2018-10-09 20:00 2018-10-09 22:00 60 Canada/Eastern 🎟 CNA : Renée Fleming en récital

https://nac-cna.ca/fr/event/18737

Renée Fleming est de retour au CNA pour un soir seulement. Ne manquez pas ce récital intime d’une des ambassadrices de la musique les plus aimées et admirées de notre temps, qui captive les auditoires avec sa voix somptueuse, son art consommé et son électrisante présence scénique. Aussi à l’aise dans la grande mélodie que dans l’opéra baroque, le jazz et plus encore, Renée Fleming ravit ses...

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Salle Southam ,1 rue Elgin,Ottawa,Canada
mar 9 octobre 2018

≈ 2 heures · Avec entracte

Nos programmes sont passés au numérique.

Balayez le code QR à l’entrée de la salle pour lire les notes de programme avant le début du spectacle.

Dernière mise à jour: 2 octobre 2018

Réflexion

Chers amis,

Je suis ravie d’être de retour à Ottawa pour ce récital. L’une des grandes joies des tours de chant est qu’ils permettent de raconter un voyage unique à travers les styles, les langues et les époques. Ce programme des plus éclectiques a été conçu à l’image de mes goûts musicaux, mais aussi dans l’espoir que chacun en tire parti, par le familier ou la découverte.

Franz Schubert

Franz Schubert (1797–1828) a écrit des mélodies tout au long de sa vie, de sa première œuvre publiée alors qu’il n’avait que dix-sept ans (Erlkönig) à ses toutes dernières compositions, quelques semaines avant sa mort. Dans un imposant catalogue de plus de six cents lieder, écrits sur une période étonnamment brève de tout juste 14 ans (en plus d’une production colossale dans d’autres genres musicaux), on compte bon nombre de pièces parmi les plus populaires et appréciées du public.

Chanteurs, pianistes, auditeurs et commentateurs ne tarissent pas d’éloges sur « An Sylvia ». C’est l’un des trois lieder que Schubert a composés sur des textes de Shakespeare, celui-ci tiré des Deux Gentilshommes de Vérone. Dans la pièce, cette adorable sérénade matinale chantant les louanges de Sylvia est entonnée, non par l’un ou l’autre de ses trois prétendants, mais plutôt par un petit chœur posté devant sa fenêtre, dans la plus pure tradition romantique. 

Schubert n’a mis en musique que deux textes de l’obscur poète Karl Lappe, mais ce sont deux joyaux. « Im Abendrot » est considéré comme le plus célèbre lied de Schubert traitant du crépuscule. Tel un hymne à la splendeur céleste du coucher de soleil, cette pièce baigne dans tant de sérénité et d’expressivité qu’elle nous inspire, selon le mot d’Eusebius Mandyczewski, une sorte « d’adoration haletante ».

« Die Forelle » est l’une des créations les plus abouties de Schubert. L’air possède un charme populaire que met en relief la pittoresque partie de piano, laquelle évoque les joyeux ébats de la truite dans l’eau scintillante. Cette mélodie est aussi connue des instrumentistes, puisqu’elle constitue le quatrième mouvement, sous forme de thème avec variations, du Quintette en la majeur « La truite ».

« Gretchen am Spinnrade » est le premier lied que Schubert ait composé sur un poème de Goethe, à dix-sept ans, et constitue l’une des plus frappantes manifestations de son génie.  L’aspect le plus remarquable de ce lied est l’effet unificateur de ronronnement de la roue qui tourne, créé par la figure rythmique du piano. Assise à son rouet, Gretchen est en proie aux tourments d’un premier amour (avec Faust); languissante, elle souffre de l’absence de son amant et file la laine. Il ne s’agit pourtant pas tout à fait d’une chanson d’amour: une atmosphère d’appréhension, voire de désespoir, suggère le pressentiment qu’a la jeune femme de la tragédie qui va bientôt la frapper.

