À dix-huit ans, Simon Boudreault travaille pour l’Armée du Salut : il doit classer des « cossins » amassés dans tous les sens et de toute provenance. De cette expérience insolite, il tire quelques années plus tard la pièce As is (tel quel), réjouissante et féroce épopée de l’accessoire qui interroge sur des valeurs aussi essentielles que l’aide et la compassion.

L’été de ses dix-huit ans, Simon Boudreault travaille pour l’Armée du Salut : il doit classer des « cossins » amassés dans tous les sens et de toute provenance. Cette expérience n’a jamais cessé de le hanter. Elle a donné naissance à sa pièce As is (tel quel), ce tas chaotique d’objets à trier pour ne pas se laisser déborder et à redistribuer à autrui.

Délibérément prosaïque et surréaliste, l’anecdote propulse la réflexion sur des cimes insoupçonnées. Qui l’armée en question aide-t-elle ? D’ailleurs, que signifie « aider » ? Quels sont les motifs plus ou moins avouables qui nous conduisent à vouloir secourir son prochain ? En situant l’action dans le sous-sol mal éclairé d’un organisme de charité, Boudreault donne non seulement la parole aux personnages de Saturnin, de Suzanne, de Diane, de Richard ou du chef de service, mais aussi aux laissés-pour-compte que notre société « consumériste » laisse sur le bord de la route. Dans une langue réjouissante et féroce, il déploie une critique acérée, non sans esquisser au passage un petit portrait anthropologique de notre monde inégalitaire.

Sept interprètes chevronnés donnent vie à cette épopée de l’accessoire, dans une mise en scène signée par l’auteur lui-même. Inlassablement, ils arpentent l’impressionnante scénographie de Richard Lacroix, qui a frappé les spectateurs montréalais lors de la création au printemps 2014 : un vaste amas d’objets qui montent jusqu’aux cintres, tout en débordant sur les sièges et même les couloirs du théâtre.