Orchestre du CNA

2020-02-14 19:00 2020-02-14 21:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : Le Concerto pour violoncelle de Goodyear

https://nac-cna.ca/fr/event/21720

Depuis ses débuts au Centre national des Arts à l’âge de douze ans, Stewart Goodyear a été salué comme l’un des plus brillants pianistes de sa génération. Mais la plupart ignorent qu’il est aussi un compositeur de talent, comme le montre ici Rachel Mercer, violoncelle solo de l’Orchestre du CNA, dans le Concerto pour violoncelle qu’il a composé pour elle. Ensuite, la partition symphonique du Rodeo...

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Salle Southam ,1 rue Elgin,Ottawa,Canada
ven 14 février 2020
ven 14 février 2020

≈ 1 heure et 30 minutes · Sans entracte

Dernière mise à jour: 13 février 2020

Réflexion : Jeremy Mastrangelo

Violon, Orchestre du CNA

Qui ne se souvient de la première fois qu’il a entendu l’Adagio pour cordes de Barber, cette ode à la mélancolie, une œuvre si forte, saisissante et poignante qu’il suffit d’en entendre les premières notes pour être aussitôt plongé dans un climat paisible et contemplatif? Je dois dire que c’est mon cas. Cette pièce ne faisait pas partie de la discothèque paternelle (avec deux fils violonistes, mon père aimait bien le répertoire pour violon de l’ère romantique, mais aussi le cool jazz), et je n’ai pas encore vu le film Platoon. Et pourtant, il me semble connaître cette pièce depuis toujours, elle est ancrée dans l’inconscient collectif sans pour autant devenir banale ou lassante.

Porgy and Bess fait partie de la musique avec laquelle j’ai grandi, non comme opéra, mais sous forme de standards du jazz de la collection de mon père, joués par Miles Davis et Bill Evans, ou chantés par des déesses comme Billie Holliday et Ella Fitzgerald. Jascha Heifetz a donné à tous les violonistes la chance de « chanter » la musique de Porgy and Bess grâce à ses transcriptions, et il en existe une pléthore d’arrangements pour grands ensembles de tous niveaux de compétence. Si l’imitation est la forme la plus sincère de la flatterie, on voit tout de suite en quelle estime les musiciens tiennent cette musique quand ils se l’approprient.

Quelques mots sur le Rodeo de Copland. Le langage musical caractéristique du « son » de la musique symphonique américaine – qui évoque de vastes paysages, les cowboys et un rude rapport à la terre – a été créé par un Juif new-yorkais! Assurément, ce qui nous rapproche comme êtres humains surpasse ce qui nous divise.

Merci de partager avec nous cet agréable moment et de prendre le temps de savourer ces différents morceaux de musique. Bonne Saint-Valentin!

Réflexion : Le Concerto pour violoncelle de Goodyear

« Le fait qu’un compositeur écrive une pièce spécialement pour moi est l’un des hommages les plus exaltants que je puisse recevoir comme interprète. Et à moins de collaborer directement à l’écriture de la musique, on ne sait jamais vraiment à l’avance ce qui nous attend! C’est une relation privilégiée fondée sur le respect et la confiance mutuelle, et rien n’est plus passionnant que de voir la partition pour la première fois… à part, peut-être, l’interpréter pour la première fois! Même si Stewart et moi nous connaissons depuis l’âge de treize ans, et sa musique m’est familière, c’est avec beaucoup d’admiration et d’émerveillement que je découvre cette pièce fabuleuse. Il a su y intégrer non seulement des passages poignants, des sujets envoûtants et des moments virtuoses, mais aussi des éléments vraiment agréables à jouer, dans lesquels tout violoncelliste serait ravi de tremper son archet. Ce n’est que le début de l’existence de cette pièce, et je suis tout à fait ravie de pouvoir la partager pour la première fois avec vous. »

Au sujet du programme

Bienvenue au concert de ce soir! Cette année, pour la Saint-Valentin, Alexander Shelley et l’Orchestre du CNA vous proposent un programme animé par Marjolaine Lambert qui comporte la création mondiale du Concerto pour violoncelle du compositeur canadien Stewart Goodyear, écrit expressément pour la soliste Rachel Mercer, violoncelle solo de l’Orchestre. On entendra aussi quelques-unes des œuvres les plus populaires et pérennes de la musique américaine.

