Orchestre du CNA

2020-02-26 20:00 2020-02-27 22:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : Merveilleux Mozart

https://nac-cna.ca/fr/event/21708

Véritable caméléon musical, Qigang Chen compose des œuvres où résonnent les échos de ses jeunes années passées en Chine, entremêlés de sonorités vives inspirées par son pays d’adoption, la France. Son incandescente pièce pour orchestre à cordes, L’éloignement, rappelle magnifiquement la musique chinoise traditionnelle et évoque l’isolement des camps de...

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Salle Southam ,1 rue Elgin,Ottawa,Canada
26 - 27 fév 2020

≈ 2 heures · Avec entracte

Nos programmes sont passés au numérique.

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Dernière mise à jour: 11 février 2020

L’Éloignement évoque pour moi un profond mal du pays. L’alliance des techniques de la musique classique occidentale aux airs traditionnels chinois est unique, et ne se retrouve que dans les œuvres de compositeurs chinois qui vivent à l’étranger. J’ai choisi cette pièce parce qu’elle me parle : quand on est éloigné de son pays pendant longtemps, on en est nostalgique.

L’Orchestre du CNA interprète L’Éloignement de Chen Qigang pour la première fois.

Vladimir Ashkenazy dirigeait l’Orchestre du CNA depuis le piano à l’occasion de la première interprétation du Concerto pour piano no 23 de Mozart, donnée par l’ensemble en 1974. Lors de la plus récente prestation de l’œuvre, en 2017, Carlo Rizzi était à la tête de l’ensemble, et Charles Richard-Hamelin, au piano.

Pour sa première interprétation de la symphonie dite « Jupiter » de Mozart, en 1969, l’Orchestre du CNA était dirigé par Mario Bernardi. Pour sa plus récente prestation, en 2013, Pinchas Zukerman était au pupitre.

Répertoire

Qigang Chen

L’éloignement

Shanghai, 28 août 1951
Vit maintenant à Paris

Né en Chine, Qigang Chen recevait ses premières leçons de musique quand la Révolution culturelle s’est abattue sur son pays. Son père, calligraphe, peintre, et administrateur à l’Académie des beaux-arts de Beijing, a été envoyé dans un camp de travail. Le garçon a été maintenu en détention et soumis à une rééducation idéologique. Puis la chance lui a souri : il avait tout juste l’âge requis pour se joindre à la célèbre « cohorte de 1978 », ainsi nommée d’après l’année où les conservatoires ont rouvert en Chine. Il a été l’un des 26 élèves admis cette année-là au Conservatoire central de musique de Beijing, parmi des milliers de candidats. Il y est resté cinq ans avant de déménager à Paris, en 1984, pour y poursuivre ses études en privé, pendant quatre ans, auprès d’Olivier Messiaen, lequel a fait de lui son dernier élève après son départ du Conservatoire. Messiaen tenait son élève en haute estime : « Doté d’une intelligence exceptionnelle, et d’une excellente “oreille”, il a très vite assimilé la musique européenne et toute la musique contemporaine. […] Ses compositions témoignent d’une réelle inventivité, d’un très grand talent et d’une complète intégration de la pensée chinoise aux conceptions musicales européennes. »

En 1989, Qigang Chen a obtenu son diplôme en musicologie de l’Université de Paris-IV Sorbonne. Les récompenses et la reconnaissance du public ont suivi peu après. En 1990, il a été nommé « musicien de l’année » par la presse chinoise; il a reçu la bourse Nadia et Lili Boulanger en 1992 et le Grand Prix de la ville de Paris en 2000. Les commandes n’ont pas tardé à affluer, dont beaucoup en France. Charles Dutoit s’est fait l’un de ses plus ardents promoteurs, et l’Orchestre symphonique de Montréal lui a commandé Un Temps disparu, œuvre qui devait être créée en avril 2002, dans le cadre d’un concert malheureusement annulé à la suite du départ de l’orchestre du maestro Dutoit. La renommée du compositeur a encore grandi lorsque le film (suivi peu après du ballet) Épouses et concubines a triomphé sur la scène mondiale. Chen a ensuite été invité à assurer la direction musicale des Jeux olympiques de Beijing 2008. Il a été reçu citoyen français en 1992. En 2013, le gouvernement français l’a décoré du titre de chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. Son concerto pour violon La joie de la souffrance a été créé au Festival de musique de Beijing en 2017 avec le soliste Maxim Vengerov.

Œuvre pour 34 cordes dont l’exécution dure une quinzaine de minutes, L’Éloignement est le fruit d’une commande de l’Orchestre de chambre de Stuttgart, qui l’a créé au Festival international des arts de Shanghai en 2003.

