Sur le pont d’un bateau désert, deux poètes dialoguent au cœur d’un univers où s’entrecroisent voix humaines et personnages vidéographiques. Ce sont Verlaine et Rimbaud. Pour donner corps à cet opéra fantasmagorique signé Normand Chaurette et Dominique Pauwels, le duo Denis Marleau et Stéphanie Jasmin cultive l’inquiétante étrangeté qui l’a imposé sur la scène internationale.

Sur le pont d’un bateau désert, deux silhouettes font connaissance : Paul Verlaine et Arthur Rimbaud. Les deux poètes nomades dialoguent au sein d’une petite humanité fantasmagorique ; leurs paroles errent le long de cette frontière insaisissable où le mot devient son, où la réalité est travaillée par le rêve, où les corps sont faits de chair et de songes. Sur un autre pont, un enfant s’endort, bercé par une mère dont le chant enveloppant semble épouser le mouvement de la houle.

Plongés dans la lumière déclinante de l’enfance qui s’en va, les motifs du voyage, du sommeil, de la mer et de l’illumination s’attirent et se repoussent sous la plume de Normand Chaurette, figure majeure de la dramaturgie québécoise. Mis en musique par Dominique Pauwels, fidèle complice de l’artiste flamand Guy Cassiers (qui nous a visités avec Rouge décanté), son livret convoque deux chanteuses, un ensemble instrumental, un chœur d’enfants et un chœur de femmes.

Pour donner corps à L’autre hiver, cet opéra du XXI^e siècle, le duo Denis Marleau et Stéphanie Jasmin cultive cette inquiétante étrangeté qui lui est propre : présences humaines et personnages vidéographiques s’entrecroisent au plus profond d’un temps suspendu, dans l’espace irréel d’un vaisseau empiégé dans la glace.