Dernière mise à jour: 29 juin 2022
ARCHER Sinfonietta
MOZART Symphony No. 31, “Paris”
TCHAIKOVSKY Piano Concerto No. 1
I. Andantino ma energico
II. Larghetto piacevole
III. Allegro molto con brio
La compositrice canadienne Violet Archer avait une prédilection pour la musique orchestrale. Bien qu'elle ait reçu une formation de pianiste et d’organiste, elle a œuvré pendant près de huit ans (1940-1947) comme percussionniste au sein de l’Orchestre symphonique des femmes de Montréal, jouant de tous les instruments à percussion, à l’exception des timbales. Elle attribuait à cette expérience son amour et sa compréhension de l’écriture pour orchestre. « Appartenir à cet ensemble m’a permis d’apprendre à connaître le son de l’orchestre ‘de l’intérieur’ », expliquait-elle dans un essai autobiographique. « Cela m'a également fait prendre conscience de l'importance de la valeur dynamique des instruments à percussion dans le tissu orchestral. »
Sa Sinfonietta de 1968, qui lui avait été commandée par l’Orchestre symphonique de Saskatoon, offre un bel exemple de son style et de son art caractéristique de l’écriture pour grand ensemble instrumental. Dans chacun de ses trois mouvements, des groupes d’instruments se voient attribuer divers motifs mélodiques qu’ils présentent, développent et recombinent en dialogue les uns avec les autres. La trame étant relativement dépouillée plutôt que dense, les timbres distinctifs des instruments – ainsi que l’art consommé des musiciens et des musiciennes de l'orchestre – sont mis en lumière.
L'énergique premier mouvement présente un aspect grandiose, cérémoniel, avec ses fanfares de trompettes et les roulements de la caisse claire. Il progresse tout d’abord en mettant individuellement en valeur, tour à tour, trois sections principales de l'orchestre et leurs motifs respectifs – les cordes, puis les bois qui dialoguent et, plus tard, les cuivres qui émettent des énoncés audacieux. Dans l’intervalle, on trouve des épisodes de contrepoint ludique. À mesure que les motifs se déploient, les sections se combinent progressivement, augmentant l'intensité et le volume du son pour culminer dans un cri final endiablé.
Le deuxième mouvement est une tendre sérénade, avec une mélodie lyrique dont les phrases se transmettent d’un instrument à l’autre. Les tintements cristallins du triangle évoquent une atmosphère nocturne et onirique. Dans la section médiane, les cordes introduisent un motif envoûtant, semblable à un chant, qu’elles portent à un sommet passionné. Ensuite, la sérénade revient, le triangle prenant de plus en plus de place avant de s’éteindre avec la flûte à la fin.
Enjoué et ponctué de touches humoristiques, la finale comporte un air sautillant, un motif excentrique de notes alternées, et une phrase majestueuse de notes soutenues répétées sur un trémolo vigoureux. Un point culminant quelque peu angoissant est atteint et freine l’orchestre dans son élan, pour céder la place à une cadence de clarinette solo. Cependant, les violons ne tardent pas à interrompre la rhapsodie de la clarinette en reprenant l’air fugace du début, aboutissant à une audacieuse conclusion sur le motif des notes alternées.
I. Allegro assai
II. Andantino
III. Allegro
En mars 1778, Mozart se rend à Paris, alors l’une des capitales de la musique orchestrale, où l’art de la symphonie est en voie d’acquérir ses lettres de noblesse grâce à l’apparition des concerts publics. Bien qu’il n’ait pas une haute opinion des Parisiens qui (selon lui) le snobent, son père lui a fortement suggéré de s’y rendre pour tâcher d’étendre sa renommée en tant que compositeur. Peu après son arrivée, il reçoit une commande du Concert Spirituel, une prestigieuse série de concerts.
