2019-10-02 19:30 2019-10-05 21:30 60 Canada/Eastern 🎟 NAC: Bonne retraite, Jocelyne

https://nac-cna.ca/en/event/21654

Retirement often prompts people to look back at the past, but in Jocelyne’s case it becomes a pretext for a flood of opinions, awkwardness and bitterness. In dialogue that alternates between banal odiousness and odious banality, Fabien Cloutier turns the microscope on a nuclear family trapped in a teeming vivarium. Jocelyne has gathered her family together to share some big news: at 55, she’s retiring from the public service. However, her announcement gets lost in a barrage of...

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Babs Asper Theatre,1 Elgin Street,Ottawa,Canada
October 2 - 5, 2019
October 2 - 5, 2019

≈ 1 hour and 15 minutes · No intermission

Last updated: September 26, 2019

This program is only in French ›

C’est en 2005, quatre ans après sa sortie du Conservatoire d’art dramatique de Québec, que le chemin de Fabien Cloutier croise les planches de La Licorne, à Montréal, pour la première fois. Dans les Contes urbains, son monologue applaudi Ousqu’y’é Chabot? lui inspirera deux pièces drôles et décapantes, qui contribueront grandement à le faire connaître : Scotstown et Cranbourne, créées à La Licorne en 2008 et en 2011.

Un an plus tard, il signe Billy (Les jours de hurlement), produit par le Théâtre du Grand Jour, un texte qui lui vaut le prix Gratien-Gélinas de la Fondation du CEAD, récompensant la relève en écriture dramatique. En 2014, comme auteur en résidence à La Manufacture, il écrit et met en scène Pour réussir un poulet. Cette comédie cinglante – chaudement acclamée – lui permet de remporter en 2015 le Prix du Gouverneur général, catégorie « Théâtre ». En 2016, le comédien livre son premier one-man-show, Assume.

En plus de briller sur scène, il est aujourd’hui l’un des visages les plus en vue de la télévision québécoise, grâce à une variété de rôles dans Les pays d’en haut, Boomerang, Blue Moon, Plan B, Les beaux malaises et Faits divers, série dramatique pour laquelle il a remporté le Gémeaux du meilleur premier rôle masculin.

Ses chroniques dans les émissions Paparagilles (ICI ARTV) et Plus on est de fous, plus on lit! (ICI Radio-Canada Première) ont mis en valeur sa plume aussi acérée qu’humoristique, aussi éclatée que pertinente.

Fabien Cloutier a récemment scénarisé la série Léo (présentée sur Club Illico), en plus d’y camper le rôle principal, et s’est lancé dans une enquête sociologico-humoristique sur un stéréotype de la masculinité québécoise dans le documentaire Mononcle, réalisé par Yves Pelletier (Télé-Québec).

Bon
Tu voulais dire que’que chose, Jocelyne?
C’était quoi?
— BRIGITTE

Jocelyne réunit chez elle les membres de sa famille pour un party improvisé, question de leur annoncer une grande nouvelle : elle part à la retraite. Or sa surprise prend vite les allures d’un pétard mouillé, noyée dans un flot de conversations de toutes sortes. Du TDAH à l’autisme, du sort des dauphins à la peine d’amour d’un neveu, le rassemblement se transforme peu à peu en tribunal populaire où tout le monde a son opinion sur tout. La table est mise pour que la fête tourne au vinaigre.

Dans une unité de temps, de lieu et d’action, cette charge cinglante contre l’ignorance met progressivement en relief les tensions latentes qui règnent entre des proches qui ne savent ni s’écouter ni s’aimer. Dans ce chaos où chacun s’improvise expert en n’importe quoi, la réaction prend vite le dessus sur la réflexion, dans un mélange de préjugés, de jalousie et de maladresses. Mais quand les jugements de valeur glissent vers ceux qui sont plus près de nous, le poids des mots devient plus lourd de conséquences.

Et on est encore là
Depuis toujours
À se battre pour un petit morceau de quelque chose

Alors que
Comme famille
Comme peuple
Il me semble qu’on ne sera jamais assez
Pour avoir les moyens de ne pas nous aimer

Merci Denis Bernard,
Anne-Marie Olivier,
Brigitte Haentjens
Merci aux actrices et acteurs
Merci à toute l’équipe de création et de production
Et merci à vous d’être là
― FABIEN CLOUTIER

Nous vous invitons à lire dans le Cahier Quinze du Théâtre français un entretien avec Fabien Cloutier autour de son écriture, de sa manière de réfléchir à la société québécoise et de la création de Bonne retraite, Jocelyne. Des exemplaires sont disponibles gratuitement à l'entrée de la salle. Le cahier peut aussi être consulté en format PDF.

