≈ 65 minutes · Sans entracte
J’ai l’immense privilège de vous entraîner dans un univers animé par des danseurs brillants et novateurs qui s’inspirent de sources variées et œuvrent dans toute une gamme de styles différents. J’ai à cœur de présenter à Ottawa les meilleures compagnies de danse du monde et j’espère que vous me suivrez tout au long de cette incursion extraordinaire au cœur de la vie en mouvement!
Je suis ravie d’ouvrir la saison avec Akram Khan, un artiste de grand talent. Le génie d’Akram réside dans la beauté singulière du mariage de la danse contemporaine et du kathak indien qu’il propose. L'étendue et la profondeur incroyables de ses talents sont superbement mis en valeur dans ce nouveau solo.
Bon spectacle!
QUELQUES FAITS INTÉRESSANTS :
Je connais Akram depuis 2001.
Akram a présenté son premier solo au CNA en 2001.
Akram et sa compagnie se sont produits six fois au CNA depuis.
Akram a chorégraphié le plus récent vidéoclip de Florence and the Machine, pour la chanson « Big God ». (À voir absolument, si ce n’est déjà fait!)
De toutes les créations auxquelles j’ai eu le bonheur de participer, XENOS est celle qui m’apparaît la plus proche de mon parcours personnel en tant qu’artiste.
Les thèmes de la réflexion, de la mort, de la renaissance, du temps, de l’aliénation, de l’identité et de la mémoire sont au cœur de cette démarche créatrice, et, de concert avec de formidables collaborateurs, je me suis lancé dans cette aventure stimulante pour donner naissance à XENOS.
Cette œuvre fait essentiellement écho aux sentiments que m’inspire l’état de notre monde : elle traite de la perte de notre humanité et de la façon dont nous sommes confrontés, une fois de plus, avec les guerres d’hier et d’aujourd’hui, à la question brûlante de ce que signifie être humain. Comment pouvons-nous, en tant qu’êtres humains, montrer tant d’habileté à créer des choses extraordinaires et sublimes avec notre imaginaire et, cependant, être tout aussi capables de violences et d’horreurs dont l’ampleur dépasse l’entendement?
Prométhée avait réalisé cet aspect de l’humanité bien avant que nous, comme espèce, en ayons seulement pris conscience.
XENOS d’Akram Khan pose une question qui a été soulevée pour la première fois il y a 100 ans, alors que la Première Guerre mondiale faisait rage, et qui ne cesse de hanter notre civilisation depuis : que signifie être humain tandis que l’homme se conduit comme un dieu sur terre?
Puisant dans les traces archivistiques laissées par une fraction du plus d’un million de soldats indiens qui ont combattu pour l’Empire britannique, et subi un massacre à l’échelle industrielle sur ses nombreux fronts, XENOS est une élégie au corps en guerre, et un memento mori pour notre temps, marqué par notre éloignement violent les uns des autres et notre dissociation de notre monde.
La Grande Guerre opposait des nations, mais c’est le corps humain qui a été au centre de ses actions et de ses conséquences. Autant ses batailles furent violentes, autant ce fut une guerre d’épuisement, de dur labeur, d’inconfort et d’ennui, ponctuée d’indescriptibles épisodes de carnage. Ce fut une guerre manuelle, du creusement incessant des tranchées à celui des tombes et au pansement des blessures, des charges à la baïonnette à la pose du fil barbelé et des lignes de communication, en passant par le transport du ravitaillement, la fabrication des armes et le constant déplacement des troupes sur des centaines de kilomètres de lignes de front toujours mouvantes.
Le texte de XENOS, écrit par le célèbre dramaturge canadien Jordan Tannahill, fait entendre le songe traumatique d’un soldat colonial indien dans le no man’s land. Beaucoup de cipayes tombés au combat ont été enterrés à l’étranger, et ceux qui sont rentrés, souvent mutilés et traumatisés, ont subi une autre forme d’effacement, leurs histoires ayant été enterrées dans les archives à la suite de la montée du nationalisme indien et du rejet du régime colonial. Dissociés de leur propre vécu, de leurs terres et de leurs concitoyens, ils sont devenus xenoi – étrangers.
