Musique pour un dimanche après-midi

Mettant en vedette John Storgårds

2019-02-03 14:00 2019-02-03 16:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : Musique pour un dimanche après-midi

https://nac-cna.ca/fr/event/18742

Venez assister à ce concert de musique de chambre au Musée des beaux-arts du Canada – la sortie idéale pour votre dimanche après-midi! L’auditorium de 400 places est le lieu parfait pour présenter ce type d’œuvres musicales; vous pourrez voir et entendre, dans un contexte intime, quelques-uns des talentueux musiciens de l’Orchestre du CNA.  Ce concert met les projecteurs sur notre premier chef invité, John...

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Musée des beaux-arts du Canada ,380, promenade Sussex,Ottawa
dim 3 février 2019
Musée des beaux-arts du Canada 380, promenade Sussex Ottawa

Dernière mise à jour: 29 janvier 2019

Programme

SAINT-SAËNS, Caprice sur des airs danois et russes pour flûte, hautbois, clarinette et piano, opus 79
(11 minutes)
Joanna G’froerer, flûte
Charles Hamann, hautbois
Kimball Sykes, clarinette
David Jalbert, piano

- - - - - -

ROUSSEL, Divertissement, opus 6
(7 minutes)
Joanna G’froerer, flûte
Charles Hamann, hautbois
Kimball Sykes, clarinette
Christopher Millard, basson
Lawrence Vine, cor
David Jalbert, piano

POULENC, Sextuor pour piano, flûte, hautbois, clarinette, basson et cor
(18 minutes)
I.    Allegro vivace
II.    Divertissement: Andantino
III.    Finale: Prestissimo

Joanna G’froerer, flûte
Charles Hamann, hautbois
Kimball Sykes, clarinette
Christopher Millard, basson
Lawrence Vine, cor
David Jalbert, piano

- - - ENTRACTE - - -

ENESCU, Octuor pour cordes en do majeur, opus 7
(35 minutes)    
Très modéré –
Très fougueux –
Lentement –
Mouvement de valse bien rythmée

(mouvements enchaînés sans pause)

John Storgårds, violon
Carissa Klopoushak, violon
Jeremy Mastrangelo, violon
Yosuke Kawasaki, violon
Jethro Marks, alto
Paul Casey, alto
Rachel Mercer, violoncelle
Leah Wyber, violoncelle

 

Répertoire

CAMILLE SAINT-SAËNS

Caprice sur des airs danois et russes pour flûte, hautbois, clarinette et piano, opus 79

Paris, 9 octobre 1835
Alger, 16 décembre 1921

La carrière de Camille Saint-Saëns est l’une des plus étonnantes de l’histoire de la musique. Il avait l’oreille absolue, une mémoire infaillible, et des dons de virtuose au piano et à l’orgue. Il est le premier compositeur d’envergure qui ait écrit de la musique de film. Il a composé ses premières pièces à cinq ans, et plus de huit décennies plus tard, produisait encore de la musique « aussi naturellement qu’un pommier donne des pommes », ainsi qu’il l’affirmait lui-même. À part la musique, il s’est passionné pour les mathématiques, l’astronomie, la géologie et l’archéologie, faisant montre d’une impressionnante érudition dans ces domaines.

Saint-Saëns était aussi un grand voyageur. De sa France natale, il s’est rendu jusqu’à San Francisco et Singapour. Il s’est pris d’affection pour l’Afrique du Nord (il est mort à Alger), et a donné des concerts dans toute l’Europe, de Londres à Saint-Pétersbourg. Lors de son deuxième séjour en Russie, en 1887, il avait pour compagnons de voyage les célèbres virtuoses français Paul Taffanel (flûte), Ernest Gillet (hautbois) et Paul Turban (clarinette). Avant d’entreprendre ce voyage, qui comportait aussi des concerts au Danemark, Saint-Saëns a écrit le Caprice sur des airs danois et russes pour ce trio d’instruments à vent avec piano. Il se trouve que la tsarine Marie Feodorovna, dédicataire de l’œuvre, était également une princesse danoise.

Cette pièce, dont l’exécution dure onze minutes, se présente sous la forme de deux séries de variations, la première sur un air russe (d’abord à la flûte en ré mineur), la seconde sur un air danois (au hautbois, en fa majeur), en plus d’une introduction. Les quatre instruments interviennent en parts égales dans de charmantes idées mélodiques et des éclairs de virtuosité. 