Voici ce qu’en dit le compositeur :

« Il existe un proverbe chinois qui dit que lorsqu’un homme est déraciné, il acquiert de la force vitale. S’il reste à la même place, il ne peut pas s’épanouir. Renouveler son environnement, c’est accueillir de nouvelles possibilités; tout changement, grand ou minime, est vécu comme une renaissance.

Cependant, bien qu’il soit source d’espoir et d’enthousiasme, le changement suggère aussi une séparation de son environnement immédiat, ainsi que de ses parents et amis. C’est cette impression d’éloignement, voire d’aliénation, que dépeint la chanson paysanne du nord-ouest de la Chine intitulée « Zou Xi Kou » (« Par-delà les gorges occidentales »). Chanson d’amour sur le départ d’un être aimé, plaintive et nostalgique, sa mélodie est intégrée à L’Éloignement parce qu’elle conserve une simplicité essentielle à l’intérieur de laquelle le compositeur peut exprimer son propre sentiment d’aliénation.

Construit sur le modèle d’un rondo avec variations, L’Éloignement évoque la séparation, la confusion, l’imagination et la nostalgie. La musique est à la fois triste et joyeuse, nostalgique et exaltée, à l’image des humeurs contradictoires qui habitent celui qui part. »

– Traduit d’après Robert Markow

WOLFGANG AMADEUS MOZART

Concerto pour piano no 23 en la majeur

Salzbourg, 27 janvier 1756
Vienne, 5 décembre 1791

Le Concerto en la majeur de Mozart est l’un des 12 concertos pour piano qu’il écrivit à Vienne dans la brève période allant de février 1784 à décembre 1786. L’inspiration artistique, la grâce consommée, la construction parfaite et la technique magistrale de cette pièce ne font aucun doute, et contribuent à en faire l’un des plus appréciés et populaires parmi les 23 concertos pour piano de Mozart. (Les quatre premiers sont essentiellement des adaptations de mouvements d’autres compositeurs.)   

Ce concerto représente aussi le summum du dialogue entre le soliste et l’orchestre, qui ne sont pas ici en concurrence, mais plutôt des partenaires jouant ensemble (conserere plutôt que concertare) dans l’esprit initial du genre musical. La dualité étroitement définie du solo et du tutti orchestral est ainsi adoucie, les deux forces partageant le matériau musical, coopérant et œuvrant de façon simultanée la plupart du temps. Louis Biancolli résume cet exploit historique en ces termes : « Égaux en poids et en variété, le piano et l’orchestre échangent des réflexions, s’amalgament, se complètent l’un l’autre, et ne s’affrontent de temps à autre que pour renouveler leurs liens dans une synthèse plus complète et mutuellement enrichissante. Le piano est dans un rapport plus étroit d’intimité avec l’orchestre et fait équipe avec lui, amenant des fusions plus riches, mais aussi des tensions plus profondes que dans d’autres œuvres du genre. »

Les richesses mélodiques de l’œuvre sont abondantes, même selon les standards mozartiens. Le premier mouvement contient au moins quatre lignes mélodiques importantes, et l’on en a identifié une bonne dizaine dans le finale. L’œuvre s’ouvre sur l’un des thèmes les plus célestes de Mozart, d’abord entonné par les cordes, puis repris en écho par les sept instruments à vent (une flûte, et clarinettes, bassons et cors en paires), dont l’apport est si essentiel à l’euphonie du concerto. Suit un passage résolument rythmique du tutti orchestral, suivi d’un autre thème tendrement lyrique d’une longueur inhabituelle et d’une grande beauté. L’ajout du basson et de la flûte à cette ligne mélodique n’est qu’une des nombreuses merveilles d’orchestration que recèle le concerto. Un autre tutti sur un rythme vigoureux conduit l’exposition orchestrale à sa conclusion. Le soliste entre en scène, et peu après s’amorce le merveilleux dialogue entre le piano et l’orchestre sous ses multiples aspects.

Le deuxième mouvement est largement considéré comme l’un des plus sublimes que Mozart ait composés. Parmi les nombreux énoncés inspirés que ce mouvement a suscités, notons la poignante description qu’en fait Biancolli : « Une tristesse indéfinissable, aussi superbe que désespérée, vous prend au cœur. […] Mozart semble avoir ouvert de nouveaux champs d’angoisse spirituelle auxquels la seule réponse possible était une anxiété résignée. » Il s’agit véritablement d’un mouvement hors du commun, comme en fait foi sa tonalité de fa dièse mineur – une clé extrêmement rare dans la musique du XVIIIe siècle, que Mozart lui-même n’a vraisemblablement utilisée qu’à cette occasion.