XENOS fait apparaître la beauté et l’horreur de la condition humaine en brossant le portrait d’un danseur indien dont le corps agile devient un instrument de guerre. « X » est tout le monde et personne à la fois, l’inconnu et le combattant éternel, seul sur une terre lointaine, étranger à lui-même et à un ennemi dont il ne sait rien. XENOS est un portrait d’Homo deus ramené à ses origines humaines dans la glaise et le feu. À la fin, nous nous rendons, non pas aux dieux, aux traditions ou aux empires, mais bien à la terre elle-même.
Le langage du mouvement d’Akram Khan oscille entre kathak classique et danse contemporaine dans le décor vertigineux et symboliste de Mirella Weingarten. Son cipaye est un enfant soldat, à la fois victime et agresseur, créateur et destructeur du mythe, échappant aux catégories du devoir, de la loyauté et du genre. XENOS se situe à la frontière entre l’Orient et l’Occident, le passé et le présent, la mythologie et la technologie, où l’humanité est figée dans la stupeur et le désarroi.
Le souvenir direct des champs de bataille de la Première Guerre mondiale a disparu de la surface de la Terre. Avec la mort, en 2011, du dernier ancien combattant de cette guerre, nous n’avons plus accès à l’expérience vécue du conflit que par des témoignages indirects : films d’archives, photographies, entretiens, collections muséales et récits fragmentaires qu’on se transmet d’une génération à l’autre. Mais l’humanité possède une autre forme d’archives dans l’art et la culture : l’insondable gisement de la mémoire collective et de la beauté, et l’espoir de trouver tous ensemble le chemin du retour.
Dernière mise à jour: 3 octobre 2018
XENOS signifie « étranger » en grec. Akram Khan et son équipe de collaborateurs de tout premier plan ont puisé, pour ce nouveau solo, dans les archives du XXe siècle, exhumant l’expérience des soldats coloniaux de la Première Guerre mondiale.
Plus de quatre millions d’hommes de couleur ont été mobilisés par les armées européennes et américaines pendant le conflit. Environ 1,5 million d’entre eux venaient de l’Inde; la majorité de ces combattants étaient des paysans du nord et du nord-ouest du pays, qui se sont battus et ont trouvé la mort en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient. Embrigadés au nom des mythes de l’Empire, séparés de leurs terres et de leur culture, ces hommes ont une histoire restée dans l’ombre jusqu’à tout récemment.
Akram Khan écrit à ce sujet : « Je veux approfondir des questions qui me taraudent un peu plus chaque jour, comme une ombre qui me suit, me hante, me murmure à l’oreille… Devons-nous raconter les histoires des autres de crainte qu’elles ne se perdent? Qui sont ces autres? Les récits de parcours humains sont-ils dits, redits et ressassés afin que nous puissions enfin apprendre de nos erreurs? Qui est-ce nous, un collectif ou une somme d’individus? De quoi est faite notre humanité? Sommes‑nous toujours humains? »
Qui est à l’origine de la guerre?
Qui en a attisé le feu?
Qui est le maître du jeu?
— Jordan Tannahill, XENOS
Akram Khan a réuni une équipe de création de premier ordre. En plus de la conseillère dramaturgique Ruth Little et de l’éminent dramaturge canadien Jordan Tannahill, il s’est entouré de Mirella Weingarten pour le décor, du concepteur d’éclairages primé Michael Hulls, de Kimie Nakano pour les costumes, et du compositeur Vincenzo Lamagna.
Cinq musiciens de renommée internationale l’accompagneront sur scène : B. C. Manjunath aux percussions, Aditya Prakash au chant, Nina Harries à la contrebasse, Clarice Rarity au violon et Tamar Osborn au saxophone.
Ce n’est pas la guerre. C’est la fin du monde. C’est exactement le genre de guerre dont on fait mention dans le Mahabharata.
— Lettre d’un cipaye indien blessé à ses proches
Qui décide de poser un fusil dans la main d’un danseur? Qui s’empare d’un destin et s’autorise à le briser? Pour son dernier solo, Akram Khan incarne la voix des soldats indiens engagés dans la Première Guerre mondiale, soldats anonymes tombés dans les tranchées, confrontés à l’absurdité et aux hasards d’un combat auquel ils étaient étrangers.
