Festival de Jazz d'Ottawa

aja monet

2024-06-29 19:00 2024-06-29 21:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : aja monet

https://nac-cna.ca/fr/event/36849

Événement en personne

Les poèmes d’aja monet relèvent de la gravité. Un fondement par lequel tout est attiré, envisagé et appliqué. Son travail oscille constamment entre origine et dénouement, qui peuvent ainsi coexister. Son premier album, when the poems do what they do, nous donne un aperçu de son inépuisable volonté de s’exprimer. Cet album trouve ses origines dans des thématiques qui puisent parfois dans la...

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Studio Azrieli ,1 rue Elgin,Ottawa,Canada
sam 29 juin 2024
sam 29 juin 2024
19 h HAE
Cet événement est passé
© Fanny Chu
Musique Jazz Festival
© Fanny Chu
  • Événement en personne

Les poèmes d’aja monet relèvent de la gravité. Un fondement par lequel tout est attiré, envisagé et appliqué. Son travail oscille constamment entre origine et dénouement, qui peuvent ainsi coexister. Son premier album, when the poems do what they do, nous donne un aperçu de son inépuisable volonté de s’exprimer. Cet album trouve ses origines dans des thématiques qui puisent parfois dans la résistance noire, l’amour et l’insatiable quête de la joie.

En tant qu’organisatrice communautaire, l’enseignante et poète blues surréaliste aja monet passe d’un moyen d’expression à l’autre, tous faisant partie de son écriture. L’organisation et l’activisme ne sont pas l’objectif, mais le processus. Le but ultime est la libération : les poèmes, la musique et l’art ne font que décrire l’époque. S’appuyant sur une tradition enracinée dans l’art oratoire, l’artiste se fait la porte-parole de celles et ceux qui l’ont précédée. Partout, on retrouve l’esprit révolutionnaire d’Audre Lorde et des Last Poets, on sent l’influence de June Jordan, d’Amiri Baraka, de Jayne Cortez et même l’expressivité d’une note bleue passagère. Comme des arbres de précédentes générations dont ces poèmes seraient les fruits.

aja monet est une poète prédestinée, depuis avant même sa naissance. En 2017, dans son premier recueil de poèmes, My Mother Was a Freedom Fighter, elle raconte dans « give my regards to Brooklyn » : « i owe my life/to the woman/who stopped my mother/on the b56/on her way/to the abortion clinic/and told her/you have a poet coming » (« Je dois ma vie/à la femme/qui a arrêté ma mère/sur la ligne b56/en chemin/pour la clinique d’avortement/et qui lui a dit/votre enfant sera poète »). Poète, elle l’est depuis son plus jeune âge : « J’ai commencé à écrire à l’âge de 8 ou 9 ans – [mais] je crois que j’étais poète avant d’écrire mon premier poème ». Elle a perfectionné son écriture en s’inscrivant à la Baruch College Campus High School, puis en se joignant à Urban Word NYC. Elle a fait ses premières armes dans les murs du légendaire Nuyorican Poets Café, où on lui a décerné le prix de poésie Grand Slam en 2007. Alors âgée de 19 ans, elle devient ainsi la plus jeune artiste à remporter ce titre dans l’histoire du lieu.

aja monet a grandi à Brooklyn, où le harcèlement incessant de la communauté noire par la police nourrissait une douleur intenable. C’est là, entre l’insistance tapageuse et dynamique du rap et l’expérience prédéterminée des populations noires aux États-Unis, qu’elle a appris à maîtriser la langue. Une fois diplômée du Sarah Lawrence College et de l’école de l’Art Institute de Chicago, elle a vécu brièvement à Paris, a coédité Chorus: A Literary Mixtape avec le poète-acteur-réalisateur Saul Williams et publié deux recueils de poésie : The Black Unicorn Sings et Inner-City Cyborgs and Ciphers. Au gré de ses pérégrinations, elle écrit des poèmes qui font toujours référence à ses origines, comme une reconnaissance et un hommage à là d’où elle vient.

Dans when the poems do what they do, aja monet apparaît comme une femme de lettres et de tempête : ses poèmes ne rugissent pas en pentamètres, mais en ondes de tempête, car « Who’s got time for poems when the world is on fire?! » (qui a le temps d’écrire des poèmes quand le monde est en flammes?). Ce travail n’est pas à disséquer vers par vers, ce sont des poèmes de ressentis. On y trouve une plénitude qui ne peut être résumée dans les limites de la langue. aja monet est tout à la fois une griotte, une conteuse, une mémorialiste, une grand-mère qui nous parle de son premier amour. Ce sont des poèmes féconds – le printemps qui fait son œuvre sur les cerisiers. Ce sont des poèmes d’urgence et de volonté, un cri de ralliement pour démolir les systèmes insidieux dans lesquels nos futurs semblent forgés. En d’autres termes : « If we had a sense of humor we’d be more radical. More migrant than citizen we’d breathe the air clean and ration our resources…we would melt ALL the guns » (« Si on avait le sens de l’humour, on serait plus radicaux. Plus migrants que citoyens, on respirerait l’air pur et on rationnerait nos ressources… on ferait fondre TOUTES les armes »). À la lecture de ces poèmes, vous aurez envie de prendre les armes tout en faisant simultanément le deuil inévitable de noms déjà destinés à être immortalisés. aja monet crée son œuvre comme à son habitude, avec de multiples portes d’entrée. Ce ne sont pas des poèmes pour les poètes, mais des poèmes pour tout le monde.

Sur cet album, d’autres se joignent à cet effort : les musiciens Christian Scott (trompette), Samora Pinderhughes (piano), Elena Pinderhughes (flûte), Luques Curtis (basse), Weedie Braimah (djembe) et Marcus Gilmore (batterie). Ensemble, ils créent une musique insistante et incessante. Certains morceaux rappellent la virtuosité des clubs de jazz, d’autres un baume de Galaad apaisant, tandis que les accords de Castaway s’enchaînent en un appel à la prière d’intercession.

Quand on termine enfin d’écouter cet album, on a l’impression d’avoir le cœur brisé; la gravité nous ramène à la terre, baignés de larmes, à bout de souffle, submergés par l’amour, le désespoir, l’espoir et bien trop conscients que tout cela prend fin beaucoup trop tôt. Quand les poèmes font ce qu’ils font, ils font absolument tout.