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Dernière mise à jour: 23 avril 2019
Je me souviens avec plaisir d’une discussion avec mon ami Miloš Karadaglić, notre soliste de ce soir : un jour, après un concert, un verre de vin à la main, nous avons contemplé l’idée de commander à l’extraordinaire Howard Shore un concerto pour guitare pour Miloš et l’Orchestre du CNA. Ne sachant pas le moins du monde si cette proposition inspirerait le grand compositeur, nous l’avons simplement contacté et lui avons fait part de notre projet, sans attentes particulières…
Et nous voilà ici ce soir! Quel bonheur de pouvoir exécuter ce concerto en première mondiale à Ottawa cette semaine! Howard Shore est une véritable légende canadienne de la musique, lauréat de trois prix Oscars, de trois Golden Globes et de quatre prix GRAMMY®. Je suis vraiment honoré et fier de partager avec vous sa plus récente création.
Howard Shore est un gentleman et un maître à part entière. Je suis fasciné depuis de nombreuses années par l’inventivité renversante de ses musiques de films et de ses compositions classiques. J’ai encore du mal à croire qu’il a écrit cette pièce pour moi… je suis sûrement le « pinceur de cordes » le plus chanceux du monde!
L’œuvre est magique, tout comme la forêt enchantée qu’Howard a voulu peindre avec son incomparable palette musicale. La première fois que j’ai entendu cette composition, j’ai été ému par la simplicité sans fard de ses harmonies, l’écriture idiomatique et la nature programmatique saisissante de la musique, évoquant irrésistiblement couleurs et scènes qui viennent instantanément à l’esprit. J’ai été frappé par sa manière magistrale d’intégrer discrètement à la texture du son qu’il produit, parmi tant de nuances musicales, une trame faisant écho à divers aspects de mon pays natal. Le Monténégro et ses sombres forêts ont été une source d’inspiration pour Howard et pour moi dès le départ. Je comptais les jours jusqu’à ce que ce merveilleux rêve que nous partagions devienne réalité.
C’est la première fois que l’Orchestre du CNA interprète l’Ouverture en do majeur de Fanny Mendelssohn-Hensel.
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Commandé par Alexander Shelley et l’Orchestre du CNA et écrit à l’intention du guitariste classique Miloš Karadaglić, le concerto du compositeur canadien Howard Shore The Forest est présenté en première mondiale.
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Günther Herbig était au pupitre pour la première interprétation de la Symphonie no 1 de Brahms par l’Orchestre du CNA en 1982. Sa dernière prestation a eu lieu en 2015 sous la direction de Pinchas Zukerman.
Hambourg, 14 novembre 1805
Berlin, 17 mai 1847
Comme son frère cadet Félix, Fanny Mendelssohn-Hensel était à la fois une pianiste accomplie et une brillante compositrice. Bien que ses dons pour la composition ne puissent rivaliser avec ceux de son illustre frère, elle n’en demeure pas moins l’une des plus importantes compositrices du XIXe siècle; mais parce qu’elle était une femme, ses talents et ses habiletés n’ont pas reçu la reconnaissance à laquelle avaient droit ses homologues masculins. Félix lui-même la dissuadait de publier ses compositions, sous prétexte que la composition n’était pas une occupation convenable pour une jeune femme de bonne famille.
À dix-sept ans, Fanny s’éprend d’un peintre du nom de Wilhelm Hensel, mais la désapprobation des parents les sépare et fait obstacle à leur mariage, comme dans le cas de Robert Schumann et Clara Wieck. Ce n’est que six ans plus tard que le couple convole enfin en justes noces, alors même que Hensel est nommé conservateur d’une vaste collection d’œuvres d’art. Leur union est heureuse, mais Fanny s’éteint prématurément, succombant à une attaque d’apoplexie (on dirait aujourd’hui un AVC) à 41 ans. Félix en est si profondément affecté qu’il la suit dans la tombe six mois plus tard, emporté, au moins en partie, par le chagrin que lui avait causé la mort de sa sœur bien-aimée.
La production de Fanny Mendelssohn-Hensel est considérable et se concentre essentiellement sur les lieder, les pièces pour piano et la musique de chambre. L’ouverture au programme du concert de ce soir est son unique composition purement orchestrale (on lui doit aussi quelques œuvres chorales et vocales avec orchestre). Vraisemblablement écrite entre 1830 et 1832, elle n’a été publiée qu’en 1994 par la maison d’édition Furore à Kassel, en Allemagne.
