Orchestre du CNA

2020-01-29 20:00 2020-01-30 22:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : Oundjian dirige Dvořák

https://nac-cna.ca/fr/event/21698

Le bien-aimé chef émérite de l’Orchestre symphonique de Toronto (TSO), Peter Oundjian, revient diriger l’Orchestre du CNA à la Salle Southam pour la première fois en plus de vingt ans. Chaque prestation de Bryan Cheng, violoncelliste né à Ottawa, témoigne du lien profond qui unit une nouvelle génération de superbes interprètes aux grands compositeurs des cinq derniers siècles. À 18 ans, il a...

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Salle Southam ,1 rue Elgin,Ottawa,Canada
29 - 30 jan 2020
29 - 30 jan 2020

≈ 2 heures · Avec entracte

Dernière mise à jour: 17 janvier 2020

Réflexion

Ayant grandi en Angleterre, mes oreilles ont naturellement été imprégnées de musique britannique lorsque j’étais écolier : Vaughan Williams, Britten et Elgar en particulier. Le Concerto pour violoncelle d’Elgar se situe dans une classe à part. Magnifiée par les irrésistibles interprétations, à l’époque, de Jacqueline du Pré, qui a grandi à quelques rues de chez moi dans la petite ville de Purley, l’œuvre représente un moment-charnière de l’histoire de l’Angleterre et de la musique anglaise. Écrite dans le contexte dévastateur de la Première Guerre mondiale, elle évoque à chaque note, de façon saisissante, ce qu’était la vie en ces temps tragiques, et un profond besoin de guérison spirituelle. On y entend Elgar au sommet de son art, et l’œuvre restera à jamais l’un des sommets absolus du répertoire musical.

Après avoir quitté l’Angleterre, j’ai eu la chance d’entendre du Pré en trio à plusieurs occasions aux côtés d’un jeune phénomène du nom de Pinchas Zukerman. En fait, c’est lui qui, alors qu’il n’avait que 26 ans, après avoir donné une classe de maître à Brighton, a convaincu mon père de m’envoyer étudier à New York. Il lui a promis de m’aider à m’épanouir et il a tenu sa promesse au centuple. Je ne pourrai jamais assez l’en remercier, mais au moins, je peux partager cette histoire avec vous!

Chef d'orchestre Peter Oundjian

Réflexion

Je garde un souvenir très vif d’un enregistrement du Concerto pour violoncelle d’Elgar joué par Jacqueline du Pré que j’ai entendu tout jeune et qui m’a littéralement subjugué, comme il avait envoûté le monde entier. Peut-être, inconsciemment, à cause de l’ombre gigantesque projetée par mon illustre devancière, je n’ai pas osé m’attaquer à cette œuvre avant l’âge de vingt ans. Fort heureusement, ça m’a donné le temps de comprendre que la clé pour appréhender ce formidable pilier du répertoire pour violoncelle est d’aborder chaque note comme faisant partie intégrante de l’architecture de ce monument musical.

La première fois que j’ai joué « l’Elgar » (ainsi que nous le surnommons entre violoncellistes) en public, j’étais complètement vidé à la fin – physiquement, émotionnellement et spirituellement. La seule façon de rendre pleinement justice à cette musique, comme interprète, est de s’investir corps et âme dans les notes pour leur donner vie; comme le disait mon ancien maître Yuli Turovsky, « jouez chaque concert comme s’il devait être le dernier ». J’espère que vous serez touchés par l’émotion brute de ce chef-d’œuvre aussi profondément que je l’ai été à ma première écoute.

Violoncelle Bryan Cheng

L'Orchestre du CNA interprète la pièce Within Her Arms d’Anna Clyne pour la première fois.

La première prestation du Concerto pour violoncelle d’Elgar livrée par l’Orchestre du CNA, en 1973, a eu lieu sous la baguette de Mario Bernardi avec la soliste Zara Nelsova. Pour la plus récente interprétation du concerto, donnée en 2015, Alexander Shelley dirigeait l’ensemble et Johannes Moser était violoncelle solo.