Entretiens

Une première incursion dans la création théâtrale pour le duo d’artistes contemporains Cooke-Sasseville et le musicien Luc Lemay
 

COOKE-SASSEVILLE – Scénographie

À propos de la pratique artistique de Cooke-Sasseville

Nous – Pierre Sasseville et Jean-François Cooke – sommes établis à Québec et travaillons ensemble depuis 2000. Nous menons de front une carrière de sculpteurs et d’installateurs, et nous avons plusieurs réalisations dans le domaine de l’art public. Nous avons présenté notre travail dans plus d’une quinzaine d’expositions solos et nous avons pris part à un nombre important d’événements collectifs aussi bien au Québec qu’à l’étranger. Nous avons développé une démarche artistique singulière porteuse de réflexions sur la condition de l’artiste, l’aliénation, la culture publicitaire ou encore le rapport de l’art à la banalité. Nos œuvres sculpturales et installatives se caractérisent par des rencontres improbables entre différents éléments figuratifs. Qu’il s’agisse d’objets symboliquement chargés ou simplement d’objets usuels, nos jeux d’échelles et de mises en espace en détournent le sens et la fonction au profit de l’émergence d’une forme d’énigme visuelle parfois saisissante.

Adapter son travail pour le théâtre : un défi?

Quand nous avons fondé Cooke-Sasseville, nous avons établi certaines règles dont celle de ne jamais se limiter face aux médiums utilisés et aux domaines de création. Nous avons déjà par le passé créé un rapprochement avec les arts de la scène en participant à des événements de théâtre de rue et de danse contemporaine dont Où tu vas quand tu dors en marchant…?, auquel nous étions jumelés à Fabien Cloutier.

Le chemin emprunté pour créer le décor

La scénographie de Bonne retraite, Jocelyne fonctionne de façon similaire à nos installations sculpturales. Nous élaborons des systèmes antinomiques où la séduction voile le malaise. Nous offrons au public un point de vue omniscient sur cette famille qui perpétue des caractères ancestraux.

Les membres provoquent la mésentente au sein du clan, ils se font la guerre, se cannibalisent. Les rapports qu’entretiennent Jocelyne et ses invités nous ont inspiré un lieu qui évoque la préhistoire, le naufrage, le vivarium. L’espace est confortable et organisé, mais on est clairement en mode survie. Ceci est un salon, mais ça pourrait être pire…

L’esprit de l’écriture de Fabien Cloutier et le travail de Cooke-Sasseville

L’humour irrévérencieux dont nos œuvres sont souvent teintées contribue à la cohérence visuelle de l’ensemble de notre production en agissant comme un catalyseur, amenant le spectateur à poser un premier regard ludique sur les objets qui l’entourent. La force de notre travail réside dans cette première rencontre, ce moment où l’œil amusé est attiré par des objets facilement identifiables mais complètement décontextualisés de leurs environnements habituels. Plus l’esprit vagabonde et plus ce jeu de séduction bascule dans la polysémie de l’œuvre, engendrant une forme de va-et-vient entre les questionnements parfois sombres soulevés par celle-ci et son apparente légèreté initiale. Il est donc facile d’associer notre démarche à celle de Fabien dont les stratégies et préoccupations rejoignent notre approche.
 

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LUC LEMAY – Conception musicale

Qui est Luc Lemay?

Je suis compositeur, guitariste et chanteur pour le groupe death metal Gorguts que j’ai fondé en 1989. Jusqu’à maintenant j’ai enregistré six albums avec mon groupe, et nous avons fait des concerts partout à travers le monde : États-Unis, Europe, Japon, Australie, Nouvelle-Zélande, Amérique du Sud. De 1993 à 1996, j’ai étudié le violon alto, mais la composition a toujours été mon intérêt premier. De 1996 à 1999, j’ai étudié la composition au Conservatoire de musique de Montréal avec Gilles Tremblay et Michel Gonneville. Depuis, j’ai fait beaucoup d’arrangements pour orchestre et écrit de la musique de chambre : sonate pour violon, trio à cordes, concerto de flûte, entre autres.