Cette ouverture de dix minutes est construite sur le même modèle que la plupart des œuvres du genre composées par Schubert, Weber, Schumann ou Félix Mendelssohn; elle débute par une introduction lente (« moins un point de départ qu’un éveil », comme l’a souligné un commentateur); celle-ci mène à la section principale, Allegro di molto, qui épouse la forme sonate conventionnelle avec deux thèmes principaux (le premier, énergique, le second, gracieux et mélodieux, tous deux exposés par les violons), une section de développement, une reprise et une majestueuse coda.
— Traduit d’après Robert Markow
Toronto, 10 octobre 1946
Vit maintenant à New York
Howard Shore écrit ses œuvres chez lui, en pleine nature, près de la forêt. Sa musique porte la marque de cet environnement. Ici, The Forest évoque l’importance d’établir et d’entretenir une relation avec la nature. « Je vis dans un endroit où je suis constamment entouré de tout ce qui croît, fleurit et se fane », explique le compositeur. « Tout se transforme en permanence. Tout tend vers l’équilibre et l’harmonie. Je trouve inspirantes cette interconnexion et cette interdépendance. Je porte ces idées en moi, et elles sont souvent à l’origine de ce que j’exprime dans ma musique. Je vous invite à savourer la beauté de la guitare solo et de l’orchestre, la virtuosité de Miloš et l’art consommé du maestro Shelley. »
La plus récente œuvre de concert de M. Shore, commandée par le directeur musical de l’Orchestre du CNA, Alexander Shelley, et dont la création mondiale a lieu cette semaine, est un concerto écrit à l’intention du guitariste Miloš Karadaglić. « Tour à tour élégiaque, mélancolique, mélodieuse et virtuose, c’est une œuvre magnifique, dans la veine du Concierto de Aranjuez de Rodrigo », note Alexander Shelley.
Cette composition de 21 minutes s’articule en trois mouvements qui peuvent être enchaînés avec ou sans pauses, à la discrétion du chef d’orchestre. Quand on lui demande si son concerto offre quelques similitudes de style avec ses plus célèbres musiques de film, Howard Shore répond : « Non, mais j’y ai glissé quelques surprises, comme une allusion au Concierto de Aranjuez de Rodrigo, chéri par tant de mélomanes. »
À l’exemple des Wolfgang Korngold, Bernard Herrmann et Miklós Rózsa de jadis, Howard Shore compose aussi bien des œuvres de concert que de la musique de film. Les effets délectables et subtils qu’il obtient des percussions peuvent évoquer le regretté compositeur japonais Tōru Takemitsu, qui a également navigué avec succès, tout au long de sa carrière, entre les salles de concert et le grand écran.
Le film The Song of Names, réalisé par François Girard avec la musique de M. Shore et la participation du violoniste virtuose Ray Chen, prendra l’affiche cet automne.
* Commande du CNA, création mondiale le 1er mai 2019
— Traduit d’après Howard Shore
I. Un poco sostenuto – Allegro
II. Andante sostenuto
III. Un poco allegretto e grazioso
IV. Adagio – Più andante – Allegro non troppo ma con brio
Brahms (1833–1897) a commencé à ébaucher sa Première symphonie en 1855, à l’âge de 22 ans, mais ne l’a achevée qu’en 1876, à 43 ans, tant l’héritage des neuf symphonies de Beethoven lui paraissait prestigieux et intimidant. (« Vous ne savez pas ce que c’est que d’être poursuivi par ses pas », disait-il.) La Première de Brahms a reçu un accueil enthousiaste et, vers la fin d’un siècle dominé par des radicaux comme Franz Liszt et Richard Wagner, elle a constitué un coup d’éclat pour les mélomanes attachés aux formes anciennes. (Hans von Bülow est allé jusqu’à l’appeler « la Dixième ».) Cependant, malgré sa déférence envers les modèles classiques (notamment l’architecture en quatre mouvements), il s’agissait d’une œuvre profondément personnelle fondée sur une technique symphonique originale : la création d’une structure dense et unifiée par le développement intensif de courts motifs mélodiques et rythmiques germinaux. Arnold Schoenberg a inventé l’expression « variation développante » pour désigner cette pratique et a récusé les accusations d’académisme qui pesaient sur Brahms, le défendant comme le compositeur le plus progressiste de son époque.
