≈ 45 minutes · Sans entracte
Dernière mise à jour: 12 décembre 2019
Ils sont rares les spectacles qui s’aventurent sur des questions actuelles, sur des sujets franchement d’aujourd’hui, et qui « font » théâtre. C’est-à-dire : qui évitent le didactisme ou la mise en situation, qui parviennent à déployer la forme théâtrale dans ce qu’elle a de palpitant, d’éclaté et de mystérieux à la fois. Ici, l’équipe de création aborde de front la question du genre, et plus largement celle de l’identité, mais aussi de l’importance qu’on accorde au regard de l’autre. Et elle arrive à le faire dans un récit hors réalisme, plein de fougue et de fantaisie, où les présences racontent tout autant ce que c’est que d’être soi et d’apparaître tel face aux autres et dans le monde. Un bijou, une chance en or!
Dans la tête des créateurs
Entretien avec Érika Tremblay-Roy
On brûle d’en savoir un peu plus sur le processus de création du Problème avec le rose. Comment et dans quel ordre le spectacle s’est-il construit?
Pour cette deuxième collaboration, Christophe Garcia et moi avons eu envie de brasser un peu les cartes de notre processus de création. Plutôt que de travailler à écrire la danse à partir d’une proposition textuelle, on a choisi d’aborder la recherche avec les corps. On a donc invité deux quatuors d’interprètes, un en France et l’autre au Québec, à explorer avec nous en studio autour de cette idée d’une grande moquette rose. Une fois nos quatre complices choisis, on a remis la table pour des recherches à partir de matériaux textuels. Le reste du parcours nous a fait voyager en France et au Québec, de résidence en résidence. Le texte et la danse ont continué à se répondre et à évoluer jusqu’à la première, et au-delà.
La question de l’identité de genre – qu’est-ce qu’une fille ou un garçon? – est dans l’air du temps. Parle-nous de l’angle bien singulier que tu as choisi pour aborder ce sujet.
Si, au départ, j’avais bien l’intention de plonger au cœur cette question, je réalise, en apprivoisant le spectacle qui a émergé, qu’il s’agit presque d’un enjeu secondaire. Bien sûr, ce thème des garçons et des filles est omniprésent. Mais j’ai l’impression qu’au final, c’est davantage les questions du regard des autres sur ce que l’on est, ou des attentes qu’on a envers ce que l’autre devrait ou ne devrait pas être, ou de la peur de ne pas correspondre à ce que l’on imagine devoir être qui sont les véritables moteurs de ce spectacle.
Le Petit théâtre de Sherbrooke que tu diriges est extrêmement vivant et dynamique. À quoi carbures-tu? Quelle est la force vive derrière ce petit miracle?
La première n’est ni très mystérieuse ni originale : c’est mon travail d’avoir des idées, alors tant mieux, j’en ai ! Nous savons cependant tous que c’est la partie facile, l’idée, et que c’est avec tout le reste – la mise en oeuvre avec vision et cohérence, dans le respect des artistes et des partenaires, les calendriers et les mille fenêtres ouvertes sur le bureau – que ça se complique. Alors le carburant, c’est la force de notre équipe, ça aide d’avoir des idées quand on sait qu’une équipe les accueille avec le sourire, les défend et les porte. Et finalement, je dirais que je suis aussi poussée dans le dos par cette idée qu’une compagnie comme la nôtre est importante dans une région, qu’elle est un moteur de développement, qu’elle a le devoir d’aller à la rencontre de ses publics le plus souvent possible et de différentes façons.
Propos recueillis par Amélie Dumoulin
LOU
Si tu veux construire des maisons, tu construis des maisons.
Si tu veux aller à la pêche, tu vas à la pêche.
Si tu veux cueillir du lilas, tu cueilles du lilas.
Si tu veux devenir président, tu deviens président.
Si tu veux marcher sur les mains, tu marches sur les mains.
Si tu veux jouer avec une poupée, tu joues avec une poupée.
Si tu veux crier très fort, tu cries très fort.
Si tu veux danser la valse, tu danses la valse.
Si tu veux mettre des talons hauts…
— Érika Tremblay-Roy
Grandir, est-ce que ça fait PEUR?
Qui décide de ce que ça veut dire être
UN GARS ou UNE FILLE?
De quelle couleur est L’AMITIÉ?
Comment on sait qu’on est ami avec quelqu’un?
L’IDENTITÉ
Toi, de quelle couleur tu te sens à l’intérieur?
Est-ce difficile de ne pas faire comme tout le monde?
IMAGINER/RÊVER
L’imagination est-elle un droit?
Où est-ce que tu te sens le plus à ta place dans ta vie?
ÊTRE À SA PLACE
Où est-ce que tu te sens le moins à ta place dans ta vie?
Tisseuse de liens
Érika Tremblay-Roy, autrice, metteure en scène et directrice du Petit Théâtre de Sherbrooke, puise son désir de créer dans la rencontre de son art avec d’autres disciplines artistiques. En quête d’une partition théâtrale qui serait « de la musique de mots », Érika collabore avec le musicien Laurier Rajotte (Tante T, Autopsie d’une napkin). Pour Histoires à plumes et à poils, elle ose aller encore plus loin dans le métissage en invitant dans la création deux auteurs et une artiste visuelle. Après avoir cocréé le fabuleux trio féminin Lettre pour Éléna (2016), elle recollabore avec le chorégraphe Christophe Garcia, pour Le problème avec le rose, spectacle à la distribution majoritairement masculine, avec un je-ne-sais-quoi de rose.