Le processus de création et ses inspirations

J’ai d’abord tenté de capturer l’essence de l’émotion exprimée pour chacune des parties de la pièce qui demandaient un éclairage musical. Ensuite, j’ai composé les pièces au piano et l’orchestration est venue en dernier, comme toujours. Dès le départ, j’avais en tête d’écrire une trame orchestrale avec très peu ou pas de sound design. J’ai particulièrement mis au premier plan la famille des bois. J’aime beaucoup le cor anglais et le basson, ils ont donc une place de choix pour les lignes mélodiques importantes.

Créer pour le théâtre, est-ce différent?

C’est la première fois que j’écris une trame sonore pour servir une histoire. Au sens où c’est l’histoire qui décide dans quelles directions la musique ira. Dans le passé, j’ai toujours écrit de la musique destinée aux concerts, de la musique de chambre en particulier, et aussi des albums métal avec mon groupe Gorguts.

Luc Lemay et Fabien Cloutier, des univers qui se rejoignent?

Bonne question! Je crois que oui. Je pense bien avoir capturé l’esprit dramatique de la pièce. À mes oreilles, l’univers de Fabien est grinçant, sarcastique et nostalgique à la fois. Ce sont des sentiments qui habitent constamment ma musique, particulièrement dans ma musique de chambre.

Passer aux actes : Les lectures de Fabien Cloutier

par Isabelle Beaulieu
Ce texte a paru dans la revue Les libraires, février-mars 2019, sous la chronique « Libraires d’un jour ».

L’acteur et dramaturge Fabien Cloutier roule sa bosse au théâtre et à la télévision depuis plus de quinze ans. Ses pièces, que ce soit Scotstown, Pour réussir un poulet – qui lui a d’ailleurs valu le Prix littéraire du Gouverneur général – ou plus récemment Bonne retraite, Jocelyne, ne font certes pas dans la dentelle. C’est pour mieux t’ébranler, mon enfant.

Ébranler : faire bouger, mouvoir, remuer. C’est vers cela que tend Fabien Cloutier, tant lorsqu’il écrit que lorsque c’est lui-même qui lit. Les mots sont pour lui d’importants catalyseurs menant à l’action, rien à voir avec la passivité que certains seraient peut-être tentés d’associer à la lecture. Chaque jour commence par le déchiffrement des journaux pour rester au fait de ce qui se passe. Comme il est amené depuis quelques années à travailler à la télévision, il doit parfois, pendant plusieurs semaines consécutives, apprendre une douzaine de pages de texte par jour. Quand il termine sa journée, il doit prendre une pause des mots. C’est ce qui l’a conduit à privilégier la lecture de formes courtes, comme la poésie qui, ne serait-ce que graphiquement, se présente de manière plus aérée. La poésie laisse aussi les temps de suspension propices à la régénération intérieure, tout comme les livres de référence sur la nature qui le plongent dans un monde d’heureuses découvertes et de contemplation salvatrice.
 

Les mots ne sont pas que des mots

L’univers évocateur d’un Réjean Ducharme avec L’avalée des avalés et la langue onirique caractéristique de l’auteur ont incrusté d’indélébiles empreintes chez Fabien Cloutier. Même constat pour plusieurs essais qui nichent en grand nombre dans sa bibliothèque – ils en composent certainement la moitié. Notons parmi les plus significatifs : Nègres blancs d’Amérique de Pierre Vallières. Son premier souvenir de lecture est en cela précurseur puisque sans savoir comment ce livre est arrivé chez lui – et il l’a encore –, le jeune Fabien d’une dizaine d’années a lu L’histoire de Géronimo par lui-même, le récit d’un chef apache qui a combattu jusqu’au bout pour les droits de son peuple. Avec le recul, ce livre se révèle être la flamme initiale de l’insurrection qui propulse encore aujourd’hui le comédien-dramaturge.

Ses rebelles préférés, outre Vallières qui l’a fasciné, sont Noam Chomsky, Gaston Miron, qu’il aimerait ressusciter pour aller à la pêche ou marcher dans le bois avec lui et parler des arbres, et Pierre Falardeau, qui a été un des premiers à le pister vers les autres. Il a voulu saisir toute la période de la crise d’Octobre au Québec, trouvant beaucoup d’intérêt à lire Pour en finir avec Octobre de Francis Simard, ce qui l’a amené vers les patriotes, qui l’ont entraîné ailleurs et ainsi de suite. « Tout ça a été nécessaire. J’ai besoin de comprendre et aussi de me faire remettre en question constamment. C’est peut-être la chose que j’attends le plus de la lecture. J’ai besoin de me questionner sur la société et d’apprendre. »

Il n’y a pas que les essais qui le mènent dans le sillage de la connaissance et de la réflexion, les romans graphiques de Guy Delisle, par exemple, y parviennent très bien aussi. L’humanité de ses personnages et la situation sociale dans laquelle ils évoluent le renseignent autant qu’ils le touchent.