La majestueuse introduction lente établit le ton sérieux, voire tragique, du premier mouvement, et l’Allegro qui suit, avec son élan rythmique beethovénien, a le caractère d’un scherzo sombre et angoissé (les tonalités mineures sont inhabituellement proéminentes). Ensuite vient le mouvement lent, comme le soleil après la tempête; plusieurs thèmes s’y succèdent, si bien que la musique se déploie comme un seul flot de mélodies, devenant de plus en plus intense et passionnée pour finalement atteindre un véritable pathos. Pour le troisième mouvement, au lieu d’un menuet ou d’un scherzo, Brahms a écrit l’une de ces pastorales douces et lumineuses qui allaient devenir sa marque de fabrique, tout en conservant la forme conventionnelle du menuet et du trio à trois voix (ABA).
Dans l’introduction lente du finale, un thème majestueux au cor (semblable à l’appel d’un berger des Alpes) et une mélodie de type choral aux cuivres semblent appeler une résolution; l’Allegro qui suit commence par une mélodie émouvante, apparentée à un hymne (aux cordes), qui évoque « l’Ode à la joie » de la Neuvième de Beethoven. (Lorsque quelqu’un l’a fait remarquer à Brahms, il a répondu que « n’importe quel abruti » pouvait s’en rendre compte. En effet, c’est une interprétation de la Neuvième qui l’avait amené, à 21 ans, à envisager d’écrire une symphonie.) Le finale n’est pas dépourvu de surprises (notamment le retour du thème de cor « alpin »), ni de moments d’obscurité et de malaise, mais ils passent. Dans une coda plus rapide, le thème principal Allegro est rejoint par le « choral » de l’introduction, amenant la symphonie à sa triomphale conclusion.
Note de programme par Kevin Bazzana (traduit de l’anglais)
Décrit comme « un communicateur né, sur scène comme dans la vie » (The Telegraph), Alexander Shelley se produit sur six continents avec les plus grands ensembles et solistes de la planète.
Reconnu pour sa technique de direction « impeccable » (Yorkshire Post) et pour « la précision, la distinction et la beauté de sa gestique […] quelque chose que l’on n’a plus vraiment vu depuis Lorin Maazel » (Le Devoir), le maestro est aussi célébré pour la clarté et l’intégrité de ses interprétations et pour la créativité et l’audace de sa programmation. Il a à ce jour dirigé plus de 40 premières mondiales d’envergure, des cycles acclamés des symphonies de Beethoven, de Schumann et de Brahms, des opéras, des ballets et des productions multimédias novatrices.
Il est depuis 2015 directeur musical de l’Orchestre du Centre national des Arts du Canada et premier chef associé de l’Orchestre philharmonique royal de Londres. En avril 2023, il a été nommé directeur artistique et musical d’Artis—Naples en Floride, prenant ainsi les rênes artistiques de l’Orchestre philharmonique de Naples et de tous les volets de cette organisation multidisciplinaire. La saison 2024–2025 est sa première à ce poste.
Alexander Shelley se produira également cette saison avec l’Orchestre symphonique de la Ville de Birmingham, l’Orchestre symphonique du Colorado, l’Orchestre philharmonique de Varsovie, l’Orchestre symphonique de Seattle, le Chicago Civic Orchestra et l’Orchestre symphonique national d’Irlande. Il est régulièrement invité par les plus grands orchestres d’Europe, d’Amérique, d’Asie et d’Australasie, dont l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig, le Konzerthausorchester Berlin, l’Orchestre de la Suisse Romande, les orchestres philharmoniques d’Helsinki, de Hong Kong, du Luxembourg, de Malaisie, d’Oslo, de Rotterdam et de Stockholm et les orchestres symphoniques de Sao Paulo, de Houston, de Seattle, de Baltimore, d’Indianapolis, de Montréal, de Toronto, de Munich, de Singapour, de Melbourne, de Sydney et de Nouvelle-Zélande.
Alexander Shelley a succédé à Pinchas Zukerman à titre de directeur musical de l’Orchestre du Centre national des Arts du Canada en septembre 2015, devenant le plus jeune chef à occuper ce poste dans l’histoire de l’ensemble. Ce dernier a depuis été qualifié de « transformé », « passionné », « ambitieux » et « déchaîné » (Ottawa Citizen) et classé parmi les plus audacieux en Amérique du Nord pour sa programmation (Maclean’s). Le maestro a mené ses troupes dans des tournées d’envergure au Canada, en Europe et au Carnegie Hall, où il a dirigé la première de la Symphonie no 13 de Philip Glass.