Kevin Puts

Le compositeur américain Kevin Puts (né en 1972) est surtout connu pour son opéra Silent Night (2011), couronné d’un prix Pulitzer en 2012. Letters from Georgia fait référence, non pas à l’État de la Georgie, mais plutôt à l’artiste Georgia O’Keeffe. Ce cycle de mélodies est basé sur les lettres pleines de verve qu’O’Keeffe a écrites à son futur époux, Alfred Stieglitz, et à l’artiste et suffragette Anita Pollitzer. Puts a composé ce cycle en étroite collaboration avec Mme Fleming, à qui il était destiné, et qui l’a interprété en première mondiale, à son alma mater, l’Eastman School of Music, à Rochester (N.Y) en 2016.

Musique de films

Le folklore du Brésil, son histoire haute en couleur, sa musique autochtone et ses paysages ont inspiré de nombreuses œuvres au plus célèbre compositeur du pays, Heitor Villa-Lobos (1887–1959). Bach est une autre influence majeure : il est à l’origine des neuf Bachianas brasileiras. Mouvement le plus connu des Bachianas, sans doute, l’aria est tirée de la cinquième suite de l'oeuvre. Elle a été utilisée dans des films, tels Espions en herbe 2 : L’île des rêves envolés et Cinquante nuances de Grey, et des séries télévisées, dont Amazonia et Mozart dans la jungle. On peut entendre la voix de Renée Fleming lorsque le personnage interprété par Julianne Moore chante cette pièce dans le film Bel Canto (sortie prévue le 26 octobre prochain au Canada).

« The Last Rose of Summer » est un poème de l’auteur irlandais Thomas Moore, écrit en 1805 et mis en musique sur un air traditionnel irlandais. La pièce a été reprise par plusieurs chanteurs populaires de maints pays et dans un nombre incalculable d'oeuvres classiques, notamment dans l’opéra Martha du compositeur allemand Friedrich von Flotow (1812–1883). À l’Acte II, Lady Harriet est priée d'exécuter un air pour Lionel, le jeune homme qui s’éprend d’elle. L’interprétation de Renée Fleming apparaît dans le film Trois affiches tout près d'Ebbing, Missouri (2017).

Le drame fantastique La forme de l’eau (2017) met aussi à contribution le talent de Renée Fleming, cette fois dans la chanson « You’ll Never Know ». Créée par Alice Faye dans le film Hello, Frisco, Hello, la pièce a permis au compositeur Harry Warren et au parolier Mack Gordon de remporter l’Oscar de la meilleure chanson originale en 1943.

Chansons italiennes

On se souvient surtout de Ruggero Leoncavallo (1857–1919) pour son opéra Paillasse (1892), mais il en a écrit un autre basé sur les Scènes de la vie de Bohème d’Henri Murger, description attachante de l’existence de l’auteur dans les mansardes de Paris. La Bohème (1897) de Leoncavallo met en scène la même galerie de personnages que l’opéra plus connu de Puccini. Il s’ouvre sur une scène, placée à l’acte II chez Puccini, où les personnages principaux font la fête au Café Momus, la veille de Noël. Mimi surgit alors avec Musette pour chanter une savoureuse description de son amie (« Musette svaria sulla bocca viva »), qui ne vit que pour l’amour.

Homme d’église et compositeur italien, Licinio Refice (1883–1954) a écrit deux opéras et composé un grand nombre de mélodies pour la soprano Claudia Muzio, dont la populaire chanson « Ombra di nube » en 1935. Pour Renée Fleming, cette chanson est « un énoncé si beau et si pur qu’il mérite d’être plus largement connu ».

Se déroulant à Pékin à l’époque médiévale, Turandot (1926) est le dernier opéra de Giacomo Puccini (1858–1924), resté inachevé, et le plus grandiose et spectaculaire qu’il ait écrit. La princesse Turandot a un coeur de pierre, en raison d’un événement tragique survenu dans un passé lointain. Son faire-valoir est Liù, humble et jeune esclave qui aime avec candeur et un abandon total. Dans la touchante aria « Signore, ascolta », celle-ci supplie le prince Calaf de renoncer à son intention de briguer la main de Turandot pour garder la vie sauve. Le thème pentatonique est l’une des quelques mélodies chinoises que Puccini a incluses dans son opéra.