S’il n’était pas devenu un auteur et un comédien, Fabien Cloutier se serait fort probablement tourné vers les sciences sociales ou l’anthropologie. Ce qui ne l’empêche pas de satisfaire sa curiosité en ce sens et d’aiguiser sa conscience du monde, ce que lui offre pour une bonne part le spectre étendu de la lecture. Et c’est ce qui le fait également passer de l’autre côté du mur. « J’écris pour aujourd’hui, j’écris pour être dit, j’écris pour être entendu », insiste-t-il. Pour lui, il est primordial de s’inscrire dans son époque parce que l’écriture est avant tout une façon d’agir.

Pour ça, il aime aussi lire ses contemporains, ceux qui entretiennent à leur manière ce « souffle de la résistance et de la colère » qui l’intéresse en littérature. Du Maude Veilleux avec Les choses de l’amour à marde ou Prague, du Marjolaine Beauchamp avec Fourrer le feu, du Véronique Grenier, du François Guerrette, du Erika Soucy, tous poètes de (la) parole. « J’les aime, c’t’e gang-là! Comme la majorité sont plus jeunes que moi, j’ai l’impression d’avoir accès à quelque chose d’autre que ce que j’ai vécu, à une autre génération et ça me fait du bien. » C’est comme si à travers eux et elles, il trouvait la matière brute qu’il aime garder intacte pour atteindre une plus grande vérité. C’est pourquoi les premières œuvres ne lui font pas peur, bien au contraire. Les maladresses qu’on pourrait y rencontrer sont rapidement pardonnées si le texte est insufflé d’un élan vital d’uppercut, d’une énergie primitive propre à la jeunesse. « Je préfère l’élan à la maîtrise. Si on peut faire les deux, c’est tant mieux, mais sinon, l’élan d’abord. »
 

Lire n’importe quand, n’importe où

Pour ne jamais être en manque, Fabien Cloutier s’approvisionne à la librairie Alire, à Longueuil, là où il habite. C’est souvent en famille que l’escapade en librairie se fait puisque très tôt, il a été important pour lui d’initier ses enfants à la fréquentation des livres et de leur laisser le choix de ce qu’ils ont envie d’explorer. « Le livre n’est pas sacré, c’est pas grave si les pages deviennent moins belles, c’est pas grave si on lit en mangeant, l’important c’est de lire. Après, les livres ont de l’histoire. » Ils prennent le rôle de compagnons, un kit de survie qu’il fait toujours bon d’avoir avec soi.

Justement, pour inviter les jeunes à trouver dans les livres une source stimulante où ils pourront toute leur vie s’imaginer et se redéfinir, Fabien Cloutier se permet d’être chauvin. « Scotstown et Cranbourne dans une école secondaire ou au cégep, ça brasse des choses. Comme enseignant, tu vas au bat en mettant ces livres-là à l’étude dans une classe… » Mais c’est certain qu’il y aura des discussions, des réactions, du mouvement dans les esprits. Les poètes dont il a parlé plus tôt feraient aussi d’excellents ambassadeurs, avec quelques autres qu’ils n’avaient pas encore nommés, à savoir Alexie Morin et William S. Messier. Le livre qu’il a personnellement fait lire le plus souvent en l’offrant plusieurs fois est Mes jours sont vos heures de Geneviève Robitaille. « Je l’ai lu quand j’étais au Conservatoire, j’ai trouvé ça bouleversant. » C’est tout en délicatesse et avec une perçante lucidité que l’auteure écrit sur la vie avant de mourir en 2015.

En tant que gars de théâtre, Fabien Cloutier a aussi des préférés côté dramaturgie. D’abord, tout Shakespeare, qu’il considère comme nécessaire. Outre le barde, il tient pour importants des auteurs comme Jean Marc Dalpé ou encore Yvan Bienvenue et son invention des contes urbains. Tout Yvon Deschamps est un incontournable.

Mais quand le rideau tombe, quand l’heure est à l’accalmie, Fabien Cloutier revient à ses livres sur la nature. C’est en parcourant Arbres et plantes forestières du Québec et des Maritimes et Plantes de milieux humides et de bord de mer du Québec et des Maritimes qui l’aident à nommer le territoire que son esprit se recentre et s’enracine.

Artists

International Alliance of Theatrical Stage Employees