Orchestre du CNA

2020-01-15 20:00 2020-01-16 22:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : Montero et Schumann

https://nac-cna.ca/fr/event/21707

Joignez-vous à nous pour une soirée idyllique au son de la musique de la compositrice allemande Emilie Mayer, ainsi que de Clara et Robert Schumann, l’un des couples musicaux les plus anciens et pérennes de l’histoire! Compositrice du XIXe siècle, Emilie Mayer a abordé un grand nombre de formes musicales dans son œuvre, se dotant ainsi du catalogue le plus complet de toutes les femmes compositrices de l’ère romantique. Son...

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Salle Southam ,1 rue Elgin,Ottawa,Canada
15 - 16 jan 2020

≈ 2 heures · Avec entracte

Nos programmes sont passés au numérique.

Balayez le code QR à l’entrée de la salle pour lire les notes de programme avant le début du spectacle.

Dernière mise à jour: 30 décembre 2019

Au cœur de notre projet d’enregistrement des symphonies de Brahms et de Schumann figure une femme extraordinaire qui a exercé une forte influence et une grande fascination sur les deux compositeurs : Clara Schumann. Renommée partout en Europe pour ses talents de pianiste, de soliste, d’improvisatrice et de compositrice, Clara Schumann était aussi une championne de la musique nouvelle. Elle est l’agent liant de notre cycle d’enregistrement, dont le concerto de ce soir est un moment fort. La seule et unique Gabriela Montero, autre artiste aux multiples talents et passions, est la pianiste parfaite pour ce projet. Une talentueuse contemporaine de Clara Schumann, la prodigieuse Emilie Mayer complète le festin de musique de l’ère romantique au programme de la soirée. Bon concert!

Je suis très heureuse d’avoir enfin intégré le Concerto pour piano de Clara Schumann à mon répertoire. C’est grâce à cette collaboration avec Alexander Shelley et l’Orchestre du CNA que j’ai appris cette pièce qui m’a conquise. En tant que femme, je ressens l’urgence avec laquelle la jeune Clara, un talent précoce, veut se livrer dans cette œuvre d’une sensibilité et d’un romantisme parfois exubérants, mais sans aucune trace de banalité ou de cliché.

Étant moi-même compositrice, j’ai été agréablement surprise d’apprendre que Clara Schumann et moi avons toutes deux présenté notre premier concerto au Gewandhaus de Leipzig! Je regrette toutefois que Clara n’ait pas vécu à une époque où elle aurait pu pleinement développer son talent, libre des contraintes de son temps. Elle mérite assurément sa place parmi les grandes figures de l’histoire de la musique.

C’est la première fois que l’Orchestre du CNA interprète l’Ouverture de Faust d’Emilie Mayer.

L'Orchestre du CNA interprète le Concerto en la mineur de Clara Schumann pour la première fois dans sa version intégrale.

Mario Bernardi a dirigé la première interprétation de la symphonie dite « Rhénane » de Robert Schumann donnée par l’Orchestre du CNA en 1975. La plus récente prestation de l’œuvre date de 2016; Alexander Shelley était alors au pupitre.

Répertoire

EMILIE MAYER

Ouverture de Faust, op. 46

Quand on leur demande de citer des compositrices du XIXe siècle, Fanny Mendelssohn et Clara Schumann viennent spontanément à l’esprit de la plupart des mélomanes. Il convient d’ajouter Emilie Mayer (1812–1883) à cette liste. Son existence coïncide presque avec celle de Richard Wagner. Née dans le nord-est de l’Allemagne, elle a étudié auprès de Carl Loewe dans la ville voisine de Stettin (auj. Szczecin, en Pologne), et a déménagé à Berlin en 1847 afin d’y poursuivre sa formation sous la houlette d’Adolf Bernhard Marx et Wilhelm Wieprecht.

