≈ 65 minutes · Sans entracte
Dernière mise à jour: 3 octobre 2018
J’ai l’immense privilège de vous entraîner dans un univers animé par des danseurs brillants et novateurs qui s’inspirent de sources variées et œuvrent dans toute une gamme de styles différents. J’ai à cœur de présenter à Ottawa les meilleures compagnies de danse du monde et j’espère que vous me suivrez tout au long de cette incursion extraordinaire au cœur de la vie en mouvement!
Je suis ravie d’ouvrir la saison avec Akram Khan, un artiste de grand talent. Le génie d’Akram réside dans la beauté singulière du mariage de la danse contemporaine et du kathak indien qu’il propose. L'étendue et la profondeur incroyables de ses talents sont superbement mis en valeur dans ce nouveau solo.
Bon spectacle!
QUELQUES FAITS INTÉRESSANTS :
Je connais Akram depuis 2001.
Akram a présenté son premier solo au CNA en 2001.
Akram et sa compagnie se sont produits six fois au CNA depuis.
Akram a chorégraphié le plus récent vidéoclip de Florence and the Machine, pour la chanson « Big God ». (À voir absolument, si ce n’est déjà fait!)
De toutes les créations auxquelles j’ai eu le bonheur de participer, XENOS est celle qui m’apparaît la plus proche de mon parcours personnel en tant qu’artiste.
Les thèmes de la réflexion, de la mort, de la renaissance, du temps, de l’aliénation, de l’identité et de la mémoire sont au cœur de cette démarche créatrice, et, de concert avec de formidables collaborateurs, je me suis lancé dans cette aventure stimulante pour donner naissance à XENOS.
Cette œuvre fait essentiellement écho aux sentiments que m’inspire l’état de notre monde : elle traite de la perte de notre humanité et de la façon dont nous sommes confrontés, une fois de plus, avec les guerres d’hier et d’aujourd’hui, à la question brûlante de ce que signifie être humain. Comment pouvons-nous, en tant qu’êtres humains, montrer tant d’habileté à créer des choses extraordinaires et sublimes avec notre imaginaire et, cependant, être tout aussi capables de violences et d’horreurs dont l’ampleur dépasse l’entendement?
Prométhée avait réalisé cet aspect de l’humanité bien avant que nous, comme espèce, en ayons seulement pris conscience.
XENOS d’Akram Khan pose une question qui a été soulevée pour la première fois il y a 100 ans, alors que la Première Guerre mondiale faisait rage, et qui ne cesse de hanter notre civilisation depuis : que signifie être humain tandis que l’homme se conduit comme un dieu sur terre?
Puisant dans les traces archivistiques laissées par une fraction du plus d’un million de soldats indiens qui ont combattu pour l’Empire britannique, et subi un massacre à l’échelle industrielle sur ses nombreux fronts, XENOS est une élégie au corps en guerre, et un memento mori pour notre temps, marqué par notre éloignement violent les uns des autres et notre dissociation de notre monde.
La Grande Guerre opposait des nations, mais c’est le corps humain qui a été au centre de ses actions et de ses conséquences. Autant ses batailles furent violentes, autant ce fut une guerre d’épuisement, de dur labeur, d’inconfort et d’ennui, ponctuée d’indescriptibles épisodes de carnage. Ce fut une guerre manuelle, du creusement incessant des tranchées à celui des tombes et au pansement des blessures, des charges à la baïonnette à la pose du fil barbelé et des lignes de communication, en passant par le transport du ravitaillement, la fabrication des armes et le constant déplacement des troupes sur des centaines de kilomètres de lignes de front toujours mouvantes.
Le texte de XENOS, écrit par le célèbre dramaturge canadien Jordan Tannahill, fait entendre le songe traumatique d’un soldat colonial indien dans le no man’s land. Beaucoup de cipayes tombés au combat ont été enterrés à l’étranger, et ceux qui sont rentrés, souvent mutilés et traumatisés, ont subi une autre forme d’effacement, leurs histoires ayant été enterrées dans les archives à la suite de la montée du nationalisme indien et du rejet du régime colonial. Dissociés de leur propre vécu, de leurs terres et de leurs concitoyens, ils sont devenus xenoi – étrangers.