Ces compositions, chacune à sa façon, ont contribué à définir le « son » de la musique symphonique américaine au XXe siècle. La sentimentale Serenata de Leroy Anderson est une miniature pops exemplaire de la musique américaine, tandis que le lyrisme si évocateur de l’Adagio de Samuel Barber fait le pont entre le romantisme européen et celui du Nouveau monde. Un pot-pourri des moments forts de l’opéra Porgy and Bess de George Gershwin offre une brillante synthèse de la musique de concert et des styles afro-américains du blues et du jazz; enfin, le Rodeo d’Aaron Copland intègre d’authentiques airs de cow-boys qui lui confèrent tout le charme de la culture populaire.

Quel qu’en soit le style, ce que ces œuvres ont en commun est l’attrait qu’elles exercent sur tous les auditoires, une qualité remarquable qui leur a permis de transcender les genres classique, populaire et jazz, aussi bien que les moyens de diffusion, de la salle de concert au grand écran, en passant par le studio d’enregistrement, la radio et la télévision. Bon concert!

Hannah Chan-Hartley

Hannah Chan-Hartley est docteure en musicologie, et œuvre dans la sphère publique comme auteure, conférencière et chercheuse. | Twitter @hanchanhartley

Répertoire

L. Anderson

Serenata

Cambridge, Massachusetts (É.-U.), 29 juin 1908
Woodbury, Connecticut (É.-U.), 18 mai 1975

« Tonight while all the world is still / Here I stand under her window sill / Sing to my loved one, Serenata for me / Sing her your song, love’s melody… » (« Ce soir, tandis que tout est calme / Je me tiens sous sa fenêtre / Chante pour ma bien-aimée, Sérénade, pour moi, / Chante-lui ta chanson, mélodie d’amour… ») a écrit Mitchell Parish sur la musique de Serenata de Leroy Anderson. Voilà une parfaite entrée en matière pour ce concert de la Saint-Valentin, bien que nous entendions ce soir l’œuvre originale pour orchestre de 1947, et non la chanson de 1950.

Serenata s’ouvre sur une fanfare de trompettes, qui mène ensuite à une brève introduction du rythme de biguine (à la manière d’un boléro). Ce motif devient la trame rythmique de deux segments musicaux : le premier, dans une sombre tonalité, en mineur, a un sujet basé sur une répétition rapide de notes; le second, dans une tonalité plus lumineuse, en majeur, met de l’avant une mélodie ample et fluide. Alternant avec la fanfare, chacun de ces segments est répété, avec des changements frappants dans l’orchestration.

Anderson avait le don d’écrire des mélodies accrocheuses et ses orchestrations sont toujours hautes en couleur, des qualités qui rendent sa musique à la fois attrayante pour les auditoires et agréable à jouer pour les musiciens. (Vous connaissez sans doute sa Promenade en traîneau de 1948, devenue un incontournable du temps des Fêtes, dans ses versions chantée et symphonique.) Serenata ne déroge pas à la règle; Arthur Fiedler, le célèbre chef du Boston Pops qui l’avait commandée à Anderson avec des dizaines d’autres miniatures pops pour orchestre, en avait fait sa préférée.