Sur la pointe des pieds pour mieux voir le monde
Le danseur et chorégraphe Christophe Garcia sait mieux que quiconque faire le grand jeté entre les continents, principalement l’Europe et l’Amérique du Nord, où il présente des chorégraphies qui étonnent et émeuvent par leur singularité. Avec sa compagnie marseillaise La [parenthèse], fondée en 2000, il a notamment réalisé Lettre pour Éléna (2015), sa première œuvre jeune public, avec Le Petit Théâtre de Sherbrooke. Diplômé de l’École-Atelier Rudra-Béjart en Suisse, ce créateur équilibriste a aussi collaboré avec des metteurs en scène et chorégraphes ultracontemporains comme Robert Wilson, Robert Lepage, Hélène Blackburn, tout comme des compagnies de répertoire : Scapino Ballet Rotterdam et Le Jeune Ballet du Québec.
Formée à l’École supérieure de Danse de Cannes-Mougins Rosella Hightower, où elle obtient son diplôme de danseuse professionnelle (DNSP), Maria Cargnelli débute sa carrière avec le Cannes Jeune Ballet. À l’âge de 19 ans, elle intègre le Ballet National de Marseille sous la direction de Emio Greco et Peter C. Scholten en tant qu’apprentie. Un an plus tard, elle suit une formation en danse contemporaine et composition chorégraphique au Portugal avec la Companhia Instavel. Elle est danseuse interprète pour la compagnie Sous la Peau de Claude Brumachon et Benjamin Lamarche. Elle rejoint la compagnie La [parenthèse] / Christophe Garcia en 2017.
Intéressé par le théâtre depuis son enfance, Maxime Lepage s’inscrit en 2008 au Cégep de Saint-Laurent de Montréal en Art dramatique. Il poursuit ensuite sa voie théâtrale pour quatre années de formation professionnelle en Interprétation à l’École nationale de théâtre du Canada, d’où il gradue des productions télévisuelles. Ses capacités acrobatiques lui octroient un rôle dans la pièce Nous sommes 1000 en équilibre fragile de la compagnie DynamO Théâtre.
Dès sa sortie de l’École de théâtre du Cégep de Saint-Hyacinthe, Marc-André Poliquin a incarné de multiples personnages sur scène. Depuis 10 ans, il pousse ses capacités d’acteur physique et de danseur en suivant plusieurs formations. Chez DynamO Théâtre, il joue le rôle de Jean dans L’envol de l’ange pour la tournée européenne 2013, et il est de la nouvelle création Et si Roméo et Juliette…. On a pu aussi le voir dans le rôle de Narcisse dans Noyade(s) de Samsara Théâtre, dans Duels et Symphonie Dramatique de Cas Public, production qui a tourné pendant quatre ans. Récemment, il dansait dans Hypnos de Pauline Gervais, dans le cadre du Festival Quartiers Danses, et joue le rôle de K. dans Fiel, mis en scène par Marilyn Perreault au Théâtre I.N.K.
Alexandre Tondolo commence sa formation au Conservatoire National de Région de Lyon avant d’entrer au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Lyon en 2009, à l’âge de 17 ans. En 2013, il débute son parcours professionnel avec le Centre National de Danse Contemporaine d’Angers, sous la direction de Robert Swinston. Depuis 2018, il travaille sur plusieurs créations avec les compagnies La [parenthèse] / Christophe Garcia, ECO / Emilio Calcagno, Julien Lestel, (1)Promptu / Emilie Lalande et le Ballet Preljocaj.
Le Petit Théâtre de Sherbrooke est issu de la fusion, en 1997, de deux des plus anciennes compagnies de théâtre de création de la région de l’Estrie, au Québec : le Théâtre du Sang Neuf (1973–1997) et le Théâtre Entre Chien et Loup (1978–1997). Se consacrant spécifiquement au théâtre pour les jeunes publics, la compagnie crée et diffuse des œuvres qui permettent une grande liberté de lecture, qui laissent à la sensibilité et à l’intelligence de chaque jeune spectateur un espace d’interprétation et qui font confiance à sa capacité d’aller à la rencontre de formes nouvelles. En 45 ans de pratique artistique, Le Petit Théâtre de Sherbrooke, et les compagnies qui l’ont fondé, ont créé plus de 90 spectacles présentés au Québec, au Canada, aux États‑Unis, en France, en Suisse et en Amérique du Sud.
La compagnie de danse française La [parenthèse] / Christophe Garcia voit le jour en 2000. Dès ses débuts, la volonté de raconter la poésie des petites et grandes choses du quotidien, de créer des ponts entre les arts, les imaginaires, et pourquoi pas, les continents, animent son fondateur. Chaque spectacle offre un univers singulier : les petites formes intimes côtoient des spectacles ambitieux, et c’est la poésie, la quête de justesse et le dynamisme des artistes qui impriment une couleur commune à toutes les productions. Depuis sa création, La [parenthèse] / Christophe Garcia s’est notamment produite à New York, Zagreb, Biarritz, Fontainebleau, Paris, Montréal ainsi que dans de nombreux lieux et festivals en Europe et en Amérique du Sud.
Alliance internationale des employés de scène et de théâtre