En 1980, Mario Bernardi a dirigé l’Orchestre du CNA dans sa première prestation de la Symphonie no 6 de Dvořák. En 2016, Nikolaj Znaider était à la tête de l’ensemble pour sa plus récente interprétation de l’œuvre.

Répertoire

ANNA CLYNE

Within Her Arms

Née à Londres, le 9 mars 1980

Née à Londres, Anna Clyne est une compositrice de musique acoustique et électroacoustique finaliste aux GRAMMY. Dépeinte comme « une compositrice aux talents hors du commun et aux méthodes inusitées » dans un portrait publié par le New York Times, et saluée dans Time Out New York pour son « éblouissante inventivité », elle collabore fréquemment avec des chorégraphes, des artistes visuels, des cinéastes et des musiciens d’avant-garde.

L’automne dernier, l’Orchestre de chambre écossais et Pekka Kuusisto ont créé sa pièce Sound and Fury à Édimbourg. Parmi les plus récentes créations de Clyne, mentionnons aussi son concerto pour violoncelle intitulé DANCE, inspiré des enseignements de Rûmî et créé par Inbal Segev au festival de musique contemporaine Cabrillo 2019 sous la baguette de Cristian Măcelaru; et Snake and Ladder, une œuvre pour saxophone et instruments électroniques créée par Jess Gillam au festival de musique de Cheltenham 2019. En juillet 2019, elle a écrit des morceaux et arrangé la musique de l’album Marble Index de Nico pour The Nico Project, une œuvre théâtrale présentée par le Festival international de Manchester.

Anna Clyne a œuvré comme compositrice en résidence pour les orchestres symphoniques de Chicago, Baltimore et Berkeley, et pour l’Orchestre national d’Île-de-France. Pour toute la saison 2020–2021, elle est compositrice associée auprès de l’Orchestre de chambre écossais, qui lui a commandé une série d’œuvres répartie sur trois ans. Sa musique est publiée en exclusivité par Boosey & Hawkes.

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Within Her Arms

Œuvre pour ensemble de cordes, Within Her Arms a été créée par l’Orchestre philharmonique de Los Angeles sous la direction d’Esa-Pekka Salonen en 2009.

Voici ce qu’en dit la compositrice :

Within Her Arms est une musique dédiée à ma mère, avec tout mon amour.

La terre te tiendra serrée dans ses bras, toi que j’aime—

Pour que demain tu sois changée en fleurs—

Cette fleur qui sourit en silence dans ce pré du matin—

Ce matin tu ne pleureras plus, toi que j’aime—

Car nous avons franchi une nuit trop profonde.

Ce matin, oui, ce matin je m’agenouille dans l’herbe tendre—

Et je remarque ta présence.

Fleurs qui me parlent en silence.

Le message d’amour et de compréhension s’est bel et bien rendu.

—Thich Nhat Hanh
(traduction française : Pascale Cormier)

Reproduit avec l’aimable autorisation de Boosey & Hawkes.

EDWARD ELGAR

Concerto pour violoncelle en mi mineur, op. 85

Broadheath, près de Worcester, 2 juin 1857
Worcester, 23 février 1934

Concerto pour violoncelle en mi mineur, op. 85

Achevé à l’été 1919, le Concerto pour violoncelle d’Elgar est la dernière œuvre majeure du compositeur. Ce dernier vécut encore 15 ans, mais ne sembla plus trouver l’inspiration de créer après le décès, en 1920, de sa femme qui l’avait tant soutenu, autant dans sa vie professionnelle que personnelle. Sans elle, il se sentait découragé, perdu et plus que jamais mélancolique. En effet, toute sa vie durant, Elgar vécut des épisodes de désespoir, de désillusion, affligé qu’il était d’un complexe d’infériorité – le manque de reconnaissance sociale, la crainte de voir sa musique rester dans l’ombre et tout particulièrement la Grande Guerre nourrirent en lui cette morosité. Dans son Concerto pour violoncelle, il affiche son côté le plus personnel et cette résignation que l’on retrouve chez ceux qui parviennent à l’automne de la vie. Le ton mélancolique et poignant du violoncelle paraît amplifier ces inclinations, accentuées par la retenue du compositeur dans l’utilisation de l’orchestre.