– Note de programme d’ Hannah Chan-Hartley

Gershwin (arr. Bennett)

Porgy and Bess: A Symphonic Picture

Brooklyn, New York (É.-U.), 26 septembre 1898
Hollywood, Californie (É.-U.), 11 juillet 1937

Après sa création, le 11 octobre 1935, à l’Alvin Theater de New York, l’opéra Porgy and Bess de George Gershwin a connu des débuts difficiles, en raison des inquiétudes soulevées par le portrait qu’il faisait de l’existence et des luttes d’une communauté afro-américaine de Charleston (Car. du Sud). Quoi qu’il en soit, bien qu’il ait fallu attendre des décennies pour que des productions intégrales de Porgy entrent au répertoire des plus grands opéras des États-Unis, sa popularité n’a cessé de croître entre-temps. Des chansons comme « Summertime », « I Got Plenty O’ Nuttin’ » et « It Ain’t Necessarily So » ont été des succès dès le départ, et restent aujourd’hui des standards bien-aimés, interprétés et enregistrés par des artistes issus des sphères classique, jazz et pop.

De même, la musique de Porgy and Bess a d’abord connu le succès dans les salles de concert, sous forme de suites ou de pots-pourris des moments forts de l’opéra. L’arrangement que nous entendrons ce soir est signé Robert Russell Bennett (1894–1981), qui l’a créé en 1961. Arrangeur œuvrant avec bonheur à Broadway, Bennett orchestrait la musique de Gershwin depuis l’époque où le compositeur avait écrit ses premières chansons. Bien qu’il n’y ait pas pris part lui-même, il avait assisté aux répétitions de Porgy and Bess en vue de sa création, et en 1942, à la demande du chef d’orchestre Fritz Reiner, avait créé Porgy and Bess: A Symphonic Picture, qui reste à ce jour l’un des arrangements pour orchestre les plus populaires de l’opéra.

Ces extraits de Porgy and Bess forment un pot-pourri plus concis qu’A Symphonic Picture, mais dans les deux cas, Bennett s’est attaché à préserver les intentions harmoniques et orchestrales du compositeur, avec des adaptations mineures. Comme le montre le guide d’écoute placé à droite, toutes les grandes mélodies blues de la partition de Gershwin y sont, avec « Bess, You Is My Woman Now » en son centre. Les mélodies s’enchaînent, mais par moments, Bennett intègre adroitement des transitions puisées dans les passages orchestraux de l’opéra original de Gershwin, comme la musique mouvementée de l’ouverture de la scène I de l’Acte II pour encadrer « Summertime », le solo de violoncelle qui prélude à « Bess » et le xylophone tapageur de l’ouverture précédant « O Lawd, I’m On My Way ».

Porgy and Bess : Guide d’écoute

Voici les extraits au programme, tels qu’ils apparaissent dans l’arrangement de Bennett (minutages approximatifs).

0:00 | Introduction avec le thème de « Bess, You Is My Woman Now »

0:30 | « Clara, Clara, Don’t You Be Downhearted »

1:30 | « A Woman Is a Sometimes Thing »

2:40 | « Summertime »

4:45 | « I Got Plenty O’ Nuttin’ »

6:10 | « Bess, You Is My Woman Now »

8:35 | « Oh, I Can’t Sit Down »

9:30 | « There’s a Boat Dat’s Leaving Soon for New York »

10:15 | « It Ain’t Necessarily So »

11:55 | « O Lawd, I’m On My Way »

12:45 | Coda avec le thème de « Bess, You Is My Woman Now »

– Note de programme d’ Hannah Chan-Hartley

Samuel Barber

Adagio pour cordes

West Chester, Pennsylvanie (É.-U.), 9 mars 1910 
New York, New York (É.-U.), 23 janvier 1981   

On trouverait difficilement une œuvre de musique classique qui ait joui d’une aussi grande popularité, au cours du dernier siècle, que l’Adagio pour cordes (1937) de Samuel Barber. Dans les dix dernières années, des chercheurs se sont penchés sur la « vie » de cette œuvre en-dehors des salles de concert et ont découvert qu’elle avait été jouée et entendue dans une étonnante variété de contextes (concerts rock, compétitions de patinage artistique, mariages, funérailles, services commémoratifs, numéros de cirque, séances de thérapie, manifestations patriotiques, pièces de danse moderne, etc.). L’Adagio figure aussi dans de nombreux films, tels Elephant Man (1980), Platoon (1986), L’huile de Lorenzo (1992) et Le fabuleux destin d’Amélie Poulain (2001), ainsi que dans des émissions de télévision. On en a même fait un remixage dance qui s’est classé deuxième au palmarès des albums pop en Grande-Bretagne!