Les couleurs en demi-teintes et le climat sombre de l’adagio sont instantanément balayés par l’amorce de l’effervescent finale de forme rondo. Selon le musicologue Alfred Einstein, ce passage « paraît introduire une bouffée d’air frais et un rayon de soleil dans une pièce obscure et renfermée »; pour Edward Downes, auteur de notes de programmes, « l’euphorie du finale est comme une soudaine libération de prison ». Une suite ininterrompue de nouveaux thèmes en alternance avec le matériau déjà familier met en place un mouvement quasi perpétuel de fraîcheur mélodique, se manifestant jusqu’aux toutes dernières mesures.

– Traduit d’après Robert Markow

WOLFGANG AMADEUS MOZART

Symphonie no 41, « Jupiter »

Salzbourg, 27 janvier 1756
Vienne, 5 décembre 1791

La dernière symphonie de Mozart n’a jamais perdu la faveur du public en plus de 200 ans d’existence. Elle constitue un sommet alliant à la fois maîtrise symphonique et inspiration artistique, et suscite les louanges les plus éloquentes et les commentaires les plus poétiques de la part de ceux qui apprécient sa beauté et sa perfection. Il fallut six semaines au compositeur pour écrire, à l’été 1788, cette symphonie et deux autres (nos 39 et 40).

Si le sous-titre « Jupiter » n’est pas de Mozart lui-même (il fut attribué à la symphonie plusieurs années après la mort du compositeur par l’imprésario Salomon, celui-là même qui avait fait venir Haydn à Londres), il paraît tout à fait approprié à cette œuvre dont la construction parfaitement maîtrisée évoque des images de pompe, de noblesse et de grandeur olympiennes. Klaus G. Roy y voit « une divinité classique […] Nulle part ailleurs dans sa production, Mozart ne donne aussi directement une impression de maestria, d’autorité et même d’omnipotence. Cette pièce traduit une maîtrise totale des matériaux choisis […] C’est dans cette musique qu’il a vaincu le monde cruel et insensible dans lequel il vivait; il célèbre sa victoire dans une sphère spirituelle qui, au fil des siècles, s’est avérée décisive. Cette symphonie est le dernier éclair lancé par le plus grand des dieux de la musique. »

Le premier mouvement contient trois thèmes distincts, chacun parfaitement équilibré. Le premier thème, brusque et impérieux, attire l’attention avant d’exposer une figure gracieuse et mélodieuse. Le deuxième thème renferme également ses propres contrastes et équilibres : des fragments ascendants et descendants semblables à des gammes, des passages confiés aux cordes uniquement, puis agrémentés de touches colorées des vents, en plus de faire un contraste général avec le premier thème. Quant au troisième thème, de caractère espiègle et capricieux, il a été emprunté à une aria comique que Mozart avait composée quelques mois plus tôt pour une voix de basse (« Un bacio di mano », K. 541), en guise de complément à un opéra d’Anfossi.

Dans le deuxième mouvement, Mozart quitte l’atmosphère digne et énergique de l’allegro pour privilégier expression profonde, éloquence pensive et sobre élégance. Le premier thème est l’un des plus longs que Mozart ait jamais composés. Les violons, jouant en sourdine pendant tout ce passage, confèrent à la musique un caractère mystérieux et réservé. Les trompettes et les timbales sont muettes.

Tout comme le premier mouvement, le menuetto solennel combine les contrastes que produisent les variations de l’intensité sonore, l’alternance de tons gracieux et impérieux, le passage du lyrisme délicat à l’affirmation nette, dans une musique d’une forme délicieusement équilibrée. Parmi les autres caractéristiques de ce mouvement, notons une écriture chromatique plus riche que celle qu’on trouvait habituellement dans les menuets de l’époque. C’est le seul menuet de Mozart qui contient des parties distinctes pour les violoncelles et les basses. Dans la section en trio, le compositeur livre quelques traits d’humour dignes de Haydn, en commençant par un motif de cadence classique qui tient plus à une conclusion qu’à un début.

Le dernier mouvement de forme sonate débute par un motif de quatre notes. Plusieurs nouveaux thèmes ou motifs y font leur apparition. Mozart les intègre tous en tissant un contrepoint fluide faisant appel à toute la gamme des moyens à sa disposition : double et triple contrepoint, inversion thématique, canon, stretto, augmentation et diminution, le tout constituant une éblouissante démonstration d’architecture tonale. La coda olympienne réunit simultanément cinq idées thématiques en un incroyable tour de force contrapuntique.

– Traduit d’après Robert Markow

Artistes

  • Chef d’orchestre Xian Zhang
  • piano George Li
  • Avec Orchestre du Centre national des Arts
  • compositeur, L’Éloignement Qigang Chen