Elle a fait jouer et publié ses œuvres tout au long de sa vie, souvent à ses frais. Ce qui démarque Mayer des autres compositrices de l’époque, c’est le volume et l’envergure de son catalogue : huit symphonies, 15 ouvertures, 12 sonates pour violoncelle, neuf sonates pour violon, sept trios avec piano, un opéra, des lieder, de la musique pour piano et plus encore. Le New Grove Dictionary of Music and Musicians la présente comme la « compositrice allemande la plus féconde de l’ère romantique ». Après sa mort, toutefois, la musique de Mayer a sombré dans l’oubli; ce n’est que récemment qu’une partie de son œuvre a refait surface et été l’objet d’enregistrements.

Publiée à Stettin en 1880, l’Ouverture de Faust de Mayer rappelle, par son ambiance et son style, l’Ouverture de Manfred de Robert Schumann, décrivant une âme fébrile et tourmentée. Le lent adagio évoque sans doute Faust, seul dans son cabinet de travail. La partition comprend une unique indication programmatique, vers la fin : les mots « Sie ist gerettet » (« Elle [Marguerite] est sauvée ») sont inscrits dans la marge à l’endroit où la musique passe de la tonalité de si mineur à si majeur. L’allegro, section principale de cette Ouverture de 12 minutes, adopte une forme sonate modifiée, avec un premier sujet en mode mineur et un sujet complémentaire en majeur, sans section de développement. La coda reprend le mode mineur jusqu’au moment où Marguerite est « sauvée », le si majeur dominant alors jusqu’à la triomphale conclusion.

Traduit d’après Robert Markow

C. Schumann

Concerto pour piano en la mineur, op. 7

Leipzig, 13 septembre 1819
Francfort, 20 mai 1896

Clara Schumann se range incontestablement au nombre des musiciennes les plus remarquables de l’histoire. À une époque et dans un pays si peu propices à l’épanouissement de la créativité des femmes (l’Allemagne du XIXe siècle), elle trouva le courage et la détermination de s’imposer à la fois comme compositrice et pianiste virtuose. Dans ce dernier rôle, elle fut sans contredit la pianiste du siècle.

Élève de son père, Clara Schumann se classe, avec Mozart, Mendelssohn et une poignée d’autres, au rang des enfants prodiges. Elle fit sa première apparition en public à neuf ans, à la Gewandhaus de Leipzig, et donna son premier récital complet dans la même salle deux ans plus tard. (Les récitals complets présentés par un seul artiste demeuraient assez rares à l’époque.) À l’adolescence, elle avait déjà entamé une carrière qui allait l’amener à sillonner l’Europe sa vie durant. Goethe, Mendelssohn, Chopin, Paganini et Berlioz comptaient au nombre de ses admirateurs.

Les habiletés techniques de Clara Schumann ne cédaient qu’à la profondeur de ses interprétations, au lyrisme de son jeu et à son respect des indications du compositeur. Elle promut également la musique nouvelle, créant en Allemagne de nombreuses œuvres de Chopin et de Brahms, et surtout de Robert Schumann, qu'elle épousa en 1840.

Mais sa carrière de pianiste n’est qu’un des aspects de la vie musicale de Clara Schumann. Elle fut également une compositrice de renom, ayant fait paraître ses premières œuvres à 11 ans. Le concerto que nous entendrons ce soir témoigne de cette précocité : elle le composa entre 13 et 15 ans. Son catalogue comporte 23 numéros d’opus, en plus d’une trentaine d’œuvres non numérotées. Comme celles de Chopin, toutes ses œuvres mettent le piano à l’avant-plan. La première exécution intégrale de son Concerto pour piano en la mineur, le 9 novembre 1835, prit place à la Gewandhaus de Leipzig, avec Mendelssohn au pupitre.

Ce concerto est une œuvre d’une audace remarquable pour la jeune pianiste-compositrice qu’était alors Clara Wieck, à 14 ans. Le troisième mouvement (Allegro non troppo), composé en premier, fut d’abord conçu comme une œuvre indépendante, un Concertsatz lui permettant de mettre en valeur sa virtuosité et sa maîtrise de la forme à grande échelle. Robert Schumann – ancien élève de son père, compositeur émergent et, à ce stade de leur relation, seulement un bon ami – fut mis à contribution pour l’orchestration, la jeune compositrice se chargeant des deux autres mouvements. L’Allegro ma non troppo alterne entre thèmes vigoureux et gestes lyriques descendants au piano, et son auteure ne manque pas d’y satisfaire aux attentes d’un public assoiffé de virtuosité.