Barber lui-même savait qu’il tenait un joyau lorsqu’il a achevé l’Adagio, en 1936, qui constituait alors le deuxième mouvement de son Quatuor à cordes. Il avait même écrit à son ami Orlando Cole que cette composition était « une bombe »! On ignore dans quel contexte il en a tiré un arrangement pour cordes, mais on sait que Barber l’a présenté en 1937, avec son Premier essai pour orchestre, au chef d’orchestre Arturo Toscanini, qui venait de fonder l’Orchestre symphonique de la NBC. Le 5 novembre 1938, le monde découvrait les deux œuvres sous la baguette de Toscanini, à la faveur d’un concert radiodiffusé sur les ondes de la NBC. Dès lors, Barber a affermi sa réputation de compositeur sur la scène mondiale.

Le talent de Barber pour écrire des mélodies élégiaques en forme d’arches resplendit dans l’Adagio, où le sujet principal se déploie sous forme de lignes toujours plus longues jusqu’à l’atteinte d’un poignant paroxysme. On peut percevoir une mélancolie ou une tristesse sous-jacente dans cette musique, mais il faut savoir que ce n’était pas l’intention du compositeur au départ. En fin de compte, la puissance émotive de l’Adagio paraît émaner de ses qualités les plus communément citées, à savoir la sincérité de la musique, son authenticité et son dépouillement. C’est pour ces raisons que l’Adagio demeure si populaire de nos jours.


Éloges pour l’Adagio de Barber

« C’est vraiment bien senti, voyez-vous, on y croit, ça n’a rien de faux. Ça vient du fond du cœur, pour employer des termes démodés. L’impression de continuité, la fluidité, la satisfaction de l’arche qu’il dessine du début à la fin […] »
Aaron Copland sur l’importance de l’Adagio (radio de la BBC, 23 janvier 1982)

« L’Adagio pour cordes est [l’une des] compositions pour cordes les plus émouvantes que je connaisse. J’aime la façon dont chaque partie se met patiemment en place autour d’un simple sujet récurrent. Pour moi, ça évoque l’image d’une personne qui se bat lentement contre la gravité, tel un alpiniste gravissant une falaise sans corde. »
Jim Creegan, chanteur et bassiste du groupe Barenaked Ladies,  dans « Strings Attached »,  BNL Blog, 23 mai 2003

– Note de programme d’ Hannah Chan-Hartley

Stewart Goodyear

Concerto pour violoncelle

Entretien avec Stewart Goodyear, compositeur 

Par Hannah Chan-Hartley

SUR L’ART DE LA COMPOSITION

Quelles sont vos principales influences et sources d’inspiration comme compositeur?

Avec mon parcours musicalement éclectique et multiculturel, beaucoup de mes compositions s’inspirent de la musique actuelle, de mon amour pour la musique classique (qui remonte à mes trois ans), et de mon héritage britannique, trinidadien et canadien.

Comment voyez-vous le rôle et les responsabilités (artistiques, politiques et sociales) du compositeur aujourd’hui? Comment intégrez-vous ces objectifs à votre démarche?

Je crois, pour ma part, que les compositeurs doivent se faire commentateurs de l’esprit humain, et narrateurs de notre environnement et de notre culture. Nous devons aussi imprégner notre musique d’un amour des auditeurs de toutes les cultures et de tous les horizons. Il est très important d’insuffler notre voix personnelle et notre intégrité dans tout ce que nous écrivons, en restant confiants que l’auditoire sera au rendez-vous. Dans le climat socio-politique actuel, nous avons désespérément besoin de messages positifs. Comme artistes, nous pouvons exprimer des émotions variées, mais nous avons la responsabilité d’appréhender ces sentiments dans une perspective de catharsis, de soulagement et, finalement, de guérison.