Bien que la première de l’œuvre n’ait pas rencontré un grand succès, le concerto est rapidement devenu la coqueluche des violoncellistes et des publics de partout, et demeure l’une des compositions d’Elgar les plus connues. La création eut lieu le 26 octobre 1919 au Queen’s Hall de Londres; Felix Salmond était soliste et Elgar lui-même dirigeait l’Orchestre symphonique de Londres. Le grand altiste anglais Lionel Tertis (1876–1975) fit une transcription du concerto pour son instrument dix ans plus tard (à l’époque, le répertoire pour altiste solo laissait à désirer).

Le concerto possède quatre mouvements très différents, chacun mettant en lumière des éléments du style inimitable d’Elgar. L’adagio s’ouvre sur un sombre et émouvant passage dans lequel le soliste fait simultanément vibrer les quatre cordes de son instrument. Les altos reprennent alors le thème, qu’ils étirent tranquillement. Le musicologue Michael Kennedy écrit à ce propos : « On sent une lassitude dans cette musique rappelant les feux de bois et les feuilles qui tombent à l’automne. » Les vents lancent un deuxième thème plus radieux.

Vient ensuite le deuxième mouvement, après une pause minuscule. On le reconnaît à l’alternance qu’il présente entre des passages légers de type scherzo à l’écriture nerveuse, et un thème enjoué, plus dense, énoncé avec une habile orchestration. Donald Francis Tovey dit d’ailleurs de ce mouvement qu’il est « espiègle ».

Le troisième mouvement, un adagio, offre le plus saisissant contraste avec celui qui précède. D’une longueur de seulement 60 mesures, il compte néanmoins parmi les pages les plus sublimes d’Elgar. Kennedy le décrit ainsi : « Une lamentation trop profonde pour faire monter les larmes aux yeux, idéale pour le ton le plus soutenu du violoncelle et qui prend fin sur une cadence dominante, comme si la tonalité était trop positive. »

Le finale, de forme rondo, fait entendre un thème principal fanfaron et assuré qui alterne avec des épisodes contrastants. Dans un élan de nostalgie, Elgar ramène le thème aux accords brisés exposé au tout début de l’œuvre par le soliste, mais un ultime retour en force du thème du rondo balaie le souvenir du passé à grand renfort de fioritures.

– Traduit d’après Robert Markow

Antonín Dvořák

Symphonie no 6 en rénbsp;majeur, op.nbsp;60

Mühlhausen, Bohême (aujourd’hui Nelahozeves, République tchèque), 8 septembre 1841
Prague, 1er mai 1904

Dvořák ne fut assurément pas le premier compositeur tchèque à écrire des symphonies, mais il demeure certainement le plus important. Tout comme Beethoven, Spohr et Schubert avant lui, il en a écrit neuf. Sa Sixième, comme celle de Beethoven, dénote une affinité spéciale avec la nature par son esprit et son atmosphère, plutôt que par programme (il n’y a pas de sous-titres). D’autre part, plus d’un mélomane y trouve des ressemblances avec la Deuxième de Brahms, que Dvořák avait aimée dès qu’il l’avait entendue peu avant de composer sa Sixième. On retrouve en effet l’influence du maître allemand – qui, jusqu’à sa mort en 1897, resta l’ami dévoué de Dvořák – dans la tonalité en  majeur, les thèmes de caractère et de profil similaires, l’atmosphère pastorale dominante, l’éclat et l’enthousiasme joyeux qui illuminent la partition, le troisième mouvement rappelant une danse ainsi que la structure parallèle du premier mouvement des deux symphonies (même métrique, même brève incursion en mi mineur juste après l’ouverture).