En choisissant d’intégrer son Concertsatz à un concerto à trois mouvements, Clara Wieck s’imposa le défi de créer une intégrité et une trajectoire musicales convaincantes à l’échelle de l’œuvre. Elle y parvint non seulement au moyen de liens thématiques subtils (en effet, le premier mouvement, l’Allegro maestoso, donne l’illusion d’être la source originale du matériel mélodique du concerto complet), mais aussi grâce à une architecture globale unique. S’inspirant peut-être du Concerto en sol mineur de Mendelssohn, son opus no 7 ne présente pas de pause entre ses mouvements. Contrairement au concerto de Mendelssohn, cependant, le premier mouvement présente une forme sonate abrégée qui omet complètement la réexposition; l’impression d’une réelle conclusion ne se concrétise qu’à la fin du finale.

Le mouvement central est un duo intime, lyrique et évocateur pour piano et violoncelle solo, intercalé entre deux mouvements plus costauds. Son titre, Romanze, s’inspire d’un genre vocal; il rappelle peut-être l’une des maximes préférées du père et professeur de la compositrice, selon lequel l’art vocal est à la base de l’apprentissage du piano. La Romanze donne effectivement aux solistes la chance de démontrer leur maîtrise du timbre et du toucher plutôt que de miser sur des prouesses techniques.

Bien que Clara Wieck ne l’ait pas su à l’époque, ce concerto fut le précurseur de plusieurs techniques novatrices, que d’autres compositeurs romantiques continuèrent de développer. La compositrice ne s’aventurera à écrire qu’un seul autre concerto, ébauché en 1847, mais demeuré inachevé.

– Traduit d’après Robert Markow et Julie Pedneault-Deslauriers

ROBERT SCHUMANN

Symphonie no 3 en mi bémol majeur, op. 97, « Rhénane »

I. Lebhaft 
II. Scherzo: Sehr mässig  
III. Nicht schnell  
IV. Feierlich  
​V. Lebhaft  

Au début du mois de septembre 1850, Robert et Clara Schumann s’installent à Düsseldorf, en Rhénanie, pour permettre à Robert (1810-1856) de prendre son poste de directeur musical de l’orchestre et du chœur de l’Allgemeiner Musikverein. Peu après son arrivée, le couple se rend à Cologne où il visite la monumentale cathédrale gothique de la ville qui, en 1850, environ 600 ans après sa fondation, est en cours d’achèvement selon ses plans d’origine. Le monument fait une forte impression sur Robert et, comme le confirmera le violoniste Josef von Waiselewski, violon solo de l’orchestre de Schumann, devient une source d’inspiration pour sa Troisième symphonie (la quatrième qu’il écrit, en fait). Peu après son retour à Düsseldorf, Robert se met au travail. Quelques mois plus tard, le 6 février 1851, il dirige la création de l’œuvre au Musikverein, où elle est chaleureusement accueillie, avec suffisamment de succès pour mériter d’être rejoué un mois plus tard.

Parmi les œuvres orchestrales de Schumann, la Troisième Symphonie reste l’une des préférées du public pour ses qualités pittoresques, tout en étant admirée par les musicologues et les critiques pour l’approche distinctive de Robert à l’égard de la structure symphonique et du cadre formel. Son sous-titre, « Rhénane », bien qu’il ne soit pas de la main du compositeur, fait référence à la toile de fond qui a manifestement inspiré les aspects picturaux de la symphonie. En même temps, Schumann utilise le rappel et le développement d’éléments motiviques pour créer un sentiment de cohérence à travers les mouvements de la symphonie, d’une manière purement structurelle qui était jusqu’alors sans précédent. Cette méthode influencera considérablement la technique d’« expansion de la variation » qui caractérisera les symphonies de Johannes Brahms trois décennies plus tard.