Pouvez-vous nous donner un aperçu de votre méthode de composition?

J’ai une façon très particulière d’aborder une nouvelle composition! Je dois d’abord décider ce qui va se produire à la page 10 de chaque pièce. Dès que ce point est établi, je sais comment l’œuvre va débuter et s’achever. J’utilise cette méthode depuis que j’ai écrit ma Sonate pour piano à 17 ans.

Quelle est l’importance, à vos yeux, de collaborer avec les artistes qui interprètent vos œuvres? Quel sens revêt pour vous le mot « interprétation »?

Si un compositeur écrit pour un musicien en particulier, une partie du processus de composition consiste à étudier à fond l’art dudit musicien avant d’écrire la première note, d’écouter ses interprétations de différents compositeurs, et de découvrir de quelle façon l’interprète communique avec l’auditeur. Au terme de cette démarche, l’inspiration peut venir et l’écriture commence. Pour moi, l’interprétation est l’apport organique de l’artiste à la partition écrite.

Comment voyez-vous le rapport de l’auditeur à votre œuvre?​

Selon moi, le compositeur et l’auditeur sont comme des partenaires de danse. Tous deux connaissent les mouvements et les pas, mais c’est au compositeur qu’il incombe de mener la danse, et d’entraîner sans heurt l’auditeur dans son univers sonore. L’auditeur devient ainsi un participant volontaire, et la danse est réussie.

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SUR LE CONCERTO POUR VIOLONCELLE

Décrivez cette œuvre à l’aide de trois à cinq adjectifs.

Mélancolique. Animée. Lyrique. Rhapsodique. Explosive.

Décrivez vos ambitions artistiques pour cette composition. Qu’aimeriez-vous que les auditeurs retiennent de ce que vous avez voulu accomplir en l’écrivant?

J’ai voulu composer une œuvre virtuose et lyrique pour mettre en valeur l’art de Rachel Mercer. Sa virtuosité, son timbre stupéfiant et sa sensibilité de chambriste ont déterminé la façon dont j’ai abordé la forme du concerto dans cette pièce.

Comment concevez-vous l’écriture pour orchestre? Quel rôle joue l’orchestre dans cette œuvre?​

Écrire pour un orchestre, pour moi, cela consiste à déterminer la palette de couleurs que je vais utiliser pour peindre ma toile. Sans perdre de vue les émotions que je veux communiquer à l’auditeur, je réfléchis à chaque instrument et à son timbre. Dans mon concerto pour violoncelle, l’orchestre agit comme collaborateur, soutien et toile de fond du thème principal, le soliste.


Vers quoi faut-il tendre l’oreille?
Le Concerto pour violoncelle de Goodyear

Minutages approximatifs:

0:00 | Introduction sombre, mystérieuse, avec un sujet mélancolique

3:00 | Hausse progressive du  volume sonore jusqu’au…

3:30 | 1er sujet – violoncelle  

7:00 | 2e sujet intime, sensuel – violoncelle et cordes

11:00 | Fanfare de trompettes; développement des sujets

16:00 | 1er sujet

17:30 | 2e sujet

19:00 | Paroxysme passionné, poignant, avec l'orchestre; suivi d’une accalmie vers…

21:00 | ...le retour au climat mélancolique de  l’introduction

22:30 | Sujet de l’introduction – violoncelle tout en douceur, dans le registre grave, sur bruissement des basses… s’estompe jusqu’au silence…

– Note de programme d’ Hannah Chan-Hartley

AARON COPLAND

Quatre épisodes de danse tirés du ballet Rodeo

Brooklyn, New York (É.-U.), 14 novembre 1900
North Tarrytown, New York (É.-U.), 2 décembre 1990

Aaron Copland écrivait de la musique dans un style considéré de nos jours comme typiquement américain. Il puisait souvent son inspiration et son matériau musical dans les chansons populaires de son enfance, le jazz qui faisait fureur à New York et Paris dans les années 1920, et la musique folk anglo-américaine compilée et publiée dans les années 1930 et 1940. Rodeo, ballet qu’il a créé en 1942 pour Agnes de Mille et les Ballets russes de Monte-Carlo, est l’une de ses œuvres les plus connues prenant appui sur ce dernier répertoire.