À la tête de l’Orchestre du CNA, Alexander Shelley a commandé des œuvres révolutionnaires, dont Réflexions sur la vie et RENCONTR3S, et fait paraître plusieurs albums finalistes aux prix JUNO. En réaction à la pandémie et aux questions de justice sociale qui dominent notre époque, il a lancé les séries vidéo L’OCNA en direct et INCONDITIONNEL.
En août 2017 se concluait le mandat du maestro Shelley à la direction de l’Orchestre symphonique de Nuremberg, période décrite comme un âge d’or par la critique et le public.
Sur la scène lyrique, Alexander Shelley a dirigé La veuve joyeuse et le Roméo et Juliette de Gounod (Opéral royal danois), La bohème (Opera Lyra / Centre national des Arts), Louis Riel (Compagnie d’opéra canadienne / Centre national des Arts), Iolanta (Deutsche Kammerphilharmonie de Brême), Così fan tutte (Opéra Orchestre National Montpellier), Les noces de Figaro (Opera North), Tosca (Innsbruck) ainsi que Les noces de Figaro et Don Giovanni en version semi-scénique au CNA.
Lauréat du prix ECHO et du Deutsche Grunderpreis, le chef s’est vu décerner en avril 2023 la Croix fédérale du Mérite par le président allemand Frank-Walter Steinmeier en reconnaissance de ses services à la musique et à la culture.
À titre de fondateur et directeur artistique de la Schumann Camerata et de sa série avant-gardiste 440Hz à Düsseldorf et de directeur artistique du projet Zukunftslabor de la Deutsche Kammerphilharmonie de Brême, ainsi que par ses nombreuses tournées à la tête de l’Orchestre national des jeunes d’Allemagne, il cherche constamment à inspirer les futures générations d’instrumentistes et d’adeptes de musique classique.
Alexander Shelley fait régulièrement des présentations instructives et passionnées sur ses programmes avant et après les concerts. Il participe aussi à de nombreuses entrevues et produit des balados sur le rôle de la musique classique dans la société. Seulement à Nuremberg, il a accueilli en neuf ans plus d’un demi-million de personnes aux concerts annuels du Klassik Open Air, le plus grand événement de musique classique d’Europe.
Né à Londres en octobre 1979 et fils de célèbres pianistes concertistes, Alexander Shelley a étudié le violoncelle et la direction d’orchestre en Allemagne. Il s’est d’abord signalé en remportant à l’unanimité le premier prix au Concours de direction d’orchestre de Leeds en 2005. La critique l’a décrit comme « le jeune chef d’orchestre le plus passionnant et le plus doué à avoir récolté ce prix hautement prestigieux ».
Le poste de directeur musical bénéficie du soutien d’Elinor Gill Ratcliffe, C.M., O.N.L., LL.D. (hc).
Le compositeur Howard Shore est le lauréat de trois Oscars, de trois Golden Globes, de quatre prix GRAMMY®, de nombreux prix de la critique et de récompenses dans divers festivals. Il a aussi remporté non moins de six prix Écrans canadiens/ Génie pour ses collaborations avec David Cronenberg. On lui doit les musiques de plus de 80 films, et la Cinémathèque française a récemment présenté une rétrospective de son œuvre à Paris. Il est Officier de l’Ordre du Canada, officier de l’Ordre des Arts et des Lettres de France, et lauréat d’un Prix du Gouverneur general pour les arts du spectacle.
M. Shore a étudié à Boston auprès de l’éminent compositeur de musique chorale John Bavicchi. Son opéra The Fly (2008) a été créé au Théâtre du Châtelet à Paris et au Los Angeles Opera. Parmi ses œuvres récentes, notons le concerto pour piano Ruin and Memory pour Lang Lang (2010); le cycle de chansons A Palace Upon the Ruins avec la mezzo-soprano Jennifer Johnson Cano (2014); le concerto pour violoncelle Mythic Gardens, interprété par Sophie Shao (2012); la Fanfare pour l’orgue Wanamaker a Philadelphie (2008); Sea to Sea (2017), en homage au 150e anniversaire de la Confédération canadienne; et le cycle de chansons L’Aube, créé en octobre 2017 par Susan Platts, une commande de l’Orchestre symphonique de Toronto. L’année 2018 a été marquée par la création de sa Messe en latin à l’église Saint-Léger de Lucerne, en Suisse.
Alliance internationale des employés de scène et de théâtre