Le Centre national des Arts à 50 ans : Les voix canadiennes à l’avant-scène

Life Reflected, Paris © Fred Cattroll

Par Christopher Deacon, le président et chef de la direction du Centre national des Arts

Il y a un mois, j’étais assis dans la pénombre de la salle de La Seine Musicale, à Paris, submergé par l’émotion.

Sur trois écrans géants, des danseurs autochtones exécutaient une chorégraphie de la danseuse et chorégraphe mohawk Santee Smith dans le paysage escarpé de la baie Georgienne, magnifiquement capté par la cinéaste torontoise Barbara Willis Sweete. Sur scène, l’Orchestre du Centre national des Arts du Canada interprétait l’envoûtante musique du compositeur albertain John Estacio, sous la direction d’Alexander Shelley. Et devant l’Orchestre, la comédienne kuna et rappahannock Monique Mojica amenait l’œuvre à son conclusion avec les mots libérateurs de la poète mi’kmaq Rita Joe :

« Laissez-moi retrouver ma langue, pour que je puisse vous apprendre qui je suis. »

Ce sont les derniers moments de I Lost My Talk, l’une des quatre nouvelles œuvres qui composent la production multimédia Réflexions sur la vie. Chacune de ces pièces relate le parcours d’une Canadienne remarquable – Alice Munro, Roberta Bondar, Rita Joe et la toute jeune Amanda Todd – qui a trouvé sa voix malgré les défis.

Voir nos artistes s’illustrer sur la scène mondiale remplit nos cœurs de fierté et de joie. Pourquoi étais-je donc si ému? À cause de la réaction du public : il était ébahi! À l’évidence, ces récits typiquement canadiens ont une résonance universelle.

Cette année, le Centre national des Arts célébre 50 ans de collaboration avec de brillants artistes et organisations artistiques de tout le pays. Nos trois premières décennies ont surtout été axées sur ce que nous présentions sur nos scènes. Au cours des vingt dernières années, nous avons étendu notre rayonnement à l’échelle nationale et avons fait de l’éducation artistique une priorité. À présent, nos efforts se tournent de plus en plus vers la création canadienne et le soutien à nos artistes qui cherchent à faire entendre leur voix sur la scène mondiale.

L’un des principaux moyens dont nous disposons à cette fin est notre Fonds national de création, qui investit dans le développement de nouvelles œuvres en musique, en théâtre et en danse partout au pays. On peut y voir une forme de R. et D. pour les arts. Les investissements du Fonds procurent aux artistes et organisations artistiques du Canada les ressources dont ils ont besoin pour mener leurs idées à terme. Dans quel but? Pour aider les artistes canadiens à créer des œuvres qui trouvent un écho auprès des auditoires d’ici et d’ailleurs, à l’exemple de Réflexions sur la vie en Europe.

Les résultats à ce jour sont extrêmement prometteurs. Récemment, Ghost Opera, une production de la compagnie Old Trout Puppet Workshop de Calgary, a pris l’affiche au Centre des arts de Banff où elle a enchanté la critique, et une tournée internationale est déjà en projet. Introduction à la violence de la Montréalaise Marie Brassard a subjugué le public et la critique à Montréal le mois dernier, et tournera à Düsseldorf et Göteborg l’an prochain. Ce ne sont là que deux des dizaines d’œuvres dans lesquelles nous investissons. 

Le Canada est aussi louangé dans le monde entier pour la création, au CNA, d’un nouveau département de théâtre autochtone. Des centres de diffusion artistique d’Asie et d’Australie nous ont invités à leur expliquer la genèse du département, et comment il entend propulser les voix, les récits et les langues des artistes autochtones sur la scène nationale – et internationale.

Ayant grandi au Canada dans les années 1960, je me sens proche de l’effervescence qui a vu naître le CNA. Le Canada cherchait alors une voix qui lui est propre. Cinquante ans plus tard, notre pays est plus fort, plus sûr de lui, et reconnaît l’importance de pouvoir compter non pas sur une, mais sur une multitude de voix pour le raconter. Comme j’ai pu m’en rendre compte à Paris, ces voix retentissent puissamment sur la scène mondiale, et le public de partout en redemande. Alors que nous amorçons notre prochain demi-siècle, le Centre national des Arts a plus que jamais à cœur de faire entendre ces voix canadiennes.


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