Traduit d’après Robert Markow

Albert Roussel

Divertissement pour flûte, hautbois, clarinette, basson, cor et piano, opus 6

Tourcoing, 5 avril 1869
Royan, 23 août 1937

Albert Roussel est venu tard à la musique. Comme Rimski-Korsakov, il a servi dans la marine de son pays avant de démissionner en 1894, à 25 ans, pour suivre son penchant naturel pour la musique. Il a étudié pendant une dizaine d’années, principalement comme élève de Vincent d’Indy à la Schola Cantorum de Paris. Des leçons de celui-ci, il a retenu un sens aigu de la construction musicale solide et logique, ainsi que des bases théoriques approfondies. Son style est difficile à classer : d’une œuvre à l’autre, on peut trouver dans sa musique des formes néoclassiques et des textures équilibrées, des éléments impressionnistes, des sonorités orchestrales sensuelles, des gammes et des rythmes orientaux, et des techniques aussi modernes que la polytonalité et la polyrythmie. Le Divertissement affiche les qualités typiquement françaises d’élégance, de raffinement et d’équilibre. Est-ce par pure coïncidence ou par choix délibéré que l’opus 6 du compositeur, écrit en 1906, réunit six instruments, et que son exécution dure un peu plus de six minutes?

 L’union du piano avec un quintette d’instruments à vent a rarement été accomplie dans les annales de la composition musicale. À part Poulenc, le seul autre compositeur auquel les mélomanes peuvent penser spontanément dans ce type de répertoire est Vincent d’Indy. Les connaisseurs les plus avertis citeront peut-être les noms de Hans Huber, Gordon Jacob, Joseph Jongen, Paul Juon, Ludwig Thuille (dont le sextuor, comme celui de Roussel, est l’opus 6) et Louise Farrenc, dont le Sextuor de 1852 pourrait bien être la première œuvre du genre. 

Le Divertissement de Roussel est un simple rondo avec un thème principal dynamique et guilleret, alternant avec deux idées lyriques contrastées (ABACA), dont la première est exposée par le hautbois sur des timbres langoureux, et la seconde, par le cor. Les cinq instruments à vent ont chacun leurs passages en solo, en plus de s’unir dans des combinaisons qui varient constamment.

Traduit d’après Robert Markow

POULENC

Sextuor pour piano, flûte, hautbois, clarinette, basson, cor et piano

Paris, 7 janvier 1899
Paris, 30 janvier 1963

Dans les années 1920, Francis Poulenc s’est joint à cinq autres compositeurs parisiens – Georges Auric, Louis Durey, Arthur Honegger, Darius Milhaud et Germaine Tailleferre – qui se faisaient appeler les Nouveaux jeunes. Un article de journal paru en 1920 les a surnommés Les Six, et c’est désormais sous ce nom qu’ils se sont fait connaître. Tournant le dos à l’impressionnisme vaporeux de Debussy, au mysticisme chromatique de Franck et au romantisme tardif de Richard Strauss et Mahler, leur musique renouait plutôt avec la sobriété et la limpidité du classicisme français, en y intégrant des influences de jazz et de music-hall, et en y incorporant l’humeur badine et légère d’un groupe d’amis en goguette dans le Montmartre de l’époque.

Poulenc a écrit son Sextuor entre 1930 et 1932, et l’a remanié en 1938–1939. C’est une composition substantielle, l’une des plus longues de sa production pour formations de chambre. L’œuvre est devenue non seulement l’un des piliers du répertoire pour petits ensembles du XXe siècle, mais aussi l’exemple le plus célèbre, et de loin, d’une œuvre écrite pour la combinaison du piano avec un quintette d’instruments à vent. Comme la plupart des pièces de chambre de Poulenc, le Sextuor est en trois mouvements. Le premier est un vif Allegro qui pétille de thèmes savoureux et d’humour taquin. La section centrale contient une nouvelle idée sur un tempo lent et langoureux. On retrouve ici la piété expressive et l’humeur méditative caractéristiques du style de Poulenc. Du point de vue harmonique, le début de la reprise est marquant : alors que l’exposition s’ouvrait dans la tonalité de la, ce matériau revient en ré pour les vents, tandis que l’accompagnement au piano reste en la – un superbe exemple de ce que les musicologues appellent « harmonie non fonctionnelle ». Le deuxième mouvement est un charmant divertissement avec une section médiane enjouée. Le troisième mouvement, un rondo, se conclut par un long postlude qui développe plus avant le thème langoureux de la section centrale du premier mouvement.

Traduit d’après Robert Markow

Enescu

Octuor pour cordes en do majeur, opus 7

Liveni-Virnav (auj. George Enescu), près de Dorohoi, Roumanie, 19 août 1881
Paris, 4 mai 1955

Pour la plupart des mélomanes, le nom de George Enescu se résume, pour l’essentiel, à une célèbre Rhapsodie roumaine (en fait, il en a écrit deux). Cependant, le plus important compositeur qu’ait vu naître la Roumanie a bien plus à offrir, et demeure l’un des génies les plus injustement méconnus de la musique du XXe siècle. Violoniste virtuose, chef d’orchestre, pianiste et administrateur, il a aussi été un promoteur inlassable de la musique en Roumanie. Le centenaire de sa naissance, en 1981, a été largement ignoré hors de sa patrie d’origine, mais sa mémoire est si vénérée en Roumanie qu’on y a donné son nom à un festival, un musée, un prix de composition, un concours de violon, un orchestre symphonique, et même à son village natal.  

