Par Gerald Morris
L’Alberta Ballet fait sensation, depuis quelques années, en créant des ballets contemporains basés sur les succès et la carrière d’auteurs-compositeurs célèbres : The Fiddle and The Drum (Joni Mitchell, 2007), Fumbling Towards Ecstacy (Sarah McLachlan, 2011) et Balletlujah! (k.d. lang, 2013). Mais la plus fastueuse, la plus glamour, la plus divertissante de ces productions est sans contredit Love Lies Bleeding (2010), mettant à l’honneur l’un des tandems auteur/compositeur les plus marquants du 20e siècle : la légendaire superstar du glam-rock britannique Elton John et le brillant parolier Bernie Taupin. Depuis 1967, les deux hommes ont créé ensemble plus de trente albums. En quarante ans de carrière, Elton John a vendu plus de 250 millions de disques, ce qui en fait l’un des artistes les plus populaires de tous les temps.
Love Lies Bleeding est à la démesure de ce personnage plus grand que nature : un spectacle dédié à la carrière d’Elton John, noblesse oblige, ne pouvait qu’être extravagant et sans limites. Le ballet regroupe quatorze des plus grands succès d’Elton John et Bernie Taupin* – donnant chacun lieu à un extravagant numéro de production avec d’éblouissants costumes, des effets de lumières sidérants et de saisissantes projections en toile de fond. Les 30 danseurs de l’Alberta Ballet n’ont jamais eu plus fière allure.
Janet Smith écrit dans straight.com (14 octobre 2011) : « Love Lies Bleeding est incontestablement explosif (...) un spectacle comme une gigantesque boule à facettes – mais le faste n’est pas tout. C’est aussi un audacieux rêve brûlant qui transcende les genres. Des voyous sensuels coiffés de chapeaux melons, des combinaisons luisantes et moulantes en vinyle, et des braguettes criardes en cuir clouté vacillent et tourbillonnent. Des hommes et femmes canons bondissent à travers une scène plongée dans l’obscurité, devant une mer d’étoiles scintillantes, des lampes rouges accrochées aux membres. Il y a aussi des anges mâles aux ailes métalliques, des drag-queens de plus de six pieds juchées sur des talons de sept pouces, et des Marie-Antoinette drapées dans des jupes à volants dorées et coiffées de perruques assorties en forme de cœurs. S’il y a une autre vedette [mis à part Yukichi Hattori qui incarne l’admirateur d’Elton, personnage principal du ballet], ce titre revient aux costumes extravagants de Martine Bertrand, créant pour chaque numéro un nouvel univers déjanté. On aurait mauvaise grâce à bouder cette brève et amusante excursion au royaume du glamour et du rêve, offrant une vision attrayante de la culture gay qui titille les sens. » Michael Crabb a évoqué dans The Toronto Star « le tumulte et la promiscuité d’un univers pop-rock déjanté, où tous les excès sont de rigueur et la vie ne tient qu’à la prochaine ligne de coke sniffée sur la table d’une loge. »
Love Lies Bleeding relate une vie de procès, de sacrifices et de tribulations diverses pour atteindre à la célébrité et pour y survivre ensuite. Une histoire inoubliable de rock ‘n’ roll, de drames et de passion qui voit un jeune homme insolemment doué, Reginald Kenneth Dwight, se métamorphoser en Sir Elton Hercules John et se lancer à l’assaut d’une gloire planétaire, luttant contre l’homophobie et combattant la tentation des drogues avant de trouver enfin le grand amour. Le directeur artistique de l’Alberta Ballet, Jean Grand-Maître, chorégraphe des cérémonies d’ouverture des Jeux olympiques de Vancouver 2010, a consulté abondamment Sir Elton John pour s’assurer d’adopter le ton juste et de traiter tous les thèmes importants – sans censure. Bien que les effets visuels soient magnifiquement théâtraux – plus près de Broadway que du ballet – Love Lies Bleeding ne craint pas d’aborder les tentations sulfureuses et les aspects plus sombres de la musique pop. Les styles musicaux vont du jazz le plus évocateur au rock ‘n roll le plus endiablé en passant par les ballades mélancoliques, et la chorégraphie est un mélange spectaculaire et accessible de ballet, de jazz, de hip-hop et de comédie musicale – une danse pleine de rebondissements. Jean Grand-Maître a aussi superposé à l’ensemble des pas de ballet virtuoses, particulièrement pour les hommes.
« Je suis fier de ce qu’a créé l’Alberta Ballet », a déclaré Sir Elton; « voilà une chorégraphie forte et contemporaine qui divertit et stimule tout à la fois les nouveaux auditoires par son esthétique nouvelle et sa saisissante fusion des modes d’expression artistique. »
La joie sans mélange et l’exubérance de la musique pop-rock s’allie à l’agilité stupéfiante du ballet dans l’étincelant Love Lies Bleeding, un spectacle formidablement divertissant qui retrace la vie rock ‘n roll d’Elton John. Deux soirs seulement à la salle Southam (les 19 et 20 avril). Courez vous procurer des billets, car Love Lies Bleeding fait salle comble partout, soulevant l’enthousiasme des foules à la manière des concerts rock les plus endiablés.
*Les chansons regroupées dans Love Lies Bleeding sont « Bennie and the Jets », « I’m Going to be a Teenage Idol », « Honky Cat », « Goodbye Yellow Brick Road », « Rocket Man », « Madman Across the Water », « Have Mercy on the Criminal », « Sixty Years On », « I Need You to Turn to », « The King Must Die », « Someone Saved My Life Tonight », « Believe », « The Bridge » et « Saturday Night’s All Right for Fighting ».