≈ 1 heure et 15 minutes · Sans entracte
Dernière mise à jour: 28 mars 2023
La maison est un refuge, un endroit plein de vide et plein de pleins. Elle est souvent partagée, parfois cassée, comme dans l’expression « casser maison ».
L’autrice et performeuse Karina Pawlikowski et le concepteur et réalisateur Julien Morissette nous invitent à pénétrer, par la petite porte de l’intimité, dans un chaleureux univers sonore : les sœurs McGarrigle et, par la bande, les Wainwright, Emmylou Harris ainsi que Linda Ronstadt aussi, sans oublier Nick Cave, sont autant de voix conviées à cette démarche théâtrale auto-ethnographique.
Dans un écrin scénique pensé pour reproduire les qualités d’écoute d’un studio d’enregistrement, le couple d’avant vient partager la beauté de leur après, quand la poussière se dépose sur les choses et qu’on y trace de petits cœurs avec le doigt.
Le spectacle est créé en première mondiale le 30 mars 2023 au Studio Azrieli du CNA.
C’est normal de se sentir un peu dérouté.
Il n’y avait pas de propos clair,
en fait, oui, il y en avait un.
Mais ça s’est transformé.
Il y avait l’idée de la maison,
des maisons.
Mais voulez-vous vraiment tout savoir avant que ça commence?
Nous ne voudrions pas tout dévoiler.
Il n’y a pas clairement de début ni de fin.
Ce n’est pas conceptuel non plus.
C’est cyclique.
Il y a quelque chose de cyclique, de la répétition, dans la forme.
C’est normal de ne pas tout comprendre, tout attraper.
Nous pourrons le redire au besoin.
Ce n’est pas tout ce qui est dit ou fait qui va vous servir.
Il y aura peut-être un chien sur scène, mais il ne jouera pas de rôle.
Il aura comme seul utilité d’être un chien, et d’être là.
C’est le chien des interprètes. Il les suit partout, surtout elle.
La chienne et elle sont inséparables.
Alors pourquoi les séparer une fois sur scène?
Il y aura de la lumière, la lumière est importante, vous verrez.
On est plus près de la performance que du théâtre.
Mais pas totalement. Il n’y aura pas d’art performance.
Nous ne pensons pas éplucher des patates pendant une heure et quart.
Nous serons présents, sur scène.
Il y aura des textes qui seront dits à voix parfois haute,
parfois dans un micro, parfois inaudible peut-être.
Les quatre interprètes ne joueront pas de rôle non plus.
Il n’y aura pas de personnages ni de costumes,
mais des vêtements.
Il y aura un piano fonctionnel,
de la musique, des sons,
des impressions.
Il y aura beaucoup d’impression de quelque chose.
Parfois ce sera flou.
Vous hésiterez.
Vous fermerez les yeux,
et ce n’est pas clair encore pour nous si cela provoquera une perte ou un gain.
C’est normal de se sentir un peu dérouté.
ZOÉ
J’aime penser à la rupture comme à un réaménagement de l’espace domestique.
Les gens s’achètent des chalets, et nous, nous avons deux maisons.
Le problème que la séparation a laissé est essentiellement d’ordre lexical.
Le fait que nos enfants aient deux maisons crée une perte dans leur capacité à s’approprier
leur chez soi, jusque dans les mots.
Les enfants peuvent plus dire « j’m’en vais chez moi » ou « viens-tu jouer à la maison? »
puisque personne ne peut savoir de quelle maison il s’agit.
Les enfants ont donc deux maisons et aucune à la fois.
Avant le déménagement, on avait continué de cohabiter, comme parents, et tranquillement les
espaces de la maison se sont transformés.
C’est comme ça que l’autre parent a atterri au sous-sol,
pour un moment indéterminé.
Un soir, on a retapé ta chambre dans le sous-sol.
PATRICE
Un soir, on a retapé ma chambre dans le sous-sol pour que ça ait moins l’air d’un donjon.
KARINA
J’ai agrandi ton lit.
Pour qu’il soit moins simple.
Je t’ai apporté une couverture plus chaude, d’un vert forêt profond,
tellement dense qu’il absorbe toute la lumière.
PATRICE/KARINA
Ce n’est pas une métaphore, c’est du lin.
KARINA
On a installé un tapis baroque
et des lumières d’un blanc chaud pour que tu aies moins envie de sacrer ton camp dans un demi sous-sol en attendant que le prix des maisons redescende.
Te garder dans la maison familiale, au moins jusqu’à Noël.
Quelque chose comme un souhait.
Écoutez le balado autour de Là où la poussière se dépose. Julien Morissette et Karina Pawlikowski échangent avec l’artiste Gabriel Plante sur des thèmes reliés au spectacle tels que la rupture, la transformation, l’écriture de l’intimité et la maison comme espace d’exploration.
Karina Pawlikowski est une artiste et écrivaine issue du milieu des arts visuels. Depuis 2015, sa pratique prend forme à travers les matériaux de l’écriture et de la voix. Son travail est appuyé, exposé et diffusé par diverses institutions québécoises, canadiennes, et parfois, internationales. La recherche de Karina questionne les normes qui encadrent la vie affective et relationnelle. Ses œuvres sont empreintes de référence à l’intime, à l’espace domestique et à la parentalité. Avec son partenaire de la vie courante, Julien Morissette, elle travaille à la création de la série de fiction audio Les amours extraordinaires, ainsi qu’à l’élaboration du projet scénique Quelque chose de la lenteur.
Julien Morissette est un réalisateur, concepteur sonore et musicien originaire de Gatineau, où il vit et travaille. Depuis 2016, il a une pratique en arts numériques axée sur la création radiophonique et la mise en récit. L’artiste a créé et conçu des installations audio présentées dans divers centres d’artiste en plus de faire des conceptions sonores et radiophoniques pour la scène. En 2017, il a co-fondé le Festival de la radio numérique et la boîte Transistor Média qui se spécialise en baladodiffusion documentaire et en fiction audionumérique. On lui doit la conception et réalisation de séries audio comme L’heure de radio McGarrigle, La Scène nationale du son et Signal nocturne (Télé-Québec), Synthèses (QUB radio) et En direct de (Radio-Canada). Avec sa complice Karina Pawlikowski, il travaille à la création de la série de fiction audio Les amours extraordinaires (Radio-Canada) ainsi qu’à l’élaboration du projet scénique Quelque chose de la lenteur.
Texte, mise en scène et interprétation
Karina Pawlikowski et Jullien Morissette
Avec
Patrice Dubois, Julien Morissette, Karina Pawlikowski et Zoé Tremblay-Bianco
Conception lumière et régie
Claire Seyller
Conception musicale
Alexis Elina
Conception sonore et régie
Jean-Sébastien Côté
Aide à la conception sonore
François Larivière
Production
Transistor Média
Coproduction
Théâtre français du CNA
Alliance internationale des employés de scène et de théâtre