XENOS fait apparaître la beauté et l’horreur de la condition humaine en brossant le portrait d’un danseur indien dont le corps agile devient un instrument de guerre. « X » est tout le monde et personne à la fois, l’inconnu et le combattant éternel, seul sur une terre lointaine, étranger à lui-même et à un ennemi dont il ne sait rien. XENOS est un portrait d’Homo deus ramené à ses origines humaines dans la glaise et le feu. À la fin, nous nous rendons, non pas aux dieux, aux traditions ou aux empires, mais bien à la terre elle-même.
Le langage du mouvement d’Akram Khan oscille entre kathak classique et danse contemporaine dans le décor vertigineux et symboliste de Mirella Weingarten. Son cipaye est un enfant soldat, à la fois victime et agresseur, créateur et destructeur du mythe, échappant aux catégories du devoir, de la loyauté et du genre. XENOS se situe à la frontière entre l’Orient et l’Occident, le passé et le présent, la mythologie et la technologie, où l’humanité est figée dans la stupeur et le désarroi.
Le souvenir direct des champs de bataille de la Première Guerre mondiale a disparu de la surface de la Terre. Avec la mort, en 2011, du dernier ancien combattant de cette guerre, nous n’avons plus accès à l’expérience vécue du conflit que par des témoignages indirects : films d’archives, photographies, entretiens, collections muséales et récits fragmentaires qu’on se transmet d’une génération à l’autre. Mais l’humanité possède une autre forme d’archives dans l’art et la culture : l’insondable gisement de la mémoire collective et de la beauté, et l’espoir de trouver tous ensemble le chemin du retour.
XENOS signifie « étranger » en grec. Akram Khan et son équipe de collaborateurs de tout premier plan ont puisé, pour ce nouveau solo, dans les archives du XXe siècle, exhumant l’expérience des soldats coloniaux de la Première Guerre mondiale.
Plus de quatre millions d’hommes de couleur ont été mobilisés par les armées européennes et américaines pendant le conflit. Environ 1,5 million d’entre eux venaient de l’Inde; la majorité de ces combattants étaient des paysans du nord et du nord-ouest du pays, qui se sont battus et ont trouvé la mort en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient. Embrigadés au nom des mythes de l’Empire, séparés de leurs terres et de leur culture, ces hommes ont une histoire restée dans l’ombre jusqu’à tout récemment.
Akram Khan écrit à ce sujet : « Je veux approfondir des questions qui me taraudent un peu plus chaque jour, comme une ombre qui me suit, me hante, me murmure à l’oreille… Devons-nous raconter les histoires des autres de crainte qu’elles ne se perdent? Qui sont ces autres? Les récits de parcours humains sont-ils dits, redits et ressassés afin que nous puissions enfin apprendre de nos erreurs? Qui est-ce nous, un collectif ou une somme d’individus? De quoi est faite notre humanité? Sommes‑nous toujours humains? »
Qui est à l’origine de la guerre?
Qui en a attisé le feu?
Qui est le maître du jeu?
— Jordan Tannahill, XENOS
Akram Khan a réuni une équipe de création de premier ordre. En plus de la conseillère dramaturgique Ruth Little et de l’éminent dramaturge canadien Jordan Tannahill, il s’est entouré de Mirella Weingarten pour le décor, du concepteur d’éclairages primé Michael Hulls, de Kimie Nakano pour les costumes, et du compositeur Vincenzo Lamagna.
Cinq musiciens de renommée internationale l’accompagneront sur scène : B. C. Manjunath aux percussions, Aditya Prakash au chant, Nina Harries à la contrebasse, Clarice Rarity au violon et Tamar Osborn au saxophone.
Ce n’est pas la guerre. C’est la fin du monde. C’est exactement le genre de guerre dont on fait mention dans le Mahabharata.
— Lettre d’un cipaye indien blessé à ses proches
Qui décide de poser un fusil dans la main d’un danseur? Qui s’empare d’un destin et s’autorise à le briser? Pour son dernier solo, Akram Khan incarne la voix des soldats indiens engagés dans la Première Guerre mondiale, soldats anonymes tombés dans les tranchées, confrontés à l’absurdité et aux hasards d’un combat auquel ils étaient étrangers.
