Innocence Lost avec Beverley Cooper 2e partie

Allan Morgan, Fiona Reid © Luce Tremblay-Gaudette
Michael Spencer-Davis, Jane Wheeler, Jenny Young © Luce Tremblay-Gaudette

Entretien avec Beverley Cooper sur son drame percutant Innocence Lost, A Play about Steven Truscott.
2e partie

L’histoire Innocence Lost est racontée du point de vue d’un personnage fictif; celui de Sarah. Pourquoi avoir choisi cette approche?

J’ai d’abord pensé en faire un drame judiciaire, mais je me suis rendu compte que l’histoire ne pouvait être ainsi limitée. J’ai par la suite envisagé d’introduire Steven Turcott comme personnage principal, mais l’idée de mettre des mots dans la bouche de cet homme, de lui faire raconter « ce qu’il s’était vraiment passé », me paraissait arrogante, un affront. J’ai donc changé de perspective. J’étais fascinée par les enfants qui ont vécu de près ou de loin cette affaire et dont nombreux ont dû témoigner. J’ai donc décidé de créer un personnage fictif, une camarade de classe de Steven et de Lynne, et j’ai tenté d’imaginer l’histoire de son point de vue. Cette approche m’a permis d’explorer le sujet avec une plus grande liberté et d’adopter un plan émotionnel du début à la fin de l’histoire.

Que représente Sarah?

Je crois que si je devais analyser Sarah, j’en conclurais qu’elle nous représente tous, en tant que spectateurs. Au fur et à mesure que l’histoire progresse, nous pouvons nous mettre à sa place. Cela dit, en élaborant son personnage, j’avais en tête une jeune élève qui venait de perdre une camarade de classe de façon épouvantable, tandis qu’un autre de ses camarades avait presque été pendu à l’âge de quatorze ans. Elle n’avait pu dépendre des figures d’autorité dans sa vie.

La journaliste indépendante Isabel LeBourdais faisait également partie intégrante d’Innocence Lost. Son œuvre The Trial of Steven Truscott est devenue un succès instantané au Canada en 1966.

Isabel LeBourdais était une femme remarquable. Plaidant inlassablement l’innocence de Steven Truscott, elle a tenu tête à la Police provinciale de l’Ontario, à l’armée, au système juridique, au monde de l’édition et à l’establishment, qui faisait obstacle à ses moindres démarches. Rares sont les femmes qui, en 1966, auraient marché sur les traces de cette pionnière.

Le journaliste Julian Sher a également proclamé l’innocence de Steven Truscott. Son documentaire, diffusé à l’émission The Fifth Estate en 2000 sur le réseau CBC, ainsi que son livre intitulé Until You Are Dead, publié l’année suivante, rassemblaient des preuves qui ont contribué à l’acquittement de Steven Truscott. Quelle importance attachez-vous à ces sources?

La plus haute importance. Le documentaire diffusé à l’émission The Fifth Estate est exceptionnel – le film est toujours disponible sur le site Web du réseau CBC. Et le livre de Julian Sher est d’autant plus excellent qu’il constitue l’ouvrage le plus complet sur l’affaire. Ceci étant, j’ai voulu effectuer mes propres recherches et mettre sur pied une version bien à moi de l’histoire. J’ai donc parcouru la route du comté à pied, je me suis arrêtée sur le pont et j’ai tenté de recréer le drame de 1959, un instant à la fois.

Qu’espérez-vous inculquer dans l’esprit des auditoires de Montréal et d’Ottawa avec la pièce Innocence Lost?

J’espère qu’ils seront divertis par la pièce et qu’elle soulèvera chez eux d’importantes questions. J’espère qu’ils en apprendront davantage sur cette période tragique de l’histoire canadienne, mais j’espère aussi qu’ils étudieront nos collectivités et notre système judiciaire d’un nouvel œil. J’espère qu’ils sauront les remettre en question, si besoin est, et défendre une cause juste lorsqu’elle se présente à eux. Mais voilà un défi de taille.   

Suzanne Shugar est une journaliste et une communicatrice de Montréal, ainsi que rédactrice Web et chargée des relations publiques au Centaur Theatre. Cet entretien est diffusé avec l’autorisation du Centaur Theatre.

 


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