Dédié aux oubliés de toutes les guerres, XENOS dévoile l’écriture caractéristique d’Akram Khan : à partir d’une histoire singulière se dessine peu à peu la question du rôle de l’Histoire dans le cheminement de l’humanité. Qu’apprenons‑nous de nos drames? Plus que dans d’autres créations, le corps de Khan est ici vecteur de pensée, il conduit à une question éternelle, celle de la condition humaine, dans sa double dimension, noble et obscure.
Colas et Akram Khan Company font route ensemble depuis presque dix ans maintenant. J’ai rencontré Akram Khan à Londres avant de connaître son œuvre. Ce soir-là, nous avons évoqué nos parcours respectifs, nos vies, ainsi que le sens et la valeur du lien social que créent les déplacements. Chacun dans son domaine, ce lien entre les populations ou les êtres, nous parut évident. Aussi, avons-nous bâti au fil des ans une relation personnelle autour de ces échanges d’univers.
Hervé Le Bouc
Président-directeur général de Colas
Akram Khan est l’un des artistes les plus célèbres et les plus estimés du monde de la danse. En un peu plus de 18 ans, il a créé une œuvre qui a contribué de manière considérable au rayonnement des arts au Royaume-Uni et sur la scène mondiale. Il s’est taillé une solide réputation grâce au succès de productions inventives, accessibles et toujours d’actualité, comme Until the Lions, Kaash, iTMOi (in the mind of igor), DESH, Vertical Road, Gnosis et zero degrees.
Spontanément porté vers la collaboration, Khan attire à lui des artistes de stature internationale issus de différentes cultures et disciplines. Il a notamment collaboré avec le Ballet national de Chine, l’actrice Juliette Binoche, la danseuse étoile Sylvie Guillem, les chorégraphes-danseurs Sidi Larbi Cherkaoui et Israel Galván, la chanteuse Kylie Minogue, les artistes Anish Kapoor, Antony Gormley et Tim Yip, l’écrivain Hanif Kureishi, et les compositeurs Steve Reich, Nitin Sawhney, Jocelyn Pook et Ben Frost.
Profondément émouvante, l’œuvre de Khan est renommée, entre autres, pour ses qualités narratives, qui conjuguent habilement la confidence et l’épopée. Dépeint par le Financial Times comme un artiste « qui évoque remarquablement des faits remarquables », il a chorégraphié un volet de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Londres 2012, s’attirant un concert de louanges à cette occasion.
Comme chorégraphe, Khan a tissé des liens étroits de collaboration avec l’English National Ballet et sa directrice artistique, Tamara Rojo. Après avoir chorégraphié la courte pièce Dust dans le cadre du programme Lest We Forget, il a été invité à créer sa propre version de l’emblématique ballet romantique Giselle, qui a été encensée par la critique.
Khan a reçu de nombreux prix au fil de sa carrière, dont le prix Laurence Olivier, le prix Bessie (New York Dance and Performance Award), le prestigieux ISPA Distinguished Artist Award (New York), le prix Fred and Adele Astaire, le Herald Archangel Award au Festival international d’Édimbourg, le South Bank Sky Arts Award, et six prix du UK Critics’ Circle. Il est également membre de l’Ordre de l’Empire britannique depuis 2005 pour services rendus à la danse; il est titulaire de diplômes honorifiques des Universités de Londres, Roehampton et De Montfort, et membre honorifique du conservatoire de danse et de musique Trinity Laban.
Akram Khan est artiste associé à Sadler’s Wells, Londres, et à Curve, Leicester.
Ruth Little est conseillère dramaturgique en danse et en théâtre, enseignante et écrivaine. Sa démarche l’amène à œuvrer tant avec des organisations artistiques nationales que dans des collectivités rurales isolées, dans le cadre de productions adaptées au lieu, d’expositions et d’expéditions de toutes tailles. Elle a œuvré comme chargée de cours en littérature anglaise à l’Université de Sydney, et directrice littéraire pour les compagnies Out of Joint, Soho Theatre, Young Vic et Royal Court. Elle a été directrice associée de l’organisme Cape Farewell de 2010 à 2016. Conseillère dramaturgique auprès de l’Akram Khan Company (Gnosis, Vertical Road, DESH, iTMOi, Dust, technê, Until the Lions, Giselle), elle a aussi collaboré à ce titre avec le Centre des arts de Banff, le Sadler’s Wells, le Barbican et de nombreuses autres organisations. Lauréate du prix Kenneth Tynan pour la dramaturgie en 2012, Mme Little est aussi l’auteure de plusieurs ouvrages, dont Art, Place, Climate: Situated Ethics; War in the Body; et The Meteorological Body.