Dédié aux oubliés de toutes les guerres, XENOS dévoile l’écriture caractéristique d’Akram Khan : à partir d’une histoire singulière se dessine peu à peu la question du rôle de l’Histoire dans le cheminement de l’humanité. Qu’apprenons‑nous de nos drames? Plus que dans d’autres créations, le corps de Khan est ici vecteur de pensée, il conduit à une question éternelle, celle de la condition humaine, dans sa double dimension, noble et obscure.
Colas et Akram Khan Company font route ensemble depuis presque dix ans maintenant. J’ai rencontré Akram Khan à Londres avant de connaître son œuvre. Ce soir-là, nous avons évoqué nos parcours respectifs, nos vies, ainsi que le sens et la valeur du lien social que créent les déplacements. Chacun dans son domaine, ce lien entre les populations ou les êtres, nous parut évident. Aussi, avons-nous bâti au fil des ans une relation personnelle autour de ces échanges d’univers.
Hervé Le Bouc
Président-directeur général de Colas
M. Khan est l’un des danseurs-chorégraphes les plus célèbres et les plus estimés du Royaume-Uni. En un peu plus de 16 ans, il a créé une œuvre qui a contribué de manière significative au rayonnement des arts au Royaume-Uni et dans le monde. Sa réputation s’est construite sur le succès de productions originales telles que DESH, iTMOi, Vertical Road, Gnosis et zero degrees. Grâce à son sens de la collaboration instinctif et naturel, il a été un aimant pour des artistes de classe mondiale provenant d’autres cultures et disciplines. Parmi ses collaborations précédentes figurent le Ballet national de Chine, l’actrice Juliette Binoche, la danseuse-étoile Sylvie Guillem, les chorégraphes-danseurs Sidi Larbi Cherkaoui et Israel Galván, la chanteuse Kylie Minogue, les artistes Anish Kapoor, Antony Gormley et Tim Yip, l’écrivain Hanif Kureishi et les compositeurs Steve Reich, Nitin Sawhney, Jocelyn Pook et Ben Frost. Le travail d’Akram Khan est salué comme étant profondément émouvant, usant d’une narration intelligemment conçue, et aisément intime et épique à la fois. Décrit par le Financial Times comme un artiste « qui parle formidablement de choses formidables », Khan a chorégraphié une section de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Londres 2012, un moment de sa carrière qui fut unanimement salué. Il a reçu de nombreux prix tout au long de sa carrière, tels que le Laurence Olivier Award, le Bessie Awards, le prestigieux ISPA Distinguished Artist Award (New York), le South Bank Sky Arts Award et plusieurs UK Critics’ Circle National Dance Awards. Il est également membre de l’Ordre de l’Empire britannique depuis 2005 pour services rendus à la danse, ainsi que diplômé d’honneur des universités de Roehampton, De Montfort, de Londres, et membre honorifique du Trinity Laban.
Jordan Tannahill est dramaturge et metteur en scène. C’est « l’un des jeunes dramaturges, cinéastes et artistes multidisciplinaires les plus accomplis et les plus célébrés du Canada » (The Toronto Star); « l’un des plus extraordinaires artistes du pays » (CBC) et « l’enfant terrible du théâtre canadien » (The Walrus).
Il a remporté de nombreux prix Dora Mavor Moore, le prix John-Hirsch en mise en scène ainsi que deux Prix du Gouverneur général en théâtre (Age of Minority: Three Solo Plays, 2014, et Botticelli in the Fire & Sunday in Sodom, 2018).
Ses pièces ont été traduites en dix langues. Les lectures de ses textes et ses productions ont été notamment présentées au Young Vic, à Sadler’s Wells, au Festival d’Avignon, au Lincoln Centre, au Volkstheater, au Deutsches Theatre, au festival international d’Édimbourg et dans le West End londonien. On a pu voir les films de Jordan Tannahill dans les plus grands festivals internationaux du film, y compris à Toronto, Tribeca et Venise.
Alliance internationale des employés de scène et de théâtre