≈ 50 minutes · Sans entracte
Dernière mise à jour: 30 mars 2022
La chambre des enfants, c’est le lieu de tous les possibles, l’espace où l’imaginaire règne. Qui n’est jamais parti en voyage sans quitter sa chambre? En atelier, nous avons mis un lit grinçant, une pile de draps et plusieurs micros à la disposition des enfants. Nous leur avons lancé des invitations au jeu pour les observer, noter les moments de grâce, s’inspirer de leur fougue, de leur capacité à s’abandonner complètement.
Le spectacle a été construit avec eux, et ce fut une aventure extraordinaire de les suivre. LiCan, Benjamin, Charline, Jeanne, Camille, Isaac et Gabriel ont été d’un engagement et d’une générosité sans faille. Ils ont dû aussi être patients puisque la pandémie a retardé plus d’une fois la rencontre avec le public. On y est enfin… Bienvenue dans la chambre des enfants!
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Anne-Marie Ouellet : chercheuse d’art
Thomas Sinou : ingénieux du son
Nancy Bussières : prospectrice de lumière
La chambre des enfants et White Out forment un diptyque. Créés au CNA, les deux spectacles sont présentés entre le 6 et le 10 avril 2022.
« Cette chambre que tu vois, c’est la Chambre des enfants.
Ce pourrait être la tienne.
Elle est sans mur.
C’est une chambre blanche
Sur laquelle on peut écrire.
C’est un gros caillou
Avec une porte
Que seul un enfant peut ouvrir.
Ta grand-mère a joué ici aussi.
Toutes les grands-mères
Les grands-pères
Les sœurs
Les oncles
Leurs amis
Tes amis
Tout le monde
Mais pas en même temps.
C’est la chambre des enfants.
Elle est pleine de trous
Pour laisser entrer la lumière
Et le vent. »
Vous désirez en connaître davantage sur la création de La chambre des enfants et White Out, qui forment un diptyque?
Cliquez ICI pour avoir accès à l’éclairante entrevue que Julien Morissette a menée avec Anne-Marie Ouellet et Thomas Sinou.
« Un des liens entre White Out et La chambre des enfants, c’est que les deux se déroulent dans une chambre en bord de mer, une mer du nord, et peu à peu l’extérieur entre à l’intérieur, dans la maison… »
Anne-Marie Ouellet
S’inspirant du travail de l’artiste James Turrell, la conception des éclairages s’appuie sur un principe de lumière diffuse. Nancy Bussières, la conceptrice lumière, et Simon Guilbault, le scénographe, créent un espace éclairé de l’extérieur dans lequel les limites et les repères s’effacent. Un grand écran noir, en fond de scène, est rétro-éclairé par des barres lumineuses DEL dans lesquelles chaque point peut être contrôlé de façon indépendante. Cela permet une lumière mouvante et vivante. Ainsi la chambre se transforme sans cesse et donne l’impression d’être traversée par mille paysages.
Le travail effectué par le concepteur sonore Thomas Sinou permet de concevoir une chambre ultrasensible. Les objets réagissent aux actions posées dans l’espace. Différents types de micros dissimulés sous les surfaces permettent de capter les vibrations générées par les performeurs. Un système de multidiffusion permet de spatialiser les sons de manière précise et immerge les spectateurs dans un espace acoustique modulable. Les pas peuvent être amplifiés, modifiés, de façon à faire sonner la chambre comme une caverne, une plage ou un gymnase. La respiration d’un enfant peut se transformer en bruit du ressac de la mer. L’amplification fine de la voix, sa transformation tonale et sa spatialisation permet de faire émerger différents personnages. Par exemple, la voix d’un jeune enfant peut devenir étrangement grave pour évoquer la présence d’un vieil homme ou d’un monstre.
Fondée par Nancy Bussières, Anne-Marie Ouellet et Thomas Sinou, la compagnie L’eau du bain s’intéresse au franchissement des frontières, celles qui séparent les médiums artistiques, celles qui éloignent le public de l’œuvre et celles qui isolent les individus. Elle utilise un langage artistique métissé qui combine théâtre, performance et installation sonore.