Les cinq mouvements de la « Rhénane » se déploient comme une série de « peintures sonores » ou, comme le dit si bien le musicologue John Daverio, comme un groupe de tableaux dans une exposition organisée avec soin. Chaque mouvement offre un contenu dynamique qui est intérieurement unifié dans les limites de son « cadre », et qui est relié aux autres dans la « galerie » symphonique davantage par des allusions motiviques que par une progression narrative. Le mouvement d’ouverture semble dépeindre le début d’une grande aventure – il se lance immédiatement (sans introduction lente) dans un thème entraînant et exubérant, propulsé par des rythmes croisés énergiques. Les vents introduisent brièvement une mélodie gracieuse et sinueuse, avec une touche de mélancolie, mais l’énergie domine. Plus tard, dans la section centrale, le thème sinueux s’affirme au milieu de passages vigoureux. L’air entraînant revient bientôt, mais ce n’est pas encore la vraie reprise. Après la proclamation d’une version élargie de l’air à quatre cors, la musique atteint son apogée lors de la véritable récapitulation. Les thèmes principaux se poursuivent comme précédemment, et le mouvement, dont l’énergie ne faiblit jamais, s’achève en apothéose. 

Robert a d’abord appelé le deuxième mouvement « Matinée sur le Rhin »; la mélodie principale évoque peut-être l’écoulement du fleuve, qui ressemble davantage à une danse légère et délicate qu’à un scherzo vif-argent. S’ensuit une variation dans une figuration vive, après quoi une nouvelle idée mélodieuse dans le mode mineur est présentée par les cors, sur des cordes discrètes. D’autres réapparitions du thème mélodieux (sous une forme brillante et audacieuse) et de l’air sinueux des cors suivent, menant à une reprise complète du scherzo.

La fluidité se maintient dans le troisième mouvement, qui présente trois éléments principaux apparaissant d’abord successivement : 1) une mélodie chantante à la clarinette dont les intervalles bondissants font allusion au thème d’ouverture de la symphonie, accompagnée par des figures ondoyantes jouées par les altos; 2) un motif tout en délicatesse avec des phrases plaintives jouées par les violons et les cors; 3) une ligne descendante de caractère dévotionnel jouée par les altos et les bassons. Après le développement de ces deux derniers éléments, la mélodie de la clarinette revient, cette fois combinée avec les cordes délicates. Dans un acte de synthèse, les trois éléments apparaissent dans la coda, qui s’achève sur le motif tout en délicatesse aux accents plaintifs. 

Avant le finale, Schumann insère un remarquable quatrième mouvement. En novembre, alors qu’il travaillait sur cette symphonie, il était retourné avec Clara à la cathédrale de Cologne pour assister à l’élévation de l’archevêque Johannes von Geissel au rang de cardinal. Cette expérience se retrouve dans ce mouvement, qu’il avait initialement intitulé « À la manière d’une procession solennelle », bien qu’il l’ait ensuite remplacé par le mot « feierlich » (« solennellement »). Les bassons, trombones et cors entonnent un choral contrapuntique, auquel les vents et les cordes ajoutent leurs voix. Comme l’a décrit le musicologue Michael Musgrave, « la forme de la partie principale [...] ne suggère pas tant le drame d’un office que la métaphore d’un édifice : ses sections en développement et son fonctionnement ouvertement contrapuntique semblent suggérer la création des niveaux et travées successifs d’une immense structure », en effet, comme celle de la cathédrale de Cologne elle-même. 

Renouant avec la légèreté, le finale est un résumé inventif de tout ce qui a précédé. Plusieurs motifs – le premier thème extraverti, la fanfare des cors et un arpège ascendant des cors – font subtilement référence à ceux qui sont apparus dans les mouvements précédents : la figure tout en délicatesse du mouvement lent, la mélodie bondissante du premier mouvement et le premier thème du scherzo, respectivement. Dans la réexposition, une fanfare de cuivres en apothéose rappelle celles du quatrième mouvement, après quoi la musique s’accélère et se précipite vers une exubérante conclusion. 

Note de programme par Hannah Chan-Hartley (traduit de l’anglais) 

Artistes

  • Chef d’orchestre Alexander Shelley
  • Piano Gabriela Montero
  • Avec Orchestre du Centre national des Arts