Rodeo est une comédie romantique pleine de charme qui se déroule dans un ranch américain. Une jeune cowgirl est amoureuse du chef d’écurie. Perçue comme un « garçon manqué en jeans », elle tente de l’impressionner par ses habiletés de cavalière et de manieuse de lasso, mais il n’a d’yeux que pour la fille du propriétaire du ranch. Finalement, elle décide de changer son apparence – pour le bal du samedi, elle revêt une jolie robe, et gagne ainsi le cœur du chef d’écurie.

Ce soir, nous entendrons la musique du ballet distillée en quatre épisodes de danse épousant la trame narrative. Copland évoque tout d’abord les rigueurs de la vie dans un ranch américain dans « Buckaroo Holiday » à l’aide de deux sujets originaux : une gamme descendante jouée avec exubérance évoque les cowboys chevauchant des broncos qui se cabrent; vient ensuite une mélodie plus calme et lyrique. Plus tard, un solo de trombone énonce une vieille chanson de cowboys, « If He’d be a Buckaroo by his Trade », l’une des nombreuses citations d’airs folkloriques qu’on peut entendre dans Rodeo. Dans « Corral Nocturne », la cowgirl repense au chaos qui a régné plus tôt ce jour-là et à son cœur meurtri, dans une mélodie mélancolique confiée aux vents, sur fond d’accords ouverts, qui évoque les vastes étendues du paysage américain.

« Saturday Night Waltz » s’amorce sur une introduction qui donne l’impression que la section des cordes est en train de s’accorder en prévision du bal. La musique se résout alors dans une valse sentimentale basée sur une autre chanson de cowboys, « Goodbye Old Paint », au cours de laquelle le climat évolue de la circonspection à la chaleur et la tendresse. Finalement, la cowgirl conquiert son homme dans l’exubérant « Hoe Down », le morceau le plus célèbre de Rodeo.


Le Rodeo de Copland : De la marche à « Hoe Down »

La célèbre mélodie de « Hoe Down » de Copland n’a pas toujours été celle qu’on connaît aujourd’hui. D’abord intitulée « Bonaparte’s Retreat », elle était « habituellement jouée comme une marche assez solennelle », selon le musicien et écrivain Stephen Wade. En 1937, Bill Stepp, un violoniste du Kentucky, y a mis sa touche personnelle, transformant le tempo en celui d’un hoedown, une danse folklorique américaine. Sa version a été captée sur ruban magnétique par Alan Lomax dans le cadre des nombreux enregistrements de musique folk américaine qu’il a réalisés pour la Bibliothèque du Congrès.

Alors qu’il écrivait Rodeo, Copland est tombé sur l’interprétation que Stepp avait faite de « Bonaparte’s Retreat », grâce à une transcription réalisée par la compositrice Ruth Crawford Seeger, spécialiste de la musique folk américaine. Il a tellement aimé cette version qu’il a décidé de l’intégrer, quasi note pour note, à son nouveau ballet. La popularité du « Hoe Down » de Copland a rendu célèbre la version de Stepp, si bien qu’en 2013, l’enregistrement de Stepp a été intronisé au panthéon des prix Grammy en raison de son importance pour l’histoire de la musique américaine.

– Note de programme d’ Hannah Chan-Hartley

Artistes

  • Chef d'orchestre Alexander Shelley
  • Violoncelle Rachel Mercer
  • Animatrice Marjolaine Lambert
  • Vidéaste Ian Cameron
  • Régisseur Kevin Waghorn
  • Avec Orchestre du Centre national des Arts

Alliance internationale des employés de scène et de théâtre