En pratiquant un théâtre qui interroge son identité et chevauche d’autres disciplines, L’eau du bain veut exploiter au maximum l’aspect vivant de cet art, son immédiateté. Des outils novateurs sont conçus pour permettre aux artistes en scène de construire concrètement le spectacle sous l’œil du public et avec lui. À chaque création, des nouvelles règles de jeu sont statuées et des nouvelles machines sont inventées, pour rendre possible cette interaction entre l’espace, l’environnement sonore, les artistes, le texte, le public et des éléments du réel.
La figure de l’enfant mort, le spectre qui surgit au milieu de l’œuvre, représente pour L’eau du bain une mise à l’abri de l’aboutissement, de l’incarnation, de la réduction qu’une mise au monde aurait provoqué. Pour L’eau du bain, cette préservation des possibles se retrouve dans les thèmes comme dans la forme. Voilà pourquoi la compagnie privilégie les bégaiements, les tâtonnements, les vomissements, les contradictions et les hésitations, pour ouvrir l’espace entre les mots et permettre à la vie muette et à l’indicible d’émerger. En quête de formes éclatées qui privilégient la discontinuité, le désordre et les trous dans le récit, le sens n’est pas inoculé de force et doit émerger de par lui-même. En dispersant du sens, L’eau du bain cherche à créer des œuvres qui manifestent plus qu’elles ne signifient, laissant le spectateur plus libre dans sa réception.
Ne pas sous-estimer le public
Éviter d’imposer une vision unique
Laisser le sens émerger de par lui-même
Se tenir à la frontière de tous les possibles
Donner parole à la vie muette
Traiter chaque élément du discours scénique sur un pied d’égalité : le son, le jeu, la lumière, l’espace, les mots
Utiliser l’art actuel pour interroger nos origines
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Anne-Marie Ouellet, auteure et metteure en scène, c’est l’infatigable prospectrice de la compagnie L’eau du bain (Nous voilà rendus, Le son de l’ère est froid, Impatience). Aidée de son allié Thomas Sinou, elle fouille le réel pour y trouver la pépite d’or/d’art à mettre sur scène, et c’est toujours un jeu espiègle, parfois déroutant, entre le public et les acteurs, entre ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. Originaire d’Alma, au Lac-Saint-Jean, Anne-Marie a beaucoup voyagé pour parfaire sa formation, de Chicoutimi à Paris (Conservatoire), en passant par Montréal (UQAM). Elle enseigne aujourd’hui à l’Université d’Ottawa.
Thomas Sinou, c’est l’astucieux créateur sonore derrière les œuvres de la compagnie L’eau du bain. Né à Marseille, il reçoit sa formation à l’Institut supérieur des techniques du son, puis il immigre au Québec en 2006. Thomas s’intéresse aux installations et à l’interactivité entre le public, les acteurs et l’espace scénique. Pour concevoir des spectacles hybrides qui donnent « la parole à la vie muette », lui et sa complice Anne-Marie Ouellet n’hésitent pas à infiltrer divers milieux, que ce soit un centre de personnes âgées (Nous voilà rendus) ou un groupe d’adolescents (Impatience).
Prospectrice de lumière
Depuis près de vingt ans, Nancy Bussières traque la lumière! Éclairagiste de renom, elle collabore à une foule de performances, de productions de théâtre, de cirque et d’opéra, notamment avec les compagnies L’eau du bain et Champ libre. Cette professeure à l’Université du Québec à Montréal et chercheure à Hexagram, un organisme international en art médiatique, sculpte aussi cette matière évanescente en créant ses propres installations lumineuses. Nancy Bussières s’intéresse fortement aux nouvelles technologies, aux approches novatrices pour mettre la lumière en mouvement, et réfléchit sur la place qu’elle occupe, non seulement dans l’espace, mais aussi dans le temps. Bref, des questions brillantes!
Alliance internationale des employés de scène et de théâtre