Michael Hulls œuvre exclusivement en danse depuis vingt ans et s’est taillé une solide réputation, notamment à la faveur de ses collaborations avec les chorégraphes Russell Maliphant et Akram Khan, en tant que « chorégraphe de la lumière ». Son travail avec Russell Maliphant lui a attiré les faveurs de la critique internationale et a été couronné de nombreux prix. Collaborateur d’Akram Khan depuis de nombreuses années, il a pris part à des productions comme In-I, DESH, TOROBAKA et, récemment, Until the Lions. En 2009, il est devenu artiste associé du Sadler’s Wells. En 2010, son apport à la danse a été reconnu quand il est devenu le quatrième concepteur d’éclairages seulement à obtenir son entrée dans l’Oxford Dictionary of Dance. En 2014, il a reçu le prix Laurence Olivier pour ses réalisations exceptionnelles en danse.
Vincenzo Lamagna est un musicien, com-positeur et producteur établi à Londres. Sa musique se distingue par son langage viscéral, émotif et branché, construit à partir d’une combinaison inusitée de sonorités électro-orchestrales. Il a fait son nid dans le monde de la danse contemporaine alternative, s’imposant en tant que collaborateur de premier plan de quelques‑uns des chorégraphes les plus renommés de sa génération, dont Hofesh Shechter et Akram Khan. Ses plus récentes collaborations avec ce dernier comprennent Until the Lions, et l’adaptation contemporaine primée de Giselle qu’Akram Khan a créée pour l’English National Ballet. Ses partitions sont un mélange astucieux de musique acoustique et électronique, et frappent l’auditeur par leurs accents industriels redoutables, leurs mélodies troublantes et leur son presque cinématographique.
Au terme de ses études en arts drama-tiques à Londres, Mirella Weingarten a étudié les beaux-arts à Hambourg et Édimbourg, notamment auprès de Marina Abramovic. Depuis 1996, elle œuvre comme conceptrice-scénographe professionnelle au théâtre, et metteure en scène d’opéra et de danse-théâtre. Ses plus récents travaux ont été vus partout en Europe, notamment à la faveur d’une intense collaboration avec le Zeitgenössischen Oper Berlin (Opéra contemporain de Berlin), dont elle a signé les décors de bon nombre de productions primées. Depuis quelques années, son travail se distingue par la présence sur scène de sculptures cinétiques et d’objets en mouvement. Elle assure depuis 2011 la direction artistique du festival Schlossmediale Werdenberg en Suisse, un événement consacré à la musique contemporaine et ancienne ainsi qu’aux arts audiovisuels.
Kimie Nakano a conçu des costumes pour le Northern Ballet, l’Opéra et le Ballet national de Lithuanie, le Ballet royal du Danemark, la Companhia Nacional de Bailado, l’English National Ballet, la Van Huynh Company, le Ballet royal des Flandres, la Rambert Dance Company, David Nixon, Didy Veldman, Sidi Larbi Cherkaoui, José Agudo et le Studio Yabin. À l’opéra, elle a pris part aux productions The Return of Ulysses de John Fulljames pour le Royal Opera, et Tristan und Isolde de Carmen Jakobi pour le Longborough Festival Opera. Ses collaborations avec l’Akram Khan Company comprennent Vertical Road, Dust (Lest We Forget de l’English National Ballet), iTMOi, TOROBAKA, Gnosis, Kaash, The Rashomon Effect (National Youth Dance Company), technê (chorégraphié pour Sylvie Guillem, Life in Progress).
Jordan Tannahill est « largement reconnu comme l’un des jeunes dramaturges, cinéastes et artistes multidisciplinaires les plus accomplis du Canada » (Toronto Star). Ses pièces ont été produites sur des scènes prestigieuses à l’international et traduites en huit langues, et ses films et spectacles multimédias ont été présentés dans plusieurs festivals, dont le Festival international du film de Toronto, le Festival du film de Tribeca et la Biennale de Venise. En 2017, sa pièce Late Company a été jouée dans le West End de Londres. Il prépare actuellement un spectacle de réalité virtuelle, Draw Me Close, produit par le National Theatre (R.-U.) et l’Office national du film du Canada, qui sera créé au Young Vic en janvier 2019.