représentations, One Touch of Venus fut un succès pour Weill et fit de Mary Martin une vedette. 

Aujourd’hui, vous entendrez les trois chansons de Vénus, lesquelles supportent une bonne part de la charge émotive de la comédie musicale. Dans « Foolish Heart », valse de style viennois et deuxième chanson de Vénus, la déesse essaye de comprendre pourquoi ses charmes divins n’ont aucun effet sur Rodney. Frustrée par les caprices de l’amour romantique, elle se demande pourquoi elle est attirée par Rodney alors qu’il semble éprouver des sentiments contraires : « Poor foolish heart/Crying for one who ignores you… /Flying from one who adores you. » (Pauvre cœur fou/Pleurant pour celui qui t’ignore… /Fuyant celui-là qui t’adore). 

« Speak Low » est l’une des grandes chansons d’amour de Weill et un éternel classique. Pour les premiers mots, Weill suggéra à Nash d’utiliser, en le modifiant légèrement, le vers de la pièce de Shakespeare Beaucoup de bruit pour rien : « Speak low, if you speak of love » (Parlez bas, si vous parlez d’amour). Dans ce numéro sulfureux teinté de mélancolie, Vénus exhorte tendrement Rodney à plonger dans l’amour avec elle, car « le temps est si vieux et l’amour si bref […] tout s’achève trop vite, trop tôt ». Une impression que tous les amants mortels ne connaissent que trop bien. 

Le swing « I’m a Stranger Here Myself » est la première chanson de Vénus. Rodney résiste à ses avances, et la déesse de l’amour ne comprend pas pourquoi. Elle se demande si elle comprend vraiment l’amour (si tant est qu’on puisse le comprendre) et si l’amour a changé depuis l’Antiquité : « l’amour […] [est-il] seulement un art dépassé? ». La « passion [appartient] vraiment au passé? ». 

SERGUEÏ Rachmaninov

Vocalise, op. 34, n° 14

Comme l’affirme le musicologue Geoffrey Norris, Sergueï Rachmaninov (1873-1943) fut « le dernier représentant du romantisme russe tardif ». Il ignora les tendances modernistes apparues au début du XXe siècle, leur préférant, dans ses œuvres pour orchestre, un langage luxuriant, coloré d’une palette harmonique tonale. Ses mélodies sont nettement lyriques, très expressives et souvent empreintes de mélancolie, un état d’âme maintes fois associé au sentiment amoureux.

Outre sa musique pour orchestre et pour piano, Rachmaninov fut un auteur prolifique de mélodies appréciées pour la subtilité avec laquelle elles traduisent les sentiments exprimés dans leurs textes. Entre 1910 et 1912, Rachmaninov composa 13 mélodies sur des textes de plusieurs poètes majeurs du romantisme russe, dont Alexandre Pouchkine et Iakov Polonski. Chacune de ces mélodies était adaptée aux talents individuels de certains artistes lyriques russes. En 1915, Rachmaninov ajouta un dernier élément à son recueil : Vocalise, publiée en tant qu’opus 34.

Dédiée à la soprano Antonina Nejdanova, Vocalise a la particularité d’être un véritable « chant sans paroles », qui, à l’origine, devait être exécuté sur une voyelle au choix. La mélodie mélancolique est porteuse de sens. Malgré l’absence de paroles, elle véhicule des émotions profondes – peut-être un désir, une nostalgie, un chagrin d’amour. Universellement prisée, Vocalise a été popularisée par de nombreux arrangements pour diverses combinaisons instrumentales et vocales, comme celui pour violoncelle solo et orchestre que vous entendrez aujourd’hui.

PIOTR ILITCH TCHAÏKOVSKI

Ouverture-fantaisie, Roméo et Juliette

Il n’y a peut-être pas de meilleur véhicule que la musique, avec ou sans paroles, pour exprimer les émotions en montagnes russes que l’amour procure. De nombreux compositeurs du XIXe siècle (soit de l’époque romantique) ont été inspirés par les histoires d’amour interdit. Celle de la pièce de Shakespeare Roméo et Juliette – deux amants issus de familles rivales – était l’une de leurs préférées. Parmi les œuvres qui adoptent ce thème, l’ouverture-fantaisie de Tchaïkovski (1840-1893) est probablement la plus connue. Sans doute, plusieurs reconnaîtront son « thème de l’amour », abondamment utilisé à la télévision comme au cinéma. 

C’est d’abord Mili Balakirev qui eut l’idée d’une ouverture sur Roméo et Juliette de Shakespeare. Chef de file des compositeurs nationalistes russes de Saint-Pétersbourg connu sous le nom de « Groupe des Cinq », Balakirev développa avec Tchaïkovski une étroite relation professionnelle dont l’ouverture-fantaisie est le premier résultat. En novembre 1869, Tchaïkovski annonçait à Balakirev qu’il avait esquissé la majeure partie de l’œuvre et précisait : « Le schéma général est le vôtre : une introduction qui représente le frère, la lutte – allegro – et l’amour – deuxième thème ». Après avoir vu l’ébauche, Balakirev apprécia certains thèmes, mais pas la totalité. Tchaïkovski se dit prêt à les réviser en conséquence. La première version obtint un succès modéré, mais Tchaïkovski continua de réviser la partition, créant une deuxième version en 1870, puis une autre 10 ans plus tard. Publiée en 1881, avec une dédicace à Balakirev, la troisième version est celle qui est généralement jouée aujourd’hui.

Conformément au schéma de Balakirev, Tchaïkovski évoque le drame central de la pièce de Shakespeare au moyen de trois thèmes principaux récurrents. Au commencement, on entend le premier thème : une mélodie semblable à un chant, d’abord entonnée par les clarinettes basses et les bassons, puis reprise par les bois. Après l’introduction lente, un thème brusque dépeint la guerre entre les Montaigu et les Capulet. La musique de « lutte » comprend des passages de cordes en escarmouche, des traits courts et rapides lancés entre bois et cordes, un contrepoint imitatif en forme de poursuite et des coups de cymbales syncopés. Le thème chantant est bientôt entraîné dans le conflit. Une fois la bataille apaisée, le cor anglais et les altos en sourdine énoncent le thème de l’amour, dont les phrases nostalgiques et soupirantes sont d’abord tendres et quelque peu hésitantes, avant d’être reprises, avec plus d’assurance, par les flûtes et les hautbois. Il se calme ensuite dans un épisode rêveur avec accompagnement de harpe : Roméo et Juliette, dans l’éclat de leur amour. 

Dans un terrifiant climax projeté par les trompettes, le thème de la lutte revient, avec une plus grande force et en même temps que la mélodie chantante. Après d’autres coups de cymbales syncopés, le thème principal reprend. Mais bientôt, celui de l’amour revient, s’épanouissant cette fois sur des cordes abondantes et des bois palpitants. La mélodie s’envole vers des sommets passionnés, mais le conflit ne peut se résoudre : la musique de « lutte » commence à s’immiscer à nouveau et atteint le comble du désespoir, avant de s’effondrer. Un roulement de timbales tonitruant annonce la fin. Comme des lamentations endeuillées, des fragments du thème de l’amour apparaissent sur la pulsation funèbre des timbales, et les bois suivent avec un sombre choral. Les cordes font entendre le dernier fragment du thème de l’amour avant que les accords retentissants de tout l’orchestre mettent fin à l’ouverture. 

Notes de programme par Hannah Chan-Hartley, PhD (traduit de l’anglais) 

Artistes

  • Cheffe d’orchestre Jessica Cottis
  • Mezzo-soprano Wallis Giunta
  • Violoncelle Rachel Mercer
  • Animatrice Marjolaine Lambert
  • Régie Tobi Hunt McCoy
  • Avec Orchestre du CNA

Orchestre du CNA

Premiers violons
Yosuke Kawasaki (violon solo)
Jessica Linnebach (violon solo associée)
Noémi Racine Gaudreault (assistante violon solo)
Jeremy Mastrangelo
Marjolaine Lambert
Zhengdong Liang
Manuela Milani
*Martine Dubé
*Oleg Chelpanov
*Heather Schnarr

Seconds violons
Emily Westell
Emily Kruspe
Frédéric Moisan
Carissa Klopoushak
Leah Roseman
Mark Friedman
Edvard Skerjanc
**Karoly Sziladi
**Winston Webber
*Renée London
*Andréa Armijo Fortin
*Sara Mastrangelo

Altos
Jethro Marks (solo)
**David Marks (solo associé)
David Goldblatt (assistant solo)
Paul Casey
Tovin Allers
David Thies-Thompson
*Brenna Hardy-Kavanagh

Violoncelles
Rachel Mercer (solo)
Julia MacLaine (assistante solo)
Timothy McCoy
Leah Wyber
Marc-André Riberdy
*Karen Kang

Contrebasses
Max Cardilli (assistant solo)
Vincent Gendron
Marjolaine Fournier
*Paul Mach

Flûtes
Joanna G’froerer (solo)
Stephanie Morin
*Christian Paquette

Hautbois
Charles Hamann (solo)
Anna Petersen
*Melissa Scott

Cor anglais
Anna Petersen

Clarinettes
Kimball Sykes (solo)
Sean Rice
*Shauna Barker
*Juan Olivares

Bassons
Darren Hicks (solo)
Vincent Parizeau

Cors
*Jessie Brooks (solo invitée)
Julie Fauteux (solo associée)
Lawrence Vine
Lauren Anker
Louis-Pierre Bergeron

Trompettes
Karen Donnelly (solo)
Steven van Gulik
*Bradley Luna

Trombones
*Steve Dyer (solo invité)
Colin Traquair

Trombone basse
Zachary Bond

Tuba
Chris Lee (solo)

Timbales
*Simón Gómez (solo invité)

Percussion
Jonathan Wade
*Andrew Harris

Harpe
*Angela Schwarzkopf

Piano
*Frederic Lacroix

Musicothécaire principale
Nancy Elbeck

Musicothécaire adjoint
Corey Rempel

Chef du personnel
Meiko Lydall

Coordinatrice du personnel de l’Orchestre
Laurie Shannon

*Musiciens surnuméraires
**En congé

Alliance internationale des employés de scène et de théâtre