L’Italien Francesco Paolo Tosti (1846–1916) n’a pas composé d’opéras, mais des étoiles de la scène lyrique, de Caruso à aujourd’hui, se sont plu à interpréter les populaires romances de salon et ballades qui ont fait sa fortune. « La Serenata » est l’une des plus célèbres

Comédies musicales

Les deux pièces suivantes sont tirées de comédies musicales dans lesquelles Mary Martin s’est illustrée comme héroïne par excellence de Rodgers et Hammerstein, Maria dans The Sound of Music et l’infirmière Nellie dans South Pacific. Dernière création de l’illustre duo, The Sound of Music (1959) a tenu l’affiche à Broadway pour 1 443 représentations, mais c’est le film (« La mélodie du bonheur » en V.F.) qui l’a rendue célèbre dans le monde entier, et en a fait la plus connue des comédies musicales de R & H. Sa scène d’ouverture, dans laquelle on voit les cimes des montagnes filmées depuis un hélicoptère, n’est d’abord accompagnée que par le silence. On peut ensuite entendre des oiseaux, des instruments à vent, puis l’orchestre entier – après quoi, dans le tableau le plus emblématique du film, Julie Andrews apparaît, courant dans le pré vert et chantant « The hills are alive with the sound of music ». Basée sur le roman Pacifique sud, de James Michener, South Pacific (1949) est restée à l’affiche à Broadway pendant près de cinq ans, a remporté une avalanche de prix, et regorge de chansons inoubliables, dont celle que chante Nellie quand elle reconnaît enfin son amour pour Émile : « I’m in love with a wonderful guy ».

La musique et les paroles du spectacle de Broadway Nine (1982) sont l’oeuvre de Maury Yeston. Inspiré du film de Federico Fellini, celui-ci met en scène un réalisateur, Guido Contini, confronté à une crise de la quarantaine, à l’aube de cet anniversaire fatidique, qui l’empêche de réaliser son film. « Unusual Way » apparaît dans la scène où Claudia explique à Guido la nécessité de mettre fin à leur relation puisqu’elle ne correspond pas à la femme qu’il voudrait qu’elle soit. Cette relation leur a tout de même été profitable jusqu’alors, « de façon tout à fait inusitée ».

The Visit est d’un cru plus récent (musique de John Kander et paroles de Fred Ebb). Sa création a été compliquée par les attentats du 11 septembre 2001 : la pièce a pris l’affiche à Chicago, plutôt qu’à New York, et la version en un acte n’a été présentée à Broadway qu’en avril 2015. Ce thriller, basé sur une pièce de Friedrich Dürrenmatt, raconte l’histoire d’une vieille dame infiniment riche revenant dans sa ville natale avec une offre qui pourrait sauver cette dernière du marasme économique, à condition que les habitants acceptent que soit assassiné l’homme qui l’avait abandonnée de nombreuses années plus tôt. Elle formule son offre dans la chanson « Winter » et médite sur ce qui l’a conduite à cette extrémité dans « Love and Love Alone ».

Le récital se conclut, comme il se doit, par « The Glamorous Life », tirée de A Little Night Music (1973), musique et paroles de Stephen Sondheim, le « plus grand et plus célèbre artiste, sans doute, du théâtre musical américain » (Frank Rich, New York Times). Inspirée du film Sourire d’une nuit d’été d’Ingmar Bergman, la comédie musicale, faite de chassés-croisés amoureux, a pour personnage central Désirée Armfeldt, actrice qui fait des tournées et dont la carrière l’oblige à confier la garde de sa fille à sa mère. La chanson « The Glamourous Life » est chantée par ces trois personnages et un chœur. Dans la version de Renée Fleming (qui a élevé ses deux filles tout en ayant une carrière de chanteuse d’opéra), Désirée est peut-être bien une soprano et le numéro de groupe se transforme en un monologue que ne renierait pas une vraie diva.

Traduit d’après Robert Markow

Artistes

  • soprano Renée Fleming
  • piano Richard Bado