C’est dans la grande amitié qui unissait Dvořák et le chef d’orchestre Hans Richter qu’il faut chercher l’impulsion de cette œuvre. Après avoir connu un grand succès en dirigeant la première viennoise de la troisième Rhapsodie slave de Dvořák, le chef d’orchestre demanda au compositeur d’écrire une symphonie qu’il pourrait créer. Dvořák composa la partition avec une célérité remarquable : en un mois, les esquisses étaient terminées et, un mois plus tard, la partition complète était achevée, si bien qu’en octobre 1880, la symphonie était prête. Richter n’en donna toutefois pas la première exécution. Les intrigues du monde de la musique ont voulu que ce soit Adolf Čech qui dirige la création de l’œuvre à Prague, le 25 mars 1881. La première nord-américaine suivit de près, moins de deux ans plus tard; Theodore Thomas était alors à la barre de la Société philharmonique à l’Académie de musique de New York. La symphonie fut publiée par Simrock – qui était aussi l’éditeur de Brahms – sous le numéro d’opus 1, qu’elle conserva pendant de nombreuses années, soit jusqu’à ce que le cycle complet des neuf symphonies soit publié et la numérotation, revue.

Dvořák a écrit la Sixième en plein cœur de sa période « slave », au cours de laquelle il composa la première série des Danses slaves, les trois Rhapsodies et la Suite tchèque. La musique s’inspire de la terre slave et de ses habitants, auxquels le compositeur se sentait très attaché. Dvořák ne cite pas véritablement de mélodies populaires, mais les rythmes, l’esprit, les formes mélodiques, les mélanges de tonalités de majeure et de mineure, les irrégularités métriques et certains détails de la partition contribuent à créer une sonorité et une atmosphère typiquement tchèques. Otakar Šourek rappelle l’influence du peuple tchèque et de son pays sur les deux premiers mouvements de la symphonie :

Le premier mouvement « semble évoquer la campagne tchèque ensoleillée, où tout dans la nature fleurit, chante et répand le doux parfum du bonheur et de la satisfaction. Les thèmes lyriques et mélodieusement expressifs, la vitalité rythmique, la pureté et la gaieté des couleurs harmoniques, l’animation que créent les passages en imitation et l’alternance vive des atmosphères, passant des chuchotements les plus doux aux paroxysmes les plus exubérants, illustrent clairement la vie et les sentiments du peuple tchèque. »

« Le deuxième mouvement a les traits d’un doux et ardent nocturne et d’un intermezzo passionné. Son atmosphère évoque la magie poétique d’une chaude soirée d’été et peut-être le dialogue de deux âmes simples partageant de doux moments d’intimité, tandis que leur cœur déborde de passion et de bonheur et qu’au loin résonnent les échos d’une musique de réjouissances villageoises. »

Le troisième mouvement semble s’inspirer des Danses slaves. C’est un furiant, la danse nationale endiablée et tourbillonnante dont la figure rythmique et caractéristique est une alternance des temps (trois fois deux temps, puis deux fois trois temps). La section en trio rappelle la sousedská, autre danse nationale plus lente, dans laquelle le piccolo intervient pour la seule fois de la symphonie, créant un effet campagnard et humoristique.

Le finale contient pas moins de quatre thèmes différents, tous intégrés dans une ample structure de forme sonate très bien proportionnée. Il ne perd jamais son élan, contrairement à ce qui se passe dans beaucoup d’autres symphonies du XIXe siècle. L’énergie joyeuse, exubérante et rythmée de la musique porte irrésistiblement la symphonie vers sa glorieuse conclusion.

– Traduit d’après Robert Markow

Artistes

  • Chef d'orchestre Peter Oundjian
  • Violoncelle Bryan Cheng
  • Orchestre du Centre national des Arts
  • Compositrice Anna Clyne

Alliance internationale des employés de scène et de théâtre