George Enescu (connu en France sous le nom de Georges Enesco) a été un enfant prodige : il a commencé à étudier le violon à 4 ans, et la composition, à 5 ans; admis au Conservatoire de Vienne à 7 ans, il a pu entendre un premier concert consacré à ses œuvres dès l’âge de 16 ans. Il a reçu sa formation professionnelle à Vienne et Paris, et a fait de la seconde sa ville d’adoption, y résidant pendant la majeure partie de sa carrière.

Son Octuor est l’une des œuvres les plus remarquables de tout le répertoire de musique de chambre. Penchons-nous tout d’abord sur l’instrumentation. Il existe des octuors à cordes d’autres compositeurs, bien sûr, mais le chef-d’œuvre de Mendelssohn mis à part, combien d’autres pouvez-vous associer à des figures de premier plan? Les seuls octuors intégraux écrits pour quatre violons, deux altos et deux violoncelles par des compositeurs connus de la plupart des mélomanes sont ceux de Reinhold Glière et de Darius Milhaud. L’Octuor de Max Bruch entre presque dans la même catégorie, sauf que dans son œuvre, le second violoncelle est remplacé par une contrebasse. Louis Spohr a écrit quatre doubles quatuors à cordes, mais ce n’est pas tout à fait la même chose qu’un octuor. On peut encore citer les Deux pièces pour octuor à cordes de Chostakovitch – de petites pièces enlevées dont l’exécution ne dure que quelques minutes. Reste l’Octuor d’Enescu, qui demeure, après celui de Mendelssohn, l’œuvre la plus célèbre du genre.

Cet Octuor se démarque aussi par sa durée. Rares sont les pièces de musique de chambre dont l’exécution dure plus d’une demi-heure; l’Octuor d’Enescu dure 40 minutes. Par ailleurs, les indications de nuance se situent ici souvent aux deux extrémités du spectre : peu d’œuvres de chambre, avant le milieu du XXe siècle, portent des indications comme fff ou pppp, comme on en rencontre dans cet Octuor. La tonalité mérite également qu’on s’y arrête. Le titre nous informe qu’il s’agit d’une œuvre « en do majeur », mais on y entend la tonalité de do mineur, plutôt que majeur, et au bout de quelques minutes, la musique bascule dans d’autres tonalités, généralement très éloignées du do majeur, et ne revient en do que dans le dernier mouvement, près d’une demi-heure plus tard. Quoi qu’il en soit, l’écriture est si chromatique, dans l’ensemble, qu’on chercherait en vain un centre tonal précis à un moment ou l’autre de l’Octuor. Mais l’aspect le plus stupéfiant de cet octuor est sans doute l’âge qu’avait Enescu lorsqu’il l’a écrit – à tout juste 19 ans, il n’était guère plus âgé que Mendelssohn quand celui-ci a composé le sien à 16 ans. Il ne s’agit pas moins d’une œuvre pleinement aboutie – bien au-delà d’un simple exercice d’étudiant doué.

Bien qu’il soit ostensiblement divisé en quatre mouvements, l’Octuor se joue sans pause, chaque mouvement s’inscrivant dans un grandiose plan d’ensemble de forme sonate. Le premier mouvement, qui ne contient pas moins de six des neuf thèmes de l’Octuor, correspond à l’exposition; le deuxième est un mouvement de type scherzo qui sert de section de développement et porte l’indication très fougueux; le troisième est un interlude lent (« un genre de nocturne », selon les mots du compositeur); et le finale agit comme une reprise, rattachant les fils thématiques de l’Octuor sur un rythme de valse altéré.

Enescu a dédié son Octuor à son professeur de contrepoint, André Gédalge, et l’art du contrepoint est effectivement au cœur de cette composition. De plus, les textures y sont souvent très denses, de proportions quasi symphoniques par moments. L’Octuor s’amorce avec une énergie rythmique implacable qui entraîne pratiquement toute l’œuvre à sa suite. L’œuvre se distingue aussi par la présence de puissants trémolos et de polyrythmie (superposition de plusieurs rythmes différents). La date de la création est incertaine, mais elle a probablement eu lieu le 18 décembre 1909 à la faveur d’une « Soirée d’art » à Paris.

Traduit d’après Robert Markow

Artistes

  • violon John Storgårds
  • piano David Jalbert