La nouvelle symphonie ouvre le concert du 18 juin 1778 au Palais des Tuileries. Brillante et assurée, l'œuvre est clairement conçue pour tirer le meilleur parti des ressources musicales dont Mozart dispose. D’une part, c’est le plus grand ensemble pour lequel il a écrit à ce jour, et d’autre part, c’est la première fois qu'il introduit des clarinettes. Il est certainement enthousiaste à la perspective de les utiliser; quelques mois plus tôt, il a vu le célèbre orchestre de Mannheim (dont s’inspire l’ensemble Spirituel) et a été impressionné par ses innovations en matière de couleur orchestrale et d'instrumentation, en particulier par l'inclusion de clarinettes parmi les instruments à vent. À l’issue d’un concert, il écrit à son père : « Vous ne pouvez imaginer l’effet grandiose d’une symphonie avec des flûtes, des hautbois et des clarinettes. »
Mozart est également conscient de l’amour des Parisiens pour les effets dramatiques dans les symphonies, et il se plie volontiers à leurs goûts. L’un de ces effets est le premier coup d'archet, qui consiste en de puissants accords soutenus suivis d’une gamme ascendante précipitée, apparaissant généralement au début du morceau. Mozart est ambivalent quant à l’utilisation de ce trait distinctif de l’orchestre parisien (« J'ai pris soin de ne pas le négliger », écrit-il à son père, « et c'est bien suffisant »); cependant, non seulement l’utilise-t-il dans le premier mouvement, mais l’usage qu’il en fait va au-delà du simple effet sonore. Après sa première exposition, il s’intègre comme un repère essentiel – écoutez-le réapparaître tout au long du mouvement, jusqu’à son énoncé final de caractère enjoué.
Dans le deuxième mouvement, le son chaleureux de la section des cordes est mis de l’avant, enrichi par les hautbois, les bassons et les cors. Ce mouvement offre un caractère détendu et pastoral, avec le sifflement d'une flûte seule qui double les violons dans les aigus. Mozart, qui aime particulièrement ce mouvement, écrit que « l'andante reçoit les plus grands applaudissements de ma part, et de celle de tous les experts et connaisseurs... car il est naturel et bref ».
Au début du finale, Mozart réserve une surprise à son public parisien : au lieu du puissant énoncé auquel ce dernier se serait attendu, il commence par des phrases délicates aux violons sur fond d’aimable bavardage, suivies d’une explosion du tutti orchestral. Très satisfait du résultat, il rapporte à son père que « le public, à cause du début calme, a murmuré comme je m’y attendais, puis est venu le forte – eh bien, l’entendre et l’applaudir était une seule et même chose ». Dans un autre tournant inventif, le vigoureux second thème est présenté comme le sujet d’une fugue, laquelle est ensuite développée plus longuement et plus sérieusement au milieu du mouvement. Après le retour du bavardage initial, la musique, contournant entièrement le second thème, s’élance vers sa jubilatoire conclusion.
I. Allegro non troppo e molto maestoso – Allegro con spirito
II. Andantino semplice – Prestissimo
III. Allegro con fuoco
« Sans valeur et injouable. » « Des passages si fragmentés, si maladroits, si mal écrits qu’ils sont irrécupérables. » « L’œuvre elle-même est mauvaise, vulgaire [...] seules deux ou trois pages mériteraient d'être conservées; le reste doit être jeté ou entièrement réécrit. » C’est en ces termes que Tchaïkovsky signale, dans une lettre à sa mécène Nadejda von Meck, les impressions initiales de Nikolaï Rubinstein sur son Premier concerto pour piano. Le compositeur espérait que Rubinstein allait interpréter l’œuvre et la lui avait apportée pour obtenir son avis sur la partie solo. Rubinstein a répondu sèchement qu’il ne la jouerait que si le compositeur la remaniait de façon substantielle. Profondément offensé, Tchaïkovsky déclare qu’il n’en changera pas une seule note et en offre plutôt la création à Hans von Bülow, qui la donne à Boston le 24 octobre 1875 à la faveur d’une de ses tournées. Bien que les critiques se montrent d’abord sceptiques à l’égard de la pièce, celle-ci remporte un énorme succès auprès du public.
Cette œuvre est toujours aussi appréciée et populaire dans les salles de concert de nos jours. (En dépit du rejet initial, Rubinstein s’est laissé séduire peu à peu par le concerto, au point même de le diriger et de l’interpréter lui-même comme soliste; Tchaïkovsky y a finalement apporté quelques révisions.) Comparativement aux concertos écrits plus tôt au XIXe siècle, celui-ci est d’une ampleur inédite, le piano et l’orchestre occupant des rôles égaux dans le déroulement du drame. La partie de piano exige énormément du soliste, qui doit faire montre non seulement d’une exceptionnelle virtuosité – passages en double octave, courses vives, cadences rhapsodiques et autres – mais aussi d’une profonde expressivité. L’ample partie orchestrale est d’une envergure et d’une complexité toute symphonique, présentant et développant le matériau musical dans un dialogue intense avec le pianiste.
L’attrait émotionnel de ce concerto doit beaucoup aux mélodies inoubliables de Tchaïkovsky. Après un austère appel de cor, il s’ouvre sur une mélodie enlevée exécutée par les violons et les violoncelles, accompagnée d’accords majestueux au piano. Bien que cet air n’apparaisse que dans l’introduction de l’œuvre, certains de ses aspects sont subtilement intégrés dans les motifs ultérieurs. En outre, son caractère passionné le relie aux thèmes lyriques des autres mouvements du concerto.
Plusieurs mélodies basées sur des airs populaires offrent un contraste saisissant. Le bouillonnant thème principal du premier mouvement se fonde sur une chanson de rue accompagnée à la vielle à roue que Tchaïkovsky avait entendue en Ukraine. Dans le deuxième mouvement, après la tendre berceuse, la pétillante section médiane met en scène l’orchestre jouant un air populaire français, « Il faut s’amuser, danser et rire », que Modeste, le frère de Tchaïkovsky, se souvenait avoir souvent chanté avec ses frères au début des années 1870. Le fougueux premier thème du troisième mouvement est une chanson printanière ukrainienne, tandis que le second thème est emprunté à l’air folklorique russe « Je vais à Tsar-Gorod ». C’est cette ample mélodie qui, après la pyrotechnie pianistique de la cadence, constitue le superbe point culminant du mouvement. Ensemble, l’orchestre et le piano l’exposent dans toute sa gloire – bouclant ainsi le grand arc lyrique introduit au début du concerto – après quoi ils s’élancent vers une éblouissante conclusion.
Dinuk Wijeratne (né en 1978), Canadien d’origine srilankaise, est un chef d’orchestre et pianiste primé, lauréat d’un prix JUNO, « créateur exubérant » (New York Times) et « artiste préfigurant notre avenir culturel » (Toronto Star). Transcendant les frontières dans ses projets collaboratifs, il est aussi à l’aise avec les orchestres symphoniques et les quatuors à cordes qu’avec les joueurs de tabla et les DJ; sur la scène internationale, on a pu le voir dans des cadres aussi différents que la scène de l’Orchestre philharmonique de Berlin et le Festival de jazz de la mer du Nord.
Wijeratne s’est produit à Carnegie Hall, au Kennedy Center (Washington DC), à l’Opéra Bastille (Paris), au Lincoln Center (New York), au Teatro Colón (Buenos Aires), mais aussi au Sri Lanka, au Japon et partout au Moyen-Orient. Il a tenu la vedette dans What Would Beethoven Do?, un documentaire traitant de l’innovation en musique classique, aux côtés d’Eric Whitacre, Bobby McFerrin et Benjamin Zander. Il a composé pour presque tous les artistes et ensembles avec lesquels il a partagé la scène, notamment Yo-Yo Ma & the Silk Road Ensemble, Suzie LeBlanc, Kinan Azmeh, James Ehnes, Joseph Petric, David Jalbert, Zakir Hussain, Sandeep Das, Tim Garland, Ed Thigpen, Ramesh Misra, Eric Vloeimans, le trio Gryphon, TorQ Percussion, les quatuors à cordes Afiara, Danel et Cecilia, l’Orchestre philharmonique de KwaZulu-Natal (Afrique du Sud), et les orchestres symphoniques de l’Illinois, de Toronto, Vancouver, Calgary, Halifax, Winnipeg, Fresno et Buffalo.
Titulaire d’un doctorat de l’Université de Toronto, Wijeratne a également étudié à l’École Juilliard, au Collège Mannes (É.-U.) et au Royal Northern College of Music (R.-U.). Sa musique et ses projets collaboratifs sont le reflet de la diversité de ses influences et origines internationales.
Qualifié de « phénomène » par le Los Angeles Times et classé parmi les « meilleurs pianistes de sa génération » par le Philadelphia Inquirer, Stewart Goodyear est un pianiste de concert, improvisateur et compositeur accompli. Musicien très présent sur la scène internationale, il a reçu de nombreuses commandes des orchestres et ensembles de musique de chambre les plus prestigieux du monde.
L’an passé, il a publié sous l’étiquette Orchid Classics une suite pour piano et orchestre intitulée Callaloo, et une sonate pour piano. Parmi ses récentes commandes, notons : un quintette pour piano pour le quatuor à cordes Penderecki et une œuvre pour piano pour le concours international de piano Esther Honens.
Sa discographie comprend l’intégrale des sonates et concertos pour piano de Beethoven, ainsi que des concertos de Tchaïkovsky, Grieg et Rachmaninov, un album regroupant des œuvres pour piano seul de Ravel, et un album intitulé For Glenn Gould dans lequel il reprend le répertoire avec lequel Glenn Gould a fait ses débuts en concert aux États-Unis et à Montréal. En 2015, son propre arrangement pour piano du Casse-Noisette de Tchaïkovsky (intégrale du ballet) est reconnu par le New York Times comme l’un des meilleurs albums de musique classique de l’année. Ses albums paraissent sous les étiquettes Marquis Classics, Orchid Classics, Bright Shiny Things, Steinway and Sons, et Naxos.
L’été dernier, il s’est produit avec l’Orchestre Chineke! au Southbank Centre (Royaume-Uni), au Festival de musique du Schleswig-Holstein, au Festival de musique de Grant Park, et au Festival Mostly Mozart (New York). Il a également joué avec le Chineke! au CNA, en mars 2023. Ses engagements pour la saison 2023-2024 comprennent un premier récital au Wigmore Hall, des débuts avec l’Orchestre symphonique de la Ville de Birmingham, ainsi que de nouvelles prestations avec l’Orchestre philharmonique de Buffalo et l’Orchestre symphonique de Milwaukee. Il fera également ses débuts au Carnegie Hall avec l’Orchestre du Conservatoire Royal de Musique de Toronto, sous la direction de Peter Oundjian.
L’Orchestre du Centre national des Arts (CNA) du Canada est reconnu pour la passion et la clarté de son jeu, ses programmes d’apprentissage et de médiation culturelle visionnaires et son soutien indéfectible à la créativité canadienne. Situé à Ottawa, la capitale nationale, il est devenu depuis sa fondation en 1969 l’un des ensembles les plus encensés et les plus dynamiques du pays. Sous la gouverne du directeur musical Alexander Shelley, l’Orchestre du CNA reflète le tissu social et les valeurs du Canada, nouant des liens avec des communautés de tout le pays grâce à sa programmation inclusive, ses récits puissants et ses partenariats innovants.
Alexander Shelley a façonné la vision artistique de l’Orchestre depuis qu’il en a pris les rênes en 2015, poursuivant sur la lancée de son prédécesseur, Pinchas Zukerman, qui a dirigé l’ensemble pendant 16 saisons. Le maestro Shelley jouit par ailleurs d’une belle renommée qui s’étend bien au-delà des murs du CNA, étant également premier chef d’orchestre associé de l’Orchestre philharmonique royal au Royaume-Uni ainsi que directeur artistique et musical d’Artis—Naples et de l’Orchestre philharmonique de Naples aux États-Unis. Au CNA, Alexander Shelley est épaulé dans son rôle de leader par le premier chef invité John Storgårds et par le premier chef des concerts jeunesse Daniel Bartholomew-Poyser. En 2024, l’Orchestre a ouvert un nouveau chapitre avec la nomination d’Henry Kennedy au nouveau poste de chef d’orchestre en résidence.
Au fil des ans, l’Orchestre a noué de nombreux partenariats avec des artistes de renom comme James Ehnes, Angela Hewitt, Renée Fleming, Hilary Hahn, Jeremy Dutcher, Jan Lisiecki, Ray Chen et Yeol Eum Son, assoyant ainsi sa réputation d’incontournable pour les talents du monde entier. L’ensemble se distingue à l’échelle internationale par son approche accessible, inclusive et collaborative, misant sur le langage universel de la musique pour communiquer des émotions profondes et nous faire vivre des expériences communes qui nous rapprochent.
Depuis sa fondation en 1969, l’Orchestre du CNA fait la part belle aux tournées nationales et internationales. Il a joué dans toutes les provinces et tous les territoires du Canada et a reçu de nombreuses invitations pour se produire à l’étranger. Avec ces tournées, l’ensemble braque les projecteurs sur les artistes et les compositeurs et compositrices du Canada, faisant retentir leur musique sur les scènes de l’Amérique du Nord, du Royaume-Uni, de l’Europe et de l’Asie.
Alliance internationale